(Le Potentiel 26/10/2010)
Dans le cadre de la lutte contre les effets pervers des changements climatiques, un montant estimé à 5 milliards USD circule au monde sous forme de crédit carbone. Quelle est la part de la RDC dans cette enveloppe?
Face aux opportunités des financements innovants qu’offrent les forêts dans le cadre de la lutte contre les effets pervers des changements climatiques, la cellule de communication du ministère de l’Environnement, Conservation de la nature et Tourisme (MECNT) s’est entretenue avec Bruno Guay, conseiller technique du PNUD et expert à la Coordination nationale REDD de la RDC. Objectif : avoir des explications sur le fondement et la rationalité du concept de crédit carbone ainsi que les avantages à en tirer.
L’on se souviendra que c’est le Protocole de Kyoto (PK), premier instrument de mise en oeuvre établi en 1998 dans le cadre de la Convention des Nations unies sur les changements climatiques, qui fonde la rationalité du concept de crédit carbone ainsi que de son marché.
En effet, le PK engage les pays industrialisés signataires à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 5% en deçà de leur niveau de 1990. Cela pendant une période située entre 2008 à 2012, et prévoit la mise sur pied de « mécanisme de flexibilité » permettant aux pays ayant pris des engagements de réduction chiffrés, d’échanger des « droit d’émission ». Ce Protocole prévoit également la mise sur pied du «Mécanisme de développement propre » par lequel les pays industrialisés peuvent compenser une partie de leurs émissions en acquérant des crédits carbone, résultants des projets de développement durable situés dans des pays en voie de développement. Ainsi, la dernière décennie à vu se développer de par le monde les marchés du carbone.
La RDC n’étant pas en reste, les marchés du carbone y existant sont de deux ordres, à savoir celui créé par le MDP du PK et ceux volontaires qui se développent principalement autour du Standard Carbone Volontaire.
A noter que les crédits carbones sont des unités représentant une réduction de CO2 d’une tonne. Dès lors, un porteur de projet réduisant les émissions de CO2 comme le reboisement, la gestion intégrée des déchets pour la captation du méthane et/ou le développement des énergies renouvelables telle que l’hydroélectricité, peut se voir octroyé le droit de vendre des crédits carbone après vérification que son projet génère bien des réductions mesurées selon des méthodologies internationalement reconnues.
Pour permettre la participation de la RDC au MDP du PK, le MECNT, a mis en place une autorité nationale désignée chargée de définir les critères de base pour l’élaboration des projets de crédit carbone, leur approbation sur base de ces critères et la facilitation de leur mise en oeuvre à travers le pays.
La RDC compte jusqu’à ce jour un seul projet, celui de reboisement Ibi Bateke, exécuté non loin de Mbankana, dans la périphérie de la ville de Kinshasa. Le promoteur a conclu un accord de vente de crédit carbone avec le Fonds Bio carbone de la Banque mondiale ainsi qu’avec des investisseurs privés. Cependant, quelques projets intéressants sont encore dans le pipeline et concernent, entre autres, la décharge de déchets, la réhabilitation des centrales hydro-électriques, les foyers améliorés à Kinshasa et la culture du jatropha dans le Bandundu.
Les négociations internationales tendent vers un nouveau mécanisme visant à valoriser la gestion durable des forêts existantes. Dans cette optique, le mécanisme REDD+ et la dégradation des forêts vise à récompenser les pays qui, à travers les activités de conservation, la gestion durable des forêts et l’accroissement des stocks de carbone forestiers, arriveront à réduire leurs émissions de GES sous le niveau de référence préalablement négocié.
ENGAGEMENT PRIS PAR LA RDC
Depuis janvier 2009, la RDC est engagée dans un processus de préparation au futur mécanisme international REDD+, lequel est piloté par le MECNT en partenariat avec le PNUD (l’UN-REDD) et la BM (Programme FCPF).
Dans ce cadre, le Premier ministre a pris en novembre 2009, un décret créant des structures de gouvernance du processus REDD en RDC.
Alors qu’en mars 2010, la RDC est devenue le premier pays africain à obtenir l’approbation de son plan de préparation national à la REDD (R-PP) par le Conseil d’orientation de l’UN-REDD et le Comité des participants du FCPF. Désormais, la RDC dispose d’une feuille de route robuste, reconnue internationalement, et de financements conséquents pour l’exécution du programme.
La mise en oeuvre du mécanisme REDD+ ouvre donc la voie à la commercialisation de crédits carbone forestiers qui, du reste, est tributaire de projets réduisant la déforestation et/ou la dégradation forestière sur une zone délimitée géographiquement. A ce point, il faut préciser, que les mécanismes de finance carbone ne récompensent pas la « valeur d’existence » des forêts. C’est plutôt à travers des investissements concrets dans des activités qui réduisent la déforestation et/ou augmentent la séquestration (reboisement) que les porteurs de projets peuvent générer des « crédits carbones ».
Pour participer au futur mécanisme REDD+, le gouvernement devra remplir certains pré-requis techniques et institutionnels notamment, le développement d’un système de mesure, et vérification des émissions de GES liées à la déforestation et la dégradation des forêts (MRV), le développement et la négociation d’un niveau de référence, le développement d’une stratégie nationale REDD et d’un cadre de mise en oeuvre.
Cependant, il convient de rappeler que, de par leur nature gouvernementale, les marchés du carbone sont fortement régulés et seront soumis à un contrôle strict à travers un processus de vérification internationalement reconnu. L’établissement des règles transparentes et le respect de standards sociaux et environnementaux élevés est également pré-requis pour l’essor des projets REDD+ destinés aux marchés du carbone en RDC. C’est ce qui explique l’élaboration d’un dispositif transparent de négociation et de validation de contrats de partenariat au MECNT.
Pour promouvoir la transparence et les synergies dans l’exécution de la REDD+, un registre de tous les projets et initiatives REDD+ en RDC est aussi en élaboration. Il sera accessible en ligne à tous à partir de février 2011. En outre, ce registre deviendra un outil dynamique par lequel l’administration et le public congolais pourront faire le suivi, au jour le jour, des financements reçus et de leurs impacts.
En tout état de cause, les acteurs congolais, gagneront à multiplier des projets susceptibles de capturer les différents financements en circulation à travers le monde que l’on estime être à hauteur de 500 milliards USD. Il doit être bien compris que nos forêts sur pied ne sont pas éligibles au MDP du PK.
Par Albert tshiambi
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