(L'Observateur Paalga 26/08/2010)
José Abeso Nsue Nchama, alias POPO, ex-capitaine des Forces terrestres, Manuel Ndong Anseme, adjudant, Jacinto Micha Obiang, contrôleur de douane et élément de la Sécurité présidentielle, ainsi qu’Alipio Ndong Asumu ont été exécutés le 21 août immédiatement après avoir été condamnés le même jour par la cour militaire de Malabo, qui les a reconnus “criminellement responsables et auteurs de délits d’attentat contre le chef de l’Etat et représentant du gouvernement, terrorisme et trahison”.
Ils leur a été ainsi reproché d’avoir attenté à la sécurité et à l’intégrité du palais présidentiel équato-guinéen le 17 février 2009. L’on se rappelle que, ce jour-là, des hommes armés arrivés par la mer avaient tenté de débarquer à Malabo pour une attaque aux motivations encore mystérieuses.
Les autorités avaient, à l’époque, affirmé avoir repoussé l’attaque, qui visait, selon elles, le palais présidentiel avec pour objectif de chasser du pouvoir le régime du président Teodoro Obiang Nguema et de placer l’ex-capitaine José Abeso Nsue comme chef d’état-major, lequel devait faire ensuite appel à un certain Angel Esono Nsuga, considéré comme le cerveau du putsch raté mais pas encore arrêté, pour être chef de l’Etat.
Dans un scénario digne de la célèbre série télévisée 24h chrono, les quatre hommes ont été « enlevés » au Bénin où ils résidaient avec le statut de réfugiés et ramenés au pays pour être détenus au secret à la prison Black Beach de Malabo, dans laquelle ils auraient avoué, on l’imagine bien sous torture, leur implication dans l’attaque du palais. On imagine aisément la détresse des familles endeuillées, d’autant plus que José Abeso aurait demandé à voir la sienne après l’annonce du verdict, mais quand sa femme et son fils sont arrivés à la prison de Black Beach une heure plus tard, ce n’était que son macchabée qui les attendait. Hélas !
Force est de reconnaître qu’exécuter un condamné quelques instants seulement après l’avoir jugé est, en soi, inconcevable quand on sait qu’en droit - national comme international - aucun condamné, surtout à la peine capitale, ne peut se voir appliquer la sentence qu’après épuisement de toutes les voies de recours ouvertes par la loi. La Guinée Equatoriale n’a-t-elle pas ratifié le 25 septembre 1987, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui dispose en son article 6, alinéa 4 que : “Tout condamné à mort a le droit de solliciter la grâce ou la commutation de la peine” ? Un texte qu’ils ont donc royalement ignoré en mettant à mort les condamnés au mépris même de toute possibilité pour eux de se pourvoir en cassation quand bien même il s’agirait d’« attentat contre le chef de l’Etat ».
L’histoire retient que le régime équato-guinéen est un Etat hors-la-loi, coutumier donc de ce genre d’exécution à la sauvette, dignes du Far-West où la loi du colt ou de la corde sanctionnait tout verdict. Petit rappel qui tient lieu de mini-cours d’histoire sur la « justice » selon Malabo : en 1986, un député condamné pour tentative de coup d’Etat est fusillé le lendemain de son procès ; en 1992, une personne condamnée pour meurtre est exécutée deux heures après sa condamnation ; récidive un an après, un homme est condamné pour homicide et exécuté 24 heures plus tard. Même aux Etats-Unis où la condamnation à mort est toujours en vigueur, il y a eu plusieurs exemples de condamnés qui ont quitté le couloir de la mort après avoir été innocentés. Et selon des statistiques d’Amnesty International, de 2000 à 2004, ils ont été 35 à connaître cette issue inespérée.
C’est dire donc s’il faut faire preuve de prudence et surtout de patience dans ce genre de jugement. Du côté du Japon, le cas de Sakae Menda est éloquent : arrêté en 1949 pour le meurtre de deux citoyens, les policiers obtinrent de faux aveux sous la torture et, à l’issue d’un procès inéquitable, il fut condamné à mort ; en 1983, soit trente-quatre ans après, les tribunaux l’acquittèrent, faisant de lui le premier prisonnier japonais condamné à mort innocenté.
Autant d’exemples qui prouvent, si besoin en était encore, que prudence - surtout en matière de peine capitale - est mère de sûreté. Haro donc sur ces exécutions sommaires qui n’ont plus lieu d’être en ce XXIe siècle, qui plus est, dans un pays qui se veut démocratique.
Par Hyacinthe Sanou
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