mercredi 29 décembre 2010

RDC : Majorité et Opposition face aux enjeux de 2011

KongoTimes!
Les observateurs avisés de la politique congolaise n'ont pas manqué de remarquer que le désormais opposant Vital Kamerhe a synchronisé l'annonce de la création de son nouveau parti l'UNC avec la clôture du congrès de l'UDPS, étouffant par ce moyen le retentissement attendu de l'annonce d'Etienne Tshisekedi à la présidentielle de 2011. Cette stratégie de récupération de la dynamique suscitée au sein de l'opposition par le retour de Tshisekedi montre que Kamerhe cherche à se présenter comme la principale figure de l'opposition politique congolaise face à la candidature probable de Joseph Kabila en 2011.
Les contours de la campagne 2011
A côté des prétentions de Vital Kamerhe pour la présidentielle de 2011, l'opposition habituelle a choisi de se ranger derrière la personnalité d'Etienne Tshisekedi. Les Franck Diongo, Jean-Claude Vuemba, Steve Mbikayi, Martin Fayulu, Christian Badibangi et autres ont, en effet, plus ou moins annoncé leur intention de mettre en place un programme commun de gouvernement autour de l'UDPS comme formation centrale, à l'instar de ce que représente le PPRD au sein de l'AMP. Vital Kamerhe et l'UNC feront bande à part en faisant le calcul que Tshisekedi ne pourra physiquement sillonner les 143 territoires de la République démocratique du Congo et que, absent sur le terrain, sa seule visibilité médiatique ne sera pas suffisante pour rassembler les électeurs de la circonscription nationale autour de sa personne.
Kamerhe a vite compris que l'absence de Jean-Pierre Bemba et l'inscription tardive de l'UDPS dans le jeu électoral lui permettaient d'occuper un espace électoral en grappillant des partisans au sein du MLC et parmi les députés de la majorité originaires de son terroir. Face à la majorité présidentielle, il y aurait donc trois blocs d'opposants, l'un dirigé par Vital Kamerhe avec l'UNC comme parti phare, l'autre emmené par Etienne Tshisekedi avec l'UDPS comme parti fédérateur et l'autre piloté par le MLC de Jean-Pierre Bemba (qui ne fait officiellement plus partie de l'Union pour la Nation coordonnée par Clément Kanku). Cette dichotomie de l'opposition en un pôle dissident de la majorité (autour de l'UNC de Kamerhe) et un pôle oppositionnel radical (UDPS/MLC et autres) en constituerait la principale faiblesse si les choses devaient se confirmer dans cette tournure.
D'abord l'opposition congolaise présente la particularité de ne pas suivre les clivages politiques et de se cristalliser autour de personnalités politiques sans aucune considération pour la coloration idéalogique de leurs projets de société. En raison principalement de la nature fasciste de la Deuxième République qui gouvernait en appliquant le principe de la délégation charismatique du pouvoir, les électeurs suivent des personnes et non des projets de société (durant le régime zaïrois, vous étiez respecté selon votre proximité supposée avec le guide suprême et non pour vos compétences ou votre talent politique).
Dans la réalité politique congolaise, il est plus question de cercles partisans (autour d'une personnalité) que de partis politiques autour d'un projet). Ensuite, dans sa configuration actuelle, l'opposition congolaise est composée d’une droite nostalgique de l'ancien régime (MLC etc.) proche d'une nébuleuse néo-mobutiste représentée par Kamerhe (ancien du Front des Jeunes Mobutistes) et d'une gauche radicale (UDPS et avatars) qui n'est idéalogiquement opposée au PPRD que dans la mesure où elle l'envisage, à tort, comme une transformation de l'AFDL (position très courante dans la diaspora).
On observe également que l'opposition MLC est divisée sur l'attitude à adopter par rapport à un ralliement derrière Etienne Tshisekedi car, lors du congrès de l'UDPS, on a pu voir un Constant Ndom, secrétaire général adjoint du MLC, laisser entendre que le MLC pourrait soutenir la candidature de Tshisekedi, aussitôt démenti par Thomas Luhaka, également secrétaire général adjoint, dépêché d'urgence par François Mwamba, secrétaire général, pour contredire Ndom et réaffirmer que le MLC présentera des candidats à tous les échelons. Mais, quel candidat le MLC présenterait-il à la présidentielle ?
La candidature de Jean-Pierre Bemba ne serait tout simplement pas sérieuse et entrainerait la disparition du MLC. La candidature d'Etienne Tshisekedi, si elle est logique (il a déclaré au cours du congrès qu'il n'avait pas lutté pendant 29 ans pour les beaux yeux de qui que ce soit, et que son long combat visait la conquête et l'exercice du pouvoir), comporte des dangers en ce que si le candidat de l'UDPS n'arrive pas en deuxième position au moins au premier tour, cette formation historique de l'opposition au Maréchal Mobutu, déjà affaiblie par sa non participation aux scrutins de 2006, perdra définitivement son importance sur l'échiquier politique congolais.
La seule stratégie utile et conséquente pour Etienne Tshisekedi, s'il souhaite gouverner un jour et renforcer son parti au sein de la gauche, consiste à faire alliance avec Joseph Kabila dans une union des gauches (PPRD, UDPS, PALU, etc.) qui pourrait l'emporter au premier tour. Ce rassemblement aurait le mérite de clarifier la scène politique congolaise en une gauche de développement gouvernant en face d'une droite d'ancien régime. Mais, à entendre les ténors de l'UDPS, ce schéma serait utopique. Toutefois, l'entourage de Tshisekedi ne devrait pas commettre l'erreur de confondre sa popularité au sein de son parti avec sa popularité au plan national, qui s'est sérieusement érodée, compte tenu du nombre des dissidences issues de l'UDPS. Autre aspect du problème, il ne faut pas perdre de vue que la division ouverte au sein de l'UDPS, où les compagnons historiques Mukendi et Beltchika ont été évincés de la direction du parti, peut laisser craindre que leurs partisans puissent faire défection au moment crucial.
