jeudi 2 septembre 2010

Côte d'Ivoire -Reconstruire la digue sur la base d’élections

(Afrique Actu 02/09/2010)
Les relations entre le pays d’Houphouët-Boigny et l’ancienne métropole, la France, étaient tendues depuis la tentative de coup d’Etat contre le président Laurent Gbagbo, le 19 septembre 2002, qui s’est mué en rébellion dans le nord du pays. Après avoir contrôlé plus de 60% du territoire ivoirien, les hommes de Guillaume Soro avançaient sans grande difficulté vers Abidjan avant d’être stoppés par l’armée française.
Mais celle-ci, au lieu de combattre les rebelles comme le voulait le pouvoir ivoirien, qui évoquait les accords de défense avec l’Hexagone, s’est contentée de s’interposer entre les deux belligérants. Gbagbo n’a pas manqué, aidé par ses ouailles, « les jeunes patriotes », d’accuser le président Jacques Chirac d’être de mèche avec des pays qui veulent déstabiliser le sien.
Le summum de la tension entre les deux capitales sera atteint par le bombardement d’une position de la force Licorne par l’armée loyaliste ivoirienne le 6 novembre 2004, suivi de la riposte française, qui a anéanti les avions de chasse agresseurs.
La communauté française va alors subir des exactions qui vont contraindre environ quinze mille (15 000) de ses membres à rentrer précipitamment au bercail en laissant, pour la plupart, leurs biens.
C’est dans ce contexte que le collège Jean-Mermoz, l’école Jacques- Prévert et le lycée Blaise-Pascal, établissements d’enseignement français conventionnés d’Abidjan qui assuraient la scolarisation de près de 4 000 enfants de la maternelle au baccalauréat, avaient été détruits.
Il faut attendre 2007 avec l’élection de Nicolas Sarkozy pour voir une détente dans les relations franco-ivoiriennes. « Je pense qu’il y a eu un changement d’attitude depuis que le gouvernement a changé à Paris« , avait déclaré le président ivoirien dans un entretien au Figaro.
Toutefois, les deux chefs d’Etat sont restés chacun dans son coin sans faire de grands pas l’un vers l’autre. On se rappelle, le 14 juillet, Laurent Gbagbo a été le seul chef d’Etat invité par son homologue français à lui avoir fait faux bon. Depuis le 31 août 2010, le pouvoir ivoirien semble avoir, si on ne se fie pas trop au caractère versatile de son premier responsable, opté pour une vraie réconciliation :
« Vive la France, vive la Côte d’Ivoire, vive les relations entre la France et la Côte d’Ivoire », a souligné ce dernier en affichant son ambition : « Si je suis tatillon aujourd’hui sur le futur, c’est parce que je ne veux plus qu’il y ait de rupture de digue… Je veux que (…) nous bâtissions aujourd’hui (des relations) sur du solide, surtout du vrai« .
C’est la cérémonie de remise des clés du groupe scolaire Jacques-Prévert mardi dernier qui a été l’occasion pour Abidjan de faire ces yeux doux présidentiels à la France. En réhabilitant cet établissement, l’Etat ivoirien a voulu adresser « un signal fort » aux autorités françaises. Vu ce que les deux Etats représentaient l’un pour l’autre, on pourrait dire que la realpolitik est en train de reprendre le dessus sur les humeurs et les considérations idéologiques :
en effet, l’ex-colonisateur est le premier partenaire commercial de la lagune Ebrié et son premier investisseur étranger ; par ailleurs, la Côte d’Ivoire compte environ 600 entreprises françaises, dont les chiffres d’affaires contribuent à hauteur de 30% de son produit intérieur brut.
Qu’à cela ne tienne, Gbagbo doit réaliser qu’il lui faut absolument aller aux élections pour espérer tisser, comme il dit vouloir le faire, des relations sur « du solide mais surtout sur du vrai » avec Paris. Il lui faut cette fois-ci tenir sa promesse de permettre à ses compatriotes, le 31 octobre prochain, de choisir qui ils veulent comme dirigeant.
Abdou Karim Sawadogo
par L'Observateur Paalga

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