(Afriscoop 26/04/2010)
(AfriSCOOP Analyse) — Le rapprochement entre le Togo et le « Gondwana » (Etat caricatural de l’Afrique utilisé par le confrère Mamane dans ses chroniques sur Rfi, Radio France Internationale) n’est en aucun cas exagéré ! Parmi les ex-colonies françaises d’Afrique qui ont accédé à la souveraineté internationale en 1960, le Togo a tout de particulier. Pour le bilan cinquantenaire, l’heure n’est aucunement à la réjouissance dans ce petit pays de l’Afrique de l’ouest, mise à part la satisfaction que le Togolais peut s’auto-donner de s’être soustrait du joug colonial.
Exit l’époque où les Ouest-africains raffolaient de visiter le Togo, de même que des touristes de par le monde qui avaient collé à ce pays de près de 06 millions d’âmes l’étiquette de la « Suisse d’Afrique ». Grâce au boom phosphatier et à une stabilité politique sous le régime du parti unique (Rpt, Rassemblement du peuple togolais, créé le 30 août 1969), le Togo avait connu un essor particulier que lui enviaient bien nombre de ressortissants de pays d’Afrique de l’ouest. Cette chaîne de « success stories » sur le plan politique et économique sera hélas rompue dès le début du processus démocratique sur le continent noir. Les raisons en sont toutes simples : le régime en place à Lomé (depuis le premier coup d’Etat perpétré dans l’Afrique post-indépendances en 1963) n’a jamais fait de réelles concessions face aux revendications démocratiques de sa population. Contrairement par exemple aux schémas de consensus de la classe politique qui ont découlé de bons nombre de « Conférences nationales » en Afrique francophone !
Il faut aussi avouer que la position du « tout ou rien » des opposants togolais en face de la “machine au pouvoir” n’a pas non plus facilité le succès de la « Conférence nationale » “made in Togo” et qui a même été baptisée « souveraine ». L’une des principales critiques qu’on peut opposer à tous ceux qui voulaient en découdre avec le Rpt à la faveur de la « Conférence nationale souveraine du Togo » a été leur volonté de « dissoudre le Rpt » !!! Crime de lèse-majesté en fomentation en quelque sorte.
Du coup, quand le régime du regretté E. Gnassingbé a repris du poil de la bête après la bourrasque de la « Conférence nationale », il a un peu plus cadenassé le pouvoir… Et a ostensiblement affiché depuis cette période son envie irrésistible de rendre coup pour coup, et aux opposants, et à la population. Malgré à titre d’exemple la rupture de la coopération entre Lomé et Bruxelles en 1993 pour « déficit démocratique », le régime Rpt a continué à vivre dans l’opulence. Au grand dam du peuple togolais qui s’est progressivement enfoncé dans la paupérisation. La dilapidation des ressources internes (rentrées fiscales, portuaires et douanières) a servi et continue de servir de lit à la gabegie financière du Rpt. Bilan sévère de tout ce psychodrame, le Togo est l’un des rares Etats d’Afrique occidentale à n’avoir jamais connu d’alternance politique depuis son indépendance. « La Terre de nos aïeux » est également le seul pays d’Afrique de l’ouest qui rejette le mode de scrutin présidentiel à deux tours. Cette somme d’incohérences politiques aboutira à faire du Togo en avril 2005 le premier pays africain indépendant dans lequel des contestations post-électorales auront coûté la vie à près d’un millier de personnes, depuis que le « Vent de l’Est » a commencé à souffler sur le continent noir ! Un nouveau record macabre et vil venait d’être établi après le coup d’Etat de janvier 1963.
Quand le politique est mouillé, tout le pays a froid
Les errements politiques du pays des « Nana Benz » (célèbres commerçantes de pagne imprimé en Afrique) ne lui ont jamais permis de se doter d’un nouveau plan de développement socio-économique. Ses principales infrastructures de base ont à l’heure actuelle le visage lisse comme les pagnes délavés des « Nana Benz ». Son parc routier délabré est à même de donner le tournis même à tous les coureurs de rallyes auto-moto les plus avertis. Pourtant, le Togo abrite le siège de grandes banques sous-régionales comme la Bidc (Banque d’investissement et de développement de la Cedeao) et la Boad (Banque ouest-africaine de développement) qui financent le développement sectoriel d’autres Etats ouest-africains. Lomé est par ailleurs le siège de l’Eamau (Ecole africaine des métiers de l’architecture et de l’urbanisme), a offert à l’Afrique sa 1ère femme maire, bâtonnier, arbitre international de volley-ball ! Autant d’atouts humains qui n’ont jamais été exploités à bon escient par le pays de la regrettée chanteuse Bella Bellow… Tout comme ses ressources naturelles telles que l’or, le fer, le pétrole, le café, le cacao, le coton, ses terres fertiles et rizicoles etc.
Au moment où le Niger, la Guinée, le Liberia, la Sierra Leone ou encore la Guinée-Bissau se relèvent des cycles machiavéliques de conflits politiques, le Togo s’y est encore enfoncé un peu plus à la faveur de l’élection présidentielle du 04 mars, scrutin manifestement entaché de graves fraudes. Que vont donc devenir les 63% de Togolais tenaillés quotidiennement par la faim ? Jamais, jamais, l’exaspération des Togolais n’a autant penché vers une résolution par l’affrontement de leurs différends politiques comme le clame ces dernières semaines la rue loméenne, fatras des peuples du Togo !
lundi 26 avril 2010 par Bellino CHRISTIAN
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