Quant à Vital Kamerhe, sa déclaration politique le positionnant dans l'opposition n'a fait que brouiller son image au sein de l'électorat. Contrairement à ce que pensent ses conseillers, ses sympathisants du PPRD ne le suivront pas nécessairement puisque la plupart étaient des partisans convaincus de Joseph Kabila avant d'éprouver un sentiment de camaraderie pour leur ancien secrétaire général et se rallier derrière son courant tant qu'il faisait partie de la majorité. Passé le moment d'émotion suscité par son positionnement dans l'opposition, ses anciens camarades de la majorité analyseront froidement la situation et n'accepteront vraisemblablement pas que Kamerhe prenne Joseph Kabila pour cible durant la campagne présidentielle. De plus, l'implantation de son parti s'effectuera en concurrence directe avec les efforts de mobilisation de l'UDPS de Tshisekedi et là encore, rien n'indique que l'opposition habituelle laissera Kamerhe dérouler paisiblement ses arguments de campagne. Autre hypothèse, s'il devait être barré par l'UDPS et alliés au premier tour, Kamerhe, très désireux de gouverner, pourrait tenter un rapprochement avec l'actuelle majorité et viser la primature. Pour toutes ces considérations, les opposants congolais n'ont aucune véritable raison de collaborer entre eux.
En effet, face au bloc naturel de Joseph Kabila (42% au premier tour de la présidentielle en 2006) et devant l'évidence de l'accroissement de son électorat en raison d'un bilan manifestement positif, leur seule chance de gouverner en 2011 serait de conclure, individuellement, un accord de coalition avec la majorité au pouvoir.
Les mauvaises critiques de l'opposition
La faiblesse de l'opposition congolaise, dans le nouvel environnement démocratique de la IIIe République, résulte du fait qu'elle ne s'oppose pas de manière constructive au programme du gouvernement, mais viscéralement aux personnalités qui incarnent le pouvoir. Elle ne parvient donc pas à expliquer pourquoi le PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement) montre graphique à l'appui dans son Rapport sur le développement humain 2010 que la tendance de l'indice de développement humain sur la période 1970-2010 révèle que durant la décennie présidée par Joseph Kabila (2001-2010) le développement de la République démocratique du Congo a repris l'ascenseur de manière comparable à la tendance de la Chine, du Guatemala ou de l'Indonésie, après une longue période d'absence de développement et une descente aux enfers à partir de 1985. Or, si le régime de Joseph Kabila est soutenu par la communauté internationale et par une large majorité de Congolais, c'est précisément parce que les chiffres du développement plaident véritablement en sa faveur et que l'effervescence économique qui se constate dans les rues de Kinshasa à travers une efflorescence d'activités commerciales jamais vue auparavant prouve à suffisance que la population congolaise a compris que, au-delà de la démocratie retrouvée sous sa présidence, Joseph Kabila a déjà créé les conditions de l'essor économique et que le reste va nécessairement suivre.
En mettant l'accent sur les difficultés sociales des Congolais (eau et électricité, logement, faiblesse des revenus), l'opposition congolaise manque sa cible puisque, d'une part, les taux de raccordement au réseau électrique et d'adduction d'eau ne dépassaient pas 10% à la chute du Maréchal Mobutu, malgré le potentiel hydro-électrique du barrage d'Inga et de gigantesques réserves en eau potable et, d'autre part, le revenu national brut par habitant a presque triplé sur la décennie Joseph Kabila (291 USD en 2008 selon le Rapport du PNUD 2010, contre moins de 100 USD à la chute du Maréchal Mobutu), sachant que ce revenu aurait certainement décuplé n'eussent été les contraintes liées à l'effort de pacification dans les provinces de l'Est et à l'étranglement de la dette que Joseph Kabila vient de réussir à alléger à près de 85%.
Donc, face à ces résultats objectifs qui n'échappent ni aux agences de développement, ni aux investisseurs internationaux et locaux, le discours de l'opposition ne fait qu'évoquer les effets des ravages de la mégestion de la Deuxième République, qu'on ne peut raisonnablement attribuer au régime de Joseph Kabila. Les critiques virulentes de l'opposition habituelle (parlementaire et extra-parlementaire) et de l'opposition dissidente (Kamerhe et partisans) ne sont donc pas de nature à convaincre la communauté internationale ou les Congolais de l'inefficacité de la politique de redressement de la République démocratique du Congo menée par Joseph Kabila.
La dynamique Kabila
Malgré les difficultés qu'ils traversent, les Congolais ont compris que le régime de Joseph Kabila a réussi à renverser la tendance du sous-développement imprimée par la Deuxième République. Les grands travaux d'infrastructures et les efforts menés dans les secteurs de la santé et de l'éducation ont convaincu les Congolais que malgré la faiblesse des moyens du gouvernement congolais consécutive à l'héritage négatif de la Deuxième République, le régime de Joseph Kabila met tout en œuvre pour le redressement de la République démocratique du Congo.
Autant que les investisseurs étrangers, les Congolais ont désormais conscience qu'il se passe quelque chose de positif dans leur pays au plan économique. Avec les libertés politiques et économiques retrouvées, avec le débat démocratique favorisé par Joseph Kabila, il est certain que les Congolais ne se laisseront pas attirer par les marchands de rêves et sauront résister à leur discours populiste.

Léon Olivier Engulu (Philosophe, AMP)
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