(Afriscoop 25/08/2010)
(AfriSCOOP Abidjan) — On n’est pas loin d’un remake sanglant, sur les bords de la lagune Ebrié. Pour cause, le contentieux judiciaire s’y déroule sous haute tension, et haute sécurité, depuis une semaine. L’étincelle que redoutent les Ivoiriens, qui comptent les jours pour aller à l’élection présidentielle, fixée au dimanche 31 octobre 2010, a surgi, lundi, à l’Est du pays. Une audience en radiation de présumés fraudeurs sur la nationalité a dégénéré en bataille rangée. Bilan léger (trois blessés dont un gendarme et des dégâts matériels) mais prémonitoire d’affrontements. Comme en février dernier. Le pire est à craindre !
La paix est entre les mains des hommes en toge, les magistrats. Ce sont eux qui ont la lourde charge de trancher les accusations (30.293, selon la Commission électorale indépendante –CEI) de fraudes sur la nationalité. Ils sont maîtres du contentieux judiciaire, en effet, après que des annexes de la CEI aient géré le contentieux administratif, qui a vu des pétitionnaires vérifier leur présence sur la liste électorale provisoire de 5 700.000 enrôlés et d’autres se plaindre à l’institution de ce que des « étrangers » ont usurpé la nationalité ivoirienne.
Après avoir saisi la CEI, celle-ci s’il a jugé des plaintes recevables les a transmises à des tribunaux de première instance. C’est le mode opératoire.
Seulement que les cours sont surchauffées dans certaines circonscriptions. A l’idée que soit les plaignants et les accusés sont absents. Soit les plaignants sont là et les accusés non. Soit s’ils sont présents personne ne détient des preuves de la véracité de l’accusation. Soit, ils sont présents, avec les accusés et que ces derniers sont reconnus coupables. Ou, enfin, que pour insuffisance de preuves, les « fraudeurs » sont rétablis dans leur droit. Il arrive même que les audiences soient suspendues, a constaté AfriSCOOP.
Ce sont deux derniers cas ont mis le feu aux poudre dans le royaume d’Abengourou (Est). Un juge a ordonné, sur des témoignages, la radiation de deux individus soupçonnés d’être, respectivement, Ghanéen et Burkinabé, apprend-t-on.
Mal en prit au magistrat. Il n’a pas subi le courroux des partisans des déchus, mais leurs proches ont tenu meeting devant le tribunal. Et manque de pot, la manifestation à relent politique a viré à l’affrontement entre ceux qui ont accusé et les partisans de ceux qui ont été radiés.
« … la justice ne doit radier personne avec des témoignages qui ne tiennent pas. Les dénonciateurs doivent nous dire pourquoi ils mentent tant. Personne ne peut accepter d’être déchu de sa nationalité… », c’est là les propos de l’instigateur du meeting, qui s’est soldé par une bagarre généralisée. Un gendarme a failli y laisser la peau quand la motocyclette d’une autorité politique proche du pouvoir a été saccagée et incendiée.
Des autorités politiques craignent le pire.
« Aujourd’hui, il est acquis que certaines personnes ont été conduites devant le juge et ont été blanchies alors que la loi prévoit que toute fausse accusation doit être condamnée. si la loi n’est pas appliquée, nous ne sommes pas loin d’un nouveau clash », a prévenu, lundi, Alain Lobognon, Conseiller du Premier ministre, et membre des Forces Nouvelles sur les ondes de la radio onusienne à Abidjan.
Le camp présidentiel, lui, persiste et signe qu’il faut « désinfecter » la liste électorale.
« Nous n’avons pas peur du RDR (Rassemblement des républicains, d’Alassane Ouattara) et ces méthodes de diabolisation n’ébranleront jamais la majorité présidentielle et ses militants… », propos du maire de la commune de Yopougon, fief du camp présidentiel, à Abidjan.
Le discours guerrier ressurgissant, l’épisode du premier trimestre de l’année en cours est fortement redouté. En février, des tribunaux ont été saccagés par des militants de l’opposition, qui ont manifesté partout dans le pays contre des « fausses accusations » en radiation. En mars, des marches éclatées ont fait des mort (sept) à l’ouest du pays, pour la même cause.
En attendant la fin du contentieux judiciaire, le 26 août 2010, les doigts restes croisés.
par Seraphin KOUASSI
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