Le Monde 25/08/2010)
Une centrale nucléaire d'ici à 2020 : l'objectif a été affiché dimanche 22 août par le directeur général du commissariat soudanais à l'énergie atomique. Cité par l'agence de presse officielle Suna, Mohamed Ahmed Hassan al Taeb a affirmé que les autorités soudanaises avaient déjà commencé à planifier le projet "en coopération avec l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA)".
L'annonce a de quoi susciter des interrogations : les facteurs d'instabilité sont encore nombreux dans le plus grand pays d'Afrique, déchiré jusqu'en 2005 par une guerre civile qui a fait deux millions de morts et plus de quatre millions de déplacés, et dont le président, Omar al-Bachir, est toujours sous le coup d'un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre et contre l'humanité.
EFFETS D'ANNONCE DU RÉGIME ?
Du côté du bureau de presse de l'AIEA, on se montre prudent. Pour l'instant, le projet le plus avancé concerne un réacteur de recherche prévu pour 2010 – également mentionné par les autorités soudanaises. Le Soudan a reçu une équipe de l'AIEA à ce sujet lundi 23 août. Il existe bel et bien un programme destiné à "aider le Soudan à déterminer son meilleur mix énergétique à horizon 2030, incluant le potentiel de l'énergie nucléaire pour l'électricité". Mais la date de 2020 laisse l'agence sceptique. "Il y a beaucoup de choses à mettre en place avant de construire une centrale nucléaire. Il faut disposer de ressources financières considérables, d'une main-d'œuvre hautement qualifiée comprenant notamment des ingénieurs spécialistes du nucléaire, d'un cadre réglementaire..."
Autant d'étapes qu'est loin d'avoir franchi le Soudan. A titre d'exemple, "en Afrique, seule l'Afrique du Sud a des centrales nucléaires", rappelle l'AIEA. D'autres pays, comme l'Egypte, la Libye et le Maroc, possèdent des réacteurs de recherche. Egalement du nombre, l'Algérie a manifesté sa volonté d'aller plus loin et a signé plusieurs accord de coopération technique dans le nucléaire, le plus récent ayant été conclu fin mai avec l'Afrique du Sud.
Mais l'AIEA souligne qu'approuver ou non le programme nucléaire civil d'un pays ne fait pas partie de ses prérogatives. "Si un pays est intéressé, nous nous proposons de l'accompagner pour établir les différentes étapes à franchir", précise l'agence. La première de ces étapes, à laquelle font probablement référence les autorités soudanaises lorsqu'elles évoquent une coopération avec l'AIEA, est une revue des besoins énergétiques du pays et de ses moyens de production actuels.
L'agence internationale a établi (PDF) 19 points-clés dans le développement d'une infrastructure de production électrique d'origine nucléaire : en suivant ce protocole, il faut compter au minimum 10 à 15 ans entre le moment ou l'option nucléaire est envisagée dans la politique énergétique et la mise en service d'un premier réacteur.
Marion Solletty
LEMONDE.FR
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