lundi 6 décembre 2010

Guinée - Alpha Condé au pied du château d’eau

(L'Observateur Paalga 06/12/2010)
Depuis ce 2 décembre 2010, Alpha Condé a désormais la légitimité et la légalité pour occuper le palais présidentiel de Sékoutouraya : avec ses 52,52% de suffrages proclamés par la CENI et confirmés par les grands juges, le leader du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG) est sorti victorieux de cette longue présidentielle (pas moins de 5 mois entre les 2 tours).
L’opposant historique de Guinée a rattrapé son retard du premier tour (26 points), une chevauchée fantastique à mettre à l’actif de l’entregent du vainqueur, qui a su nouer les alliances utiles : l’alliance arc-en-ciel comptait 116 formations politiques, 16 candidats, 570 mouvements ; qui dit mieux ?
Désormais qu’il a conquis la chose après 40 années de combat politique, il doit déployer, sur le terrain, son programme, qui a séduit ses compatriotes. Et là-dessus, comme nous l’écrivions au lendemain de son élection, son mandat signifie “boire l’eau de la corniche conakrykaise”. Un petit inventaire des chantiers titanesques qui attendent le nouvel élu donne le tournis :
évidemment, l’apaisement des cœurs de ce peuple martyr sera le premier grand défi du professeur Alpha ; depuis les années de braise de Sékou Touré jusqu’à la période Dadis, en passant pas l’époque Conté, les Guinéens ont payé un lourd tribut à leur attachement à l’Etat de droit, qui s’est d’ailleurs toujours éloigné jusqu’au 7 novembre 2010. Un objectif premier pour l’élu, d’autant plus qu’au regard du verdict des urnes, pratiquement 1 Guinéen sur 2 ne se reconnaît pas en lui ;
mettre l’Etat sur les rails, car, pour peu, on dirait que la Guinée est un non-Etat, car de nombreux attributs qui font qu’un Etat est considéré comme tel manquent à ce pays ; ce sera une autre tâche primordiale pour Alpha ;
une réforme, de fond en comble, de l’armée est une condition nécessaire pour mettre la Guinée à l’abri des putschs à répétition ;
la justice, charpente osseuse de toute démocratie, devra être requinquée pour combler le hiatus entre elle et les justiciables ;
la gestion des ressources minières ; il n’y a pas que la RD Congo qui est un scandale géologique, la Guinée l’est tout aussi, à cette seule différence près que, la RD Congo, c’est le macrocosme, et la Guinée, le microcosme. Et si de nombreux partenaires étrangers sont au chevet de la Guinée depuis des lustres, c’est pour les ressources de son sous-sol. Il va falloir que le nouveau président sache, au-delà des appétits des uns et des autres, privilégier l’intérêt des Guinéens ;
Alpha Condé devra aussi faire sienne cette maxime des économistes qui dit que le développement d’un pays suit celui de son schéma directeur électrique. Apporter la lumière aux Guinéens est un impératif économique. Sidya Touré, bien que seulement Premier ministre (1996-1999), avait réussi ce tour de force, si fait que le surnom “Sidya Courant” lui colle à la peau. Et si le nouveau chef de l’Etat parvenait à ressusciter le projet de barrage de Garafiré, il pourrait résoudre ce déficit criard d’électricité qui plombe le décollage du pays ;
enfin, le développement doit être atteint. Ça tombe bien, l’essor de l’agriculture est au centre du programme d’Alpha. Il l’a répété, comme une antienne au cours de sa campagne, il veut que la Guinée nourrisse et les Guinéens, et l’Afrique de l’Ouest, en exportant ses excédants céréaliers. C’est dans l’univers du possible, puisque ce pays est le château d’eau de la sous-région.
Alpha est au pied du château d’eau de l’Afrique de l’Ouest, et les populations attendent de le voir à l’œuvre. Finalement, comme nous l’avons déjà mentionné, Alpha Condé est plus à plaindre qu’à envier, même si on aimerait être à sa place pour se faire plaindre.

Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana
© Copyright L'Observateur Paalga

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