lundi 1 mars 2010

Cote d`Ivoire - Gouvernement, choix des ministres, récusation : Bédié et Ouattara coincés ?

(Le Nouveau Réveil 01/03/2010)
Faut-il entrer ou maintenir le statu quo ? Faut-il céder au chantage et au jeu de récusation de Gbagbo ou au contraire demeurer dans la ligne de la fermeté ? Qui envoyer au gouvernement ? Qui abandonner ? Bédié, Ouattara et leurs alliés du Rhdp n`ont pas passé un week-end tranquille.
Le 13 février dernier, au lendemain de la dissolution du gouvernement et de la Commission électorale indépendante (Cei), le Rhdp avait adopté une position de fermeté historique. Les houphouétistes ont en effet, déclaré ne plus reconnaître M. Gbagbo Laurent comme chef de l`Etat et appelaient leurs militants à manifester contre la dictature naissante. Invité à rejoindre le gouvernement après quelques jours de chaudes tractations, le Rhdp déclinait l`offre, rappelant que sa priorité n`était pas de rentrer au gouvernement mais l`organisation des élections. Laquelle imposait la remise en place sans délai de la Cei dissoute. En fin de compte, la fermeté du Rhdp s`est avérée payante. La Cei a été non seulement rétablie dans son format de base mais la présidence de cette institution est toujours assurée par une personnalité de l`opposition. Pour le Rhdp, dès lors que la question essentielle était réglée, il restait à examiner celle relative à son entrée au gouvernement. Une question accessoire. Mais à ce niveau, d`autres difficultés surgissent. Gbagbo récuse des cadres de l`opposition. Un autre bras de fer s`engage. Les discussions traînent en longueur. Faut-il camper sur ses lignes de défense et exiger une main libre totale dans le choix de ses ministres ou céder aux caprices d`un chef de l`Etat en perte de vitesse et qui veut réduire l`influence de ses adversaires politiques dans certaines régions ?
Le choix des ministres
En réalité, dès l`instant où la question de la Cei a été réglée, il était politiquement risqué, selon certains avis, à Bédié et à Ouattara de refuser d`entrer au gouvernement parce que Gbagbo récusait des cadres de l`opposition.
L`objectif du chef de l`Etat-candidat était double en agissant ainsi : mettre en difficulté Bédié et Ouattara face à leurs militants et tenter de se repositionner dans certaines régions en jouant sur la recomposition politique.
Dès lors, la question centrale qui se posait à Bédié et à Ouattara était de savoir s`ils pouvaient accepter de perdre des plumes là où Gbagbo manœuvrait pour se repositionner tactiquement sur le terrain. Un couteau à double tranchant, car si les deux ténors de l`opposition maintenaient leur refus, ils s`exposaient au courroux de leurs propres cadres dont certains rêvent depuis toujours d`accéder au gouvernement. Il n`y a donc pas de raison à faire fixation sur un individu. L`opposition étant un réservoir inépuisable de cadres compétents. Faire un blocage parce qu`on récuse un cadre peut être mal vu et mal vécu au sein même des partis politiques. Mais pour d`autres en revanche, l`opposition n`a pas à se laisser dicter sa conduite par Gbagbo. Il faut l`affronter, sous toutes les coutures. Car il est inconcevable qu`il choisisse et place ses hommes là où il veut et dénie ce droit à ses opposants. Ce d`autant plus que le gouvernement de technocrates annoncé a fait place à un gouvernement de partis politiques. Presque tous les ministres nommés ou reconduits par Gbagbo sont des directeurs locaux de campagne. Mieux, certains ministres comme Tagro Désiré ont été des cas de discorde. Mais Gbagbo aurait plaidé auprès de Soro pour reconduire son ministre de l`Intérieur. En outre, parallélisme des formes oblige, le Rhdp aurait dû consulter ses instances après demain mercredi avant de prendre la décision de réintégrer le gouvernement.
En tout état de cause, les leaders du Rhdp qui étaient partagés sur la question d`entrée au gouvernement et des récusations ont fini par s`entendre. Ils ont décidé d`agir pour ne pas distraire davantage le processus électoral et donner des arguments à Gbagbo pour retarder encore les élections. Les choses ne furent pas faciles particulièrement pour Bédié et Ouattara ce week-end. Choisir et parfois recaler contre leur gré certains de leurs cadres. Qui choisir ? Qui abandonner ? Comment faire comprendre et accepter des décisions parfois sinon souvent difficiles à avaler ? Comment faire en sorte pour ne pas choquer ou frustrer celui qui s`en va ? Comment gérer les conséquences de ces décisions dans les régions ? Autant de questions qui montrent combien est délicat le rôle de Bédié et Ouattara face à leurs militants. Mais à trois mois des élections, doit-on vraiment faire une fixation sur pareils détails ?
