mercredi 4 août 2010

Kenya - Un référendum crucial

(Radio Canada 04/08/2010)
Les Kenyans s'alignent mercredi devant les bureaux de vote pour se prononcer sur l'adoption d'une nouvelle constitution issue d'un pacte entre adversaires politiques pour ramener la paix au pays.
Après l'élection présidentielle de 2007, le Kenya avait frôlé l'anarchie lors d'affrontements ethniques. Une autre crise politique avait par ailleurs suivi la réélection du président Mwai Kibaki en 2008, et les violences avaient fait plus de 1500 morts.
Le chef de l'opposition et premier ministre actuel, Raila Odinga, et le président Kibaki s'étaient entendus sur un accord de partage du pouvoir pour mettre un terme aux violences postélectorales. Le projet de constitution soumis au référendum mercredi représente un élément-clé de cet accord.
Selon les derniers sondages, la constitution souhaitée par le gouvernement devrait être adoptée.
Je n'ai aucun doute que le oui va l'emporter de manière retentissante.
— Raila Odinga, premier ministre du Kenya
Le Kenya est la première économie d'Afrique de l'Est. Ancienne colonie de la Grande-Bretagne, il a obtenu son indépendance en 1963.
Le projet de nouvelle constitution propose une décentralisation des pouvoirs et davantage de libertés civiles. Si elle est adoptée, la nouvelle constitution sabrerait les pouvoirs présidentiels en instituant un nouveau système politique de pouvoirs et de contre-pouvoirs, un peu selon la formule américaine du « checks and balance ».
Nous sommes en train de faire l'Histoire. Plusieurs d'entre nous n'étaient pas là lorsque nous avons reçu la première constitution après l'indépendance et elle ne nous convient pas.
— Sam Ochieng, un entrepreneur kenyan de 35 ans qui a voté à Kibera
Les Kenyans optimistes
« Depuis que nous avons eu l'indépendance de la Grande-Bretagne, les choses ne se sont pas déroulées paisiblement au pays. La présente constitution n'a pas été bien utilisée, mais ce n'est pas nous qui l'avions écrite, et nous écrivons celle-ci » s'est réjoui Paul Wahome, un étudiant de 23 ans qui a attendu six heures en ligne pour voter.
« C'est une bataille entre les nantis et les non-nantis dans ce pays. Et les nantis veulent maintenir le statu quo » explique James Otumba, un enseignant de 43 ans qui a reçu une balle dans la poitrine lors des violences de l'année dernière.
Il s'agit d'une révolution dans ce pays et je ne veux pas en être exclu. Cette constitution est exactement ce qui peut réconcilier la nation.
— James Otumba, enseignant kenyan
Pour être adopté, le texte doit obtenir une majorité absolue des voix à l'échelle nationale, et au moins 25% des suffrages dans cinq des huit provinces du pays. Le décompte des votes sera diffusé en direct au Kenya à la radio et à la télévision.
Le référendum de 2005
Un projet de constitution avait été rejeté au Kenya en 2005 par 57 % de la population. Ses opposants l'avaient critiqué parce qu'elle ne circonscrivait pas suffisamment selon eux les pouvoirs du président.
Transparence et sécurité
Les principaux opposants politiques et religieux à la constitution ont dit craindre que le gouvernement truque les élections de mercredi et ont fait part de leur appréhension à la commission électorale. Le directeur de la commission croit toutefois que le vote sera plus transparent que celui de la dernière élection nationale, alors que les allégations de tricheries avaient conduit aux affrontements sanglants.
La présence de la police a été renforcée pour les élections, et tout particulièrement dans la vallée du Ritt, où les violences étaient le plus concentrées en 2007 et 2008. Mercredi, les policiers sont plus de 63 000 à assurer la sécurité du référendum à travers le pays.
Le projet de nouvelle constitution a toutefois déjà fait couler du sang. En juin dernier, un rassemblement d'opposants au projet à Nairobi s'est soldé par la mort de trois personnes après une double explosion qui a aussi fait 79 blessés.
Les dirigeants de chacune des campagnes du oui et du non ont demandé à leurs partisans de demeurer pacifiques, quelle que soit l'issue du vote de mercredi.

Radio-Canada.ca avec
Associated Press et Reuters
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