lundi 13 décembre 2010

Sénégal, Tchad - Wade, Habré et la colère des ONGs

(BBC Afrique 13/12/2010)
Des organisations de défense des droits de l'homme, dont Amnesty International, se sont offusquées des déclarations du président Sénégalais qui a annoncé vouloir se débarrasser de l'ancien président Tchadien Hissène Habré.
"Que la Cour de la CEDEAO ait décidé que Habré ne peut pas être jugé dans le cadre des juridictions ordinaires du Sénégal ne change pas fondamentalement la donne"
Seyidi Gassama, directeur exécutif de la branche sénégalaise d'Amnestie internationale
Dans une interview accordée à nos confrères de Radio France Internationale et France 24, Abdoulaye Wade s'est plaint de n'avoir pas le soutien qu'il faut pour juger monsieur Habré, accusé de crimes contre l'Humanité.
Réagissant sur la BBC aux déclarations de Wade, le directeur exécutif de la branche d’Amnesty international au Sénégal, Seydi Gassama, fustige une "pirouette", dont la conséquence pourrait être que Habré ne soit jamais jugé.
"Surprenante et regrettable"Pour le défenseur des droits humains, il s’agit "d’une décision à la fois surprenante et regrettable de la part du président Wade".
Le responsable d'Amnesty international fait observer que la décision du chef de l’Etat sénégalais est d'autant plus incompréhensible que l'obstacle financier qui faisait traîner la procédure est maintenant levé.
"Les bailleurs de fonds, dit-il, viennent de se réunir, ont approuvé le budget que le Sénégal avait soumis, et ont promis de mettre les fonds immédiatement à la disposition du Sénégal."
Des bailleurs de fonds internationaux s'étaient effectivement réunis en novembre, et avaient pris l'engagement de financer l'organisation du procès à hauteur de 8,5 millions d'euros.
Ce montant représente un peu plus du tiers du budget que le Sénégal jugeait nécessaire pour la tenue du procès.
Tribunal spécialIl est clair que ce n'est pas seulement pour des raisons financières que Dakar souhaite se débarrasser du dossier Habré.
Toujours en novembre, une haute juridiction de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a préconisé la création d'un tribunal spécial, arguant que le Sénégal seul ne pouvait pas juger Habré.
Mais cela n’empêche pas Seydi Gassama de se dire convaincu qu'un renvoi du dossier Habré par le Sénégal n'a aucun fondement solide.
"Que la Cour de la CEDEAO ait décidé que Habré ne peut pas être jugé dans le cadre des juridictions ordinaires du Sénégal ne change pas fondamentalement la donne", soutient-il.
"Il revient à l'Union Africaine de créer ce tribunal qui pourrait siéger au Sénégal, pays où Habré réside depuis 1989 (ndlr: 1990), et juger Habré sur la base d'un budget qui ne varierait pas sensiblement".
N’en déplaise à Amnesty International, les déclarations de Wade ne laissent pas d'équivoque sur ses intentions.
"Je vous le dis très clairement, je veux m'en débarrasser", a menacé le président Sénégalais au micro de nos confrères français.

© Copyright BBC Afrique

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire