samedi 14 août 2010

Somalie - Impasse militaire en Somalie ?

(Liberation 14/08/2010)
Depuis l'échec de l'opération Restore Hope, lancée en décembre 1992 par les Etats-Unis en Somalie, les puissances occidentales ne veulent plus se risquer dans le non-Etat le plus violent d'Afrique. La situation a tellement pourri, depuis la fin de la guerre froide et la chute, en 1991, du dictateur somalien Siad Barré (d'abord soutenu par l'URSS, puis par les Etats-Unis), qu'on voit mal, aujourd'hui, comment endiguer la violence somalienne.
Une violence d'autant plus inquiétante qu'elle prend un caractère «global», avec la présence de combattants irakiens, afghans, pakistanais et iraniens en territoire somalien. Un double attentat qui a fait 76 morts, le 11 juillet en Ouganda, a été revendiqué par la milice extrêmiste des Shebabs, qui a prêté allégeance à Al-Qaeda. La guérilla, devenue un mode de vie dans les années 1990 en Somalie, a trouvé avec Al-Qaeda une justification idéologique.
Les Etats-Unis, aujourd'hui, plaident pour le renfort de troupes africaines de l'Afrisom en Somalie, qu'ils sont prêts à financer. Lors d'un sommet de l'Union africaine (UA) qui s'est tenu du 19 au 27 juillet à Kampala, les chefs d'Etat africains ont promis d'envoyer 4 000 hommes, pour renforcer les 6000 soldats ougandais et burundais déjà présents en Somalie. Leur mission : protéger un gouvernement de transition qui ne dispose d'aucune marge de manoeuvre, sur un territoire réduit à une partie de la capitale, Mogadiscio.
Certains experts redoutent déjà les effets contreproductifs d'un tel effort. «Les dirigeants africains rêvent les yeux ouverts», dénonce Zakaria Mohamed Haji Abdi, de l'Alliance pour la relibération de la Somalie (ARS), un groupe qui s'est opposé à l'intervention militaire de l'Ethiopie, entre 2006 et 2009. «La solution militaire a été tentée, et elle a échoué, poursuit-il. Le temps du dialogue est venu.»
Une position que partage Roland Marchal, du Centre d'études et de recherches internationales (Ceri), à Paris. «Dans le contexte actuel, les progrès sont mesurés en fonction du nombre de soldats et de miliciens tués». Roland Marchal préconise l'instauration d'un panel de vieux policiens musulmans et d'Occidentaux, pour tenter un processus de réconciliation comprenant toutes les forces en présence, les Shebabs compris. Mais peut-on discuter avec un groupe qui revendique son appartenance à Al-Qaeda ?
Selon Emmanuel Kisiangani, chercheur à l'Institute for Global Dialogue(IGD), basé en Afrique du Sud, la communauté internationale devrait se montrer prête à reconnaître tout gouvernement paraissant acceptable aux Somaliens, quel que soit le profil de ses dirigeants. «Il faut comprendre que les politiques actuelles et passées en Somalie ont renforcé l'extrêmisme religieux, de même que la méfiance à l'égard de l'Occident», rappelle-t-il. En Afrique du Sud, des voix s'élèvent contre toute implication militaire en Somalie, par crainte d'éventuels attentats.

•Par Sabine Cessou
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