vendredi 24 décembre 2010

RDC: les humanitaires anticipent les massacres de Noël

L'ONU craint un regain de violence de la part des rebelles de la LRA dans le nord de la République Démocratique du Congo. Marcelo Garcia de l'ONG Intersos explique la situation.
Le spectre des Noëls passés plane sur les populations du nord de la République Démocratique du Congo (RDC). L'ONU, tout comme de nombreuses organisations, craint un regain de violence de la part des rebelles nommés l’Armée de Résistance du Seigneur (dont le sigle en anglais est LRA), après les attaques de décembre 2008 et 2009.
Un rapport a été cosigné par 19 ONGs pour alerter sur la situation dans cette région du monde. Depuis 2008, plus de 400.000 personnes ont été déplacées.
Marcelo Garcia, directeur régional de l’ONG italienne Intersos qui a signé ce rapport, fait un point sur la situation et explique comment s’organise le travail des humanitaires sur place.
Youphil: En cette veille de Noël 2010, quelle est la situation en République Démocratique du Congo?
Marcelo Garcia: Rien qu’en novembre et début décembre, plus de 10 attaques ont été recensées (pdf). La zone la plus touchée est celle du Haut-Uélé, situé dans le triangle Dungu, Duru et Doruma (Nord-Est du pays) mais aussi le long de la frontière soudanaise, où vivent plus de 220.000 déplacés. En 2010, les meurtres et les viols perpétrés par la LRA, considérée comme la milice la plus dangereuse de RDC, se sont poursuivis à un rythme effroyable dans l’est du pays, tout comme les enlèvements. Il est clair que la protection des personnes déplacées qui ont échappé à la guérilla ougandaise est urgente.
Nous avons connu les années précédentes un regain de violence à cette période. Tout a commencé en décembre 2008. A la veille de Noël, et durant trois semaines, plus de 865 personnes ont été tuées par la LRA dans le nord-est de la RDC et au Sud-Soudan. Cette attaque a été menée en représailles à l'opération "Eclair de Tonnerre", une offensive militaire contre les rebelles conduite par les armées de l'Ouganda, la RDC et le Sud Soudan. (Entre le 14 et 17 décembre 2009, les commandants de la LRA ont supervisé l'assassinat de 300 personnes, ndlr)
Youphil: Comment vous préparez-vous à ces attaques?
Marcelo Garcia: A l’arrivée dans le pays, le personnel reçoit, pendant les deux premiers mois, une formation qui vise à garantir sa sécurité. Tous les déplacements en voiture sont contrôlés. Et ceux sur le terrain sont encadrés. Mais en RDC, tout comme au Sud Soudan, nous ne nous sentons pas directement menacés. Les humanitaires sont rarement la cible des attaques de la LRA, à quelques exceptions près début 2010.
Nous sommes une ONG urgentiste forte d'expériences en Somalie, au Darfour, en Afghanistan ou encore en Irak, où l'insécurité est importante. Pour la protection du personnel, comme des populations, l'information est indispensable. Avant la mise en place de nos programmes, nous évaluons les menaces d'attaques armées, de troubles civils et de banditisme. Nous surveillons l'évolution de toutes ces menaces des deux côtés de la frontière (Sud-Soudan et RDC,ndlr). Les rumeurs d’attaques ne doivent pas être négligées. Nous communiquons également beaucoup avec les autres organisations sur place, comme le Haut Commissariat pour les Réfugiés (HCR), pour connaître l'évolution de la situation.
Youphil: Quel est votre rôle auprès des populations après les attaques?
Marcelo Garcia: Les femmes violées suivent un programme de soutien psychologique, tout comme les enfants enrôlés qui ont réussi à s’échapper. Les blessés sont dirigés vers les centres de santé de MSF ou de la Croix Rouge Internationale. Sans compter l’apport de biens de première nécessité, comme des denrées alimentaires. Pour ceux qui ont tout perdu, nous fournissons du matériel de construction pour qu’ils puissent se reconstruire un logement d’urgence.
Accéder aux zones d’intervention (territoires de Dungu, Duru, Niangara et Ango) et assurer la protection des déplacés sont les principales difficultés. Ces territoires sont enclavés et mal desservis. Très peu de travailleurs humanitaires sont présents sur place. Les données existantes sur la circulation des déplacés sont incomplètes, voire périmées.

© Copyright youphil.com

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire