(Le Potentiel 30/10/2010)
La délimitation de la frontière maritime entre la RDC et l’Angola serait-elle sacrifiée sur l’autel des considérations diplomatiques ? En tout cas, la question se pose au regard du silence suspect qui a succédé aux discussions, aussi virulentes que passionnées, ayant eu lieu au sein des parlements congolais, en 2009, et angolais, en mars 2010.
Le gouvernement de la RDC a-t-il formellement déposé sa demande pour l’extension de son plateau continental auprès de l’Organisation des Nations unies ?
Le pays peut-il désormais jouir de la Convention des Nations Unies sur les droits de la mer de 1982, dite Convention de Montego Bay, qui lui donne le droit d’étendre ses frontières maritimes de 40 à 200 km dans l’océan Atlantique et capter, en conséquence, l’abondante manne pétrolière dont jouit l’Angola voisine ?
Luanda, qui n’est pas prête à se laisser enlever le bifteck de la bouche, a-t-elle proposé une alternative crédible à Kinshasa pour mettre fin au litige naissant, en vue d’éviter d’en faire un jour l’objet d’un conflit meurtrier entre les deux pays ?
Beaucoup d’interrogations se bousculent dans la tête des citoyens. Il ne se trouve personne hélas ! pour les aiguiller dans un sens ou dans un autre. Ainsi apparaissent sous les projecteurs les lacunes de la communication du gouvernement de la RDC.
Il n’empêche que, ne pouvant contrôler le flux informationnel sur la Toile, le gouvernement se laisse prendre à son propre jeu. Démonstration : une dépêche d’African Mining Intelligence jette un pavé dans la mare.
NE PAS FACHER L’ANGOLA ?
Dans sa dernière édition en ligne, il dévoile que « le Congo-Kinshasa n’a toujours pas déposé de demande définitive pour l’extension de son plateau continental auprès des Nations unies ». Motif plausible, selon la revue : le gouvernement se montre « soucieux de ne pas fâcher l’Angola ».
« Ne pas fâcher l’Angola » ! Parlons-en. Jusqu’où s’étendent les limites des eaux territoriales de la RDC ? Avant l’adoption au Parlement, en 2009, de la loi sur la délimitation des frontières terrestres et maritimes de la RDC, Kinshasa se conformait à la Convention de Genève de 1958 tombée en désuétude. Et limitait l’étendue de sa frontière maritime.
Grâce à la Convention de Montego Bay, la nouvelle loi internationale donne droit à tout Etat ayant une zone côtière l’accès à 200 km au large des eaux faisant partie de sa zone territoriale. Au-delà de cette limite, ce sont les eaux internationales.
Ainsi, en vertu de cette convention, la RDC se retrouve dans le droit d’ouvrir une zone ou un corridor d’au moins 20 km de large entre l’enclave de Cabinda et l’Angola et 200 km de long. Soit une zone de 4.000 km², dans laquelle toute production découlant des découvertes de pétrole, présentes et futures, est partagée entre la RDC et ses contractants.
Ça, c’est sur le papier. Car, en réalité, c’est l’Angola qui a eu, longtemps, la présence d’esprit d’exploiter cette zone. Plus ou moins 500 000 barils/jour. Au point de devenir l’un des majeurs producteurs de l’or noir en Afrique. Ce qui justifie son visa d’admission au sein de l’OPEP, organisation des pays producteurs de pétrole.
DEVOIR DE TRANSPARENCE
Des informations diffusées l’année dernière ont réveillé le Parlement de la RDC. Ainsi que le gouvernement de la République. La problématique de la délimitation de la frontière maritime a tenu l’opinion en haleine pendant des semaines.
C’est ainsi que l’on en est arrivé à constituer des commissions, auxquelles ont été confiées des missions précises. Dont celle, notamment, de déposer la requête congolaise aux Nations unies aux fins de la délimitation de la frontière maritime angolo-congolaise.
La réaction de Luanda n’a pas tardé. Le 24 mars 2010, l’Assemblée nationale de l’Angola a approuvé à l’unanimité la résolution autorisant le gouvernement angolais à négocier avec celui de la RDC l’établissement d’un accord de délimitation des frontières maritimes nord.
Toutefois, l’Assemblée nationale angolaise recommande que « les bases de négociation doivent respecter strictement les accords signés entre le Portugal et la Belgique » au début de la colonisation. Ces accords détermineront alors les points de départ pour la délimitation des frontières maritimes.
La situation est on ne peut plus confuse. Kinshasa et Luanda se sont-elles payé la tête de leurs parlements respectifs pour négocier en cachette ? Une chose est, cependant, sûre : elles n’ont pas été à la Cour internationale de La Haye. On ne les a pas non plus remarquées à New York. Mais alors, quand et où ont-elles convenu de mettre fin à ce qui n’est encore qu’un litige ?
Leur silence de carpe équivaudrait-il à un compromis ? A un arrangement à l’amiable ? Dans l’affirmative, ce qui est hautement souhaitable, qu’ils veuillent dire un mot aux peuples. Par devoir de transparence. Affaire à suivre.
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