(Les Echos 23/12/2010)
Il ne reste « qu'une solution, celle de la force », lançait hier le Premier ministre du gouvernement d'Alassane Ouattara, Guillaume Soro, dans un entretien à la chaîne iTélé.
La Côte d'Ivoire est dans l'impasse depuis le deuxième tour de l'élection présidentielle et l'affrontement des deux présidents proclamés, le sortant Laurent Gbagbo et son rival Alassane Ouattara. Les Etats-Unis ont entrepris hier des discussions avec la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) sur une éventuelle augmentation des troupes de l'ONU en Côte d'Ivoire. « Je suis le président de la République », avait déclaré avant-hier soir Laurent Gbagbo dans un discours, tout en se disant prêt à une forme de médiation. Réaction du camp Ouattara : Gbagbo tente de « ruser avec le monde » et de le « défier ». L'invitation de Laurent Gbagbo à Alassane Ouattara et à Guillaume Soro de « regagner leurs domiciles » n'a pas non plus convaincu.
Hier, les barrages autour de l'hôtel du Golf, où ils sont sous la protection des ex-rebelles des Forces nouvelles - qui tiennent le nord du pays depuis 2002 -et les Casques bleus de l'ONU, n'étaient pas levés. « Cette entrave au ravitaillement de la mission et de l'hôtel du Golf va placer nos Casques bleus dans une situation critique dans les jours à venir », a d'ailleurs dit le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon.
Dans un autre quartier d'Abidjan, à Port-Bouet, plus d'une centaine de femmes ont manifesté hier contre les « fouilles » et « les enlèvements nocturnes » commis selon elles par des hommes armés acquis à Laurent Gbagbo. L'ONU a dénoncé dimanche des « violations massives des droits de l'homme » dans le pays. « Nous sommes face à une folie meurtrière et il n'est pas exclu que ce régime qui se sent aux abois (…) devienne de plus en plus violent et suive la voie suicidaire », déclarait hier Guillaume Soro.
« Mesure de précaution »
A l'étranger, la main tendue de Laurent Gbagbo a laissé sceptiques les gouvernements allemand, français, nigérian, portugais ou suédois, qui viennent de demander à leurs ressortissants de quitter la Côte d'Ivoire. A l'issue d'une réunion à l'Elysée autour du chef de l'Etat, Nicolas Sarkozy, le gouvernement a recommandé à « tous les Français qui le peuvent de quitter provisoirement la Côte d'Ivoire », invoquant une « mesure de précaution » et de « prudence », même si les ressortissants étrangers ne sont selon lui « pas menacés jusqu'à présent ». Le nombre de Français en Côte d'Ivoire est estimé à 14.000.
Pendant ce temps, la communauté internationale tente d'asphyxier économiquement le camp du président sortant. Les financements de la Banque mondiale ont été gelés, a annoncé hier son président, Robert Zoellick, à l'issue d'un entretien avec Nicolas Sarkozy. La Banque mondiale dit avoir suspendu tout versement aux dix projets de l'Association internationale du développement en cours dans le pays, arrêté ses autres activités et fermé son bureau d'Abidjan. L'Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) a, elle aussi, selon Robert Zoellick, gelé ses prêts à la Côte d'Ivoire. Tandis que la Cédéao, qui se réunit demain en sommet exceptionnel à Abuja, pourrait annoncer d'autres initiatives.
De son côté, l'Union européenne vient d'entériner formellement les sanctions prononcées avant-hier contre Laurent Gbagbo et ses proches. Des sanctions ciblées qui ne touchent ni le chef d'état-major de l'armée ni le patron de la gendarmerie et qui pourraient, espère-t-on à Bruxelles, influer « sur des éléments dans l'armée en faisant vaciller le pouvoir ». La chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, a déclaré hier soir que Laurent Gbagbo devait quitter le pouvoir « sans délais et sans autres préalables ».
© Copyright Les Echos
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire