(Le Pays 30/04/2010)
Le retour à une vie constitutionnelle normale est l’objectif principal de tous les acteurs de la vie politique guinéenne. Du moins, pour tous ceux qui se sentent liés par l’accord de Ouagadougou. Le 17 avril , le Conseil national de transition , chargé de proposer une copie consensuelle de la nouvelle Constituion, a déposé ses conclusions. La communauté internationale a salué la qualité du travail abattu par l’équipe de Rabiatou Diallo.
162 articles constituent le nouveau texte fondamental soumis à l’appréciation du président par intérim, le général Sékouba Konaté. Mais le général se trouve confronté à un dilemme. En lui soumettant le projet de Constitution, la première responsable du CNT , Rabiatou Diallo, a indiqué la suite que l’on doit donner au dossier. Elle a tout simplement proposé au président par intérim de promulguer la Constitution par décret. Une solution rapide, efficace et qui a l’avantage de permettre de respecter la date fatidique du 27 juin, fixée pour le premier tour de l’élection présidentielle. On comprend bien cet empressement de la syndicaliste et de son équipe à tourner définitivement cette page triste de l’histoire du pays, entachée par le massacre du 28 septembre.
Tel n’est pas l’avis de certaines personnalités du gouvernement de transition dont le Premier ministre, Jean Marie Doré. En fin politique, il s’est interrogé sur la meilleure façon d’adopter cette nouvelle Constitution : « le projet qui est fait est une nouvelle Constitution qui crée un nouveau régime et je n’ai pas le souvenir, dans aucun pays et en aucun temps sauf en cas de coup d’Etat, où on adopte une nouvelle Constitution créant un nouveau régime par décret, c’est la question que se pose le gouvernement. Le gouvernement ne prend pas de position ». En deux mots comme en mille, le Premier ministre, nonobstant la situation politique actuelle, ne soutient pas une adoption de la Constitution par decret. Le problème, c’est qu’il ne propose rien en retour, dans la mesure où il sait lui-même que son pays ne saurait supporter un référendum avant le 27 juin 2010. En clair, c’est le report des élections qui est envisagé si l’option du référendum venait à être retenue.
Cela dit, le Premier ministre pose une question fondamentale, celle de la base légale de cette nouvelle Constitution qui impose une nouvelle République. Comme il l’a lui-même déclaré devant la presse guinéenne, ç’aurait été une modification, qu’on aurait compris. La balle est donc dans le camp du président par intérim. C’est à lui qu’échoit cette lourde décision. S’il opte pour la promulgation par decret, c’est un précédent juridique qu’il crée. Dans le cas contraire, il faudra se résoudre au report des élections, reprendre son bâton de pèlerin pour faire le tour des partenaires financiers avec toutes les incertitudes liées à cette opération. Sans oublier que la situation nationale pourrait également dégénérer si les nostalgiques du capitaine Dadis Camara se mettaient à la partie pour gagner du temps en pourrissant la situation sociale. Comme on le voit, il y a urgence à sortir de cette transition. L’accord de Ouaga n’avait pas prévu ce scénario. Mais si on devait obligatoirement adopter la Constitution par référendum, n’y a-t-il pas moyen de le jumeler à la présidentielle ? Il s’agit maintenant de gérer au mieux la transition pour préserver les intérêts du peuple guinéen.
Abdoulaye TAO
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