Akwaba Saint Clair
Mouture finale du Gouvernement Soro / Rhdp : Ceux qui entrent
Bien plus par responsabilité devant l`histoire que par une quelconque compromission, les dirigeants du RHDP pourraient revoir d`ici ce soir leur position et envoyer enfin des ministres au Gouvernement Soro II. Selon les informations en notre possession, jusque dans la nuit d`hier, le RHDP a finalement opté pour l`assouplissement de sa position initiale, pour ne pas être complice des stratagèmes du camp présidentiel qui veut, à tout prix, retarder les élections. Ainsi, le PDCI-RDA, le RDR, le MFA, l`UDPCI et le PIT enverront dans les prochaines heures des militants les représenter au Gouvernement, qui dit-on, " doit conduire aux élections " le plus rapidement possible.
- Au PDCI-RDA : A l`issue d`intenses ballets politico-diplomatiques et de tractations, le parti du Président Henri Konan Bédié consent à sortir 3 anciens ministres qui doivent être remplacés par de nouveaux. D`ailleurs, le Président Henri Konan Bédié a reçu, individuellement, le samedi dernier à sa résidence de Cocody, les 3 ministres sortants. Certes rien n`a filtré de ce qu`ils se sont dit, mais on retiendra que ces ministres qui n`ont nullement démérité plient à la discipline du parti. Après l`élection de Youssouf Bakayoko à la présidence de la CEI, le PDCI-RDA avait sous la main 4 anciens ministres pour 4 portefeuilles à pourvoir. Jusqu`à hier, les récusations de Laurent Gbagbo portaient principalement sur les ministres Patrick Achi et Allah Kouadio Rémi. De supputation en supputation sur tout, après avoir mis dans la balance plusieurs poids politiques et stratégique face à un adversaire qui ne veut que gagner du temps, le PDCI-RDA consent à sortir, non 2 ministres, mais 3. Il les remplace naturellement par trois nouveaux ministres dont 1 femme et 2 hommes, avec possibilité de changement de département pour le seul ancien ministre maintenu. Quels sont les nouveaux qui entrent ? On le saura certainement demain mardi, quand, dans le meilleur des mondes, le gouvernement complet sera présenté au monde entier. D`ici là, toujours selon nos sources, le Président Bédié a reçu hier les 4 ministres entrants du PDCI-RDA, dont les 3 nouveaux et le seul ancien.
- Au RDR : que ce soit dans le cadre du RHDP ou à titre personnel, le parti du Président Alassane Dramane Ouattara a mené les négociations avec la fermeté qui se doit. Il a dû également prendre à son propre jeu, Laurent Gbagbo qui ne veut pas aller aux élections, en lui enlevant une fois encore un argument de retarder les choses. Ainsi, sauf changement de dernière minute, Ouattara consent aussi à remplacer les Ministres Amadou Gon Coulibaly et Ahmed Bakayoko sur qui Gbagbo faisait blocage. D`autres personnalités du RDR viendront les remplacer. Qui donc viendra accompagner dans le gouvernement à venir Marcel Amon Tanoh et Cissé Bacongo ? Jusqu`à hier, nous n`avions aucun nom, mais le principe est déjà acquis. Il se pourrait aussi qu`il y ait changement de portefeuille.
- A l`UDPCI : Le parti du Président Albert Mabri Toikeusse n`avait dans l`ancien gouvernement qu`un seul ministre en la personne du Dr Mabri Toikeusse que Laurent Gbagbo récuse, parce que candidat à la présidence de la République. L`UDPCI qui n`entend pas se laisser faire, affiche une fermeté dans les discussions. Mabri est certes, récusé, mais l`UDPCI est encore en discussion et en contact surtout avec le Premier ministre qui a assuré qu`il appellerait, hier, la direction de l`UDPCI. Mais si la situation devait être la cause ou l`alibi pour un quelconque retard du processus, le président Mabri devrait aussi privilégier les élections, donc songer à placer un pion autre que lui au gouvernement. Pourrait être alors choisi un élu issu de l`ouest montagneux, quasiment du même pré carré que Mabri. L`un dans l`autre, le principe d`entrée du RHDP au Gouvernement est acquis depuis le week-end dernier et, sauf changement de dernière minute, il pourrait se concrétiser d`ici demain mardi. