vendredi 27 août 2010

COTE D’IVOIRE-SENEGAL: l’huile de la discorde

(Le Pays 27/08/2010)
Au sein de l’espace UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine), il n’y a pas que la libre circulation des biens et des personnes qui a du mal à être traduite concrètement. La suppression des barrières douanières, censée permettre la circulation des marchandises à l’intérieur de cet espace communautaire, a du plomb dans l’aile. Si fait qu’il n’est pas toujours facile à un pays donné d’aller vendre un quelconque produit sur le marché d’un autre pays ressortissant de l’espace UEMOA.
La preuve : cette guerre commerciale entre le Sénégal et la Côte d’Ivoire à propos de l’huile de palme que le second pays exporte dans le premier. Le Sénégal n’a pas lâché prise malgré la décision de la Commission de l’UEMOA du 4 juin dernier l’invitant « à retirer la norme NS 03-072 fixant à 30% la teneur maximale en acides gras saturés de l’huile de palme raffinée ». Le pays de la Téranga vient d’introduire une requête auprès de la Cour de justice de l’UEMOA aux fins d’annuler la décision de la Commission. Le Sénégal met en avant une raison sanitaire pour s’élever contre la décision en question, en invoquant des risques sanitaires pour ceux qui consommeront l’huile de palme importée qui ne répondrait donc pas à la norme fixée.
En attendant que la Cour de justice tranche, il faut avant tout louer le recours aux institutions communautaires pour régler ce genre de litige. Cela prouve, d’une certaine façon, l’importance qui leur est accordée. Mais dans le même temps, cette guerre commerciale pose le problème du respect des règles communautaires. Lesdites règles ont été édictées pour éviter l’anarchie. Les Etats membres ont l’obligation de respecter scrupuleusement les règles communautaires. Mais, au regard des intérêts et des enjeux économiques en jeu, la tentation est souvent grande, de se cabrer.
D’où parfois les longues procédures et batailles judiciaires concernant la commercialisation de certains produits venant de pays membres d’un même espace communautaire. Le tout est habilement enrobé dans des arguments du genre "défense des intérêts des consommateurs". Cela, pour ne pas laisser transparaître une certaine réalité, en l’occurence une volonté farouche de contrôler le marché sur fond de protectionnisme inavoué.
On a plutôt envie de dire que la menace vient beaucoup plus d’Asie. Bien sûr, on parlera de fraude et de contrebande. Toujours est-il qu’apparaît clairement l’impuissance, la démission ou la complicité des Etats.
Et on se demande où est passée la hargne que certains d’entre eux mettent à protéger leur marché contre les produits communautaires dont les effets nocifs ne sont pas tout le temps réels. Les industries de certains pays sont sérieusement menacées par des produits venant d’Asie. Le respect des normes dont il est question doit aussi (et surtout) concerner ces produits qui menacent la santé des consommateurs et les industries nationales.

Séni DABO
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