dimanche 22 août 2010

Sénégal - Wade prépare un "coup d'Etat constitutionnel" pour briguer un 3ème mandat

(Leader Africa 21/08/2010)
Les critiques contre la candidature du président Abdoulaye Wade à l'élection présidentielle de 2012 s'amplifient au Sénégal, l'opposition et des juristes dénonçant un troisième mandat synonyme de "violation" de la Constitution alors que le parti au pouvoir le juge légal.
Pourtant la Constitution sénégalaise en son article 27 est très claire: "La durée du mandat du Président de la République est de cinq ans. Le mandat est renouvelable une seule fois.
Cette disposition ne peut être révisée que par une loi référendaire ou constitutionnelle."
Le président Wade, 84 ans, élu en 2000 pour sept ans, réélu en 2007 pour un deuxième mandat de cinq ans après modification constitutionnelle pour passer au quinquennat, a annoncé en septembre 2009 sa candidature à la présidentielle de 2012 pour un troisième mandat.
La Constitution du Sénégal, adoptée en 2001, limite le nombre de mandats présidentiels à deux, mais le président Wade a été élu pour la première fois en 2000 avec une loi fondamentale datant de 1993 qui limitait les mandats.
Pour l'opposition, Abdoulaye Wade va boucler en 2012 ses deux mandats légaux: 2000-2007 et 2007-2012.
Pour le Parti démocratique sénégalais (PDDS, au pouvoir) le décompte doit se faire à partir de 2007, date d'entrée en vigueur du quinquennat, non 2000.
"Wade ne peut se présenter pour un troisième mandat s'il ne fait pas de coup d'Etat constitutionnel", affirme Ibrahima Sène, un responsable d'un parti membre de la coalition de l'opposition.
"Il ne peut pas se présenter pour un troisième mandat sauf à violer la Constitution", renchérit Pape Demba Sy, professeur de droit constitutionnel à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar.
"L'esprit de la Constitution de 2001 est d'éviter des présidents qui font vingt ans au pouvoir comme Léopold Sédar Senghor (1960-1980) et Abdou Diouf (1981-2000) et d'avoir dix ans au maximum. Mais comme Wade a été élu en 2000 (avec la Constitution de 1963), il fallait assurer une période transitoire en acceptant exceptionnellement qu'il fasse éventuellement douze ans", ajoute M. Sy, un rédacteur de la Constitution de 2001.
Pour le Premier ministre sénégalais Souleymane Ndéné Ndiaye, membre du PDS, "la Constitution permet à Wade de se représenter en 2012". "Ceux qui disent que le président de la République ne doit pas se présenter ne font pas du droit". Aucun argument jurridique n'accompagne cette déclaration, qui s'apparente à un excès de zèle.
Début août, un mouvement politique dénommé "Terminus 2012" a été lancé à Dakar pour s'opposer à un troisième mandat du président Wade. "Aucun texte ou aucune disposition" ne lui permet "de faire exception" à la règle des deux mandats, dit son initiateur, Amadou Guèye.
Les candidats à la présidentielle de 2012 peuvent déposer un recours devant le Conseil constitutionnel pour invalider la candidature de Wade.
Mais pour Ibrahima Sène, "Wade a verrouillé" le Conseil constitutionnel en nommant récemment à sa tête un nouveau président, Cheikh Tidiane Diakhaté, présenté comme favorable au chef de l'Etat sénégalais.
"Ce n'est pas ce Conseil qui va dire que Wade ne peut pas se présenter en 2012. Que les amis du Sénégal, qui veulent sauver ce pays, convainquent Wade de respecter la Constitution", dit M. Sène.
Enseignant en droit public à l'Université Cheikh Anta Diop, Ababacar Guèye pose un problème d'âge: "Le Conseil constitutionnel doit invalider la candidature du président Wade. On risque d'élire un président de la République qui aura presque 90 ans, avec des risques de crise politique au Sénégal".
"Un faux débat", rétorque le porte-parole du président Wade, Serigne Mbacké Ndiaye. "Le président Wade est en excellente santé. Il n'y a rien à dire sur ses capacités intellectuelles".

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