mercredi 28 avril 2010

Togo - DEBAUCHAGE DE GILCHRIST OYMPIO: Info ou intox ?

(Le Pays 28/04/2010)
Est–il possible que Gilchrist Olympio, l’opposant historique aux régimes Eyadema père et fils succombe à la tentation d’un rapprochement avec le pouvoir de Lomé ? L’information se fait persistante depuis quelque temps dans le pays. Nous ne l’aurions pas relayée si un éminent professeur n’avait pas, sur RFI, abondé dans le même sens que la thèse du retournement de veste.
Si cette information est avérée, Gilchrist Olympio aura alors jeté aux orties quarante années d’un combat politique contre un système qui a assassiné son père et qu’il a tenté de terrasser démocratiquement, en vain. Depuis qu’il a raté le dépôt de sa candidature pour l’élection présidentielle, sa carrière politique en a pris un serieux coup. Atteint par la limite d’âge, c’était une occasion unique pour lui de défier une dernière fois le régime Eyadema et d’obtenir enfin le changement tant prôné.
Le comportement ambigu du vieil opposant face à la candidature de dernière minute de son dauphin, son silence face à la victoire contestée de Faure Eyadema, sa lapidation à la plage de Lomé lors d’un meeting du front de l’opposition, ont fini de convaincre les plus sceptiques, qu’il se tramait quelque chose de pas clair entre le fils de Sylvanus Olympio et le pouvoir dont il avait sollicité la protection pour aller à son propre meeting. Le vieux lion est assurément en perte de vitesse. En tous cas, on a du mal à jauger le bénéfice personnel qu’il peut tirer de cette éventuelle volte-face.
Si lui qui a incarné la résistance à la dictature de Gnassingbé Eyadema rejoint avec armes et bagages le président Faure, il torpille de facto toute la lutte actuelle de l’opposition togolaise. Et cela, personne ne le lui pardonnera. Le grand homme politique qu’il a toujours été, marquera alors de façon très négative sa fin de carrière. Au nom de quoi va-t-il sacrifier tout cet héritage politique ? L’homme est en train de succomber doucement aux sirènes de la réconciliation et de la paix, cheval de bataille de Faure Eyadema, en quête désespérément de légitimité après deux élections chaotiques. La réhabilitation de Sylvanus Olympio, assassiné par Eyadema père ne semble pas étrangère à cette chronique annoncée d’une volte-face. Si tel était le cas, la trahison serait totale dans ce contexte de protestations et de violences post-électorales au cœur desquelles se trouve impliqué son parti, l’Union des forces du changement (UFC), chef de file du FRAC (Front des républicains pour l’alternance et le changement).
En attendant que cette information se confirme ou se démente, le simple fait que cette hypothèse ait pu traverser l’esprit du camp présidentiel, montre à quel point le mythe Olympio s’est étiolé ces dernières années. Au moment où le pays célèbre le cinquantenaire de son indépendance, Faure Eyadema aura fière allure de brandir la reddition de son plus féroce adversaire politique comme un symbole de réconciliation et de paix. On ne peut cependant s’empêcher de s’interroger sur ce que gagne le Togo dans ce deal qui ressemble plutôt à une paix des braves entre deux familles. Une paix des braves qui affaiblirait dangereusement l’opposition et instaurerait la culture de la pensée unique, toute chose qui prépare le lit des dictatures.

Abdoulaye TAO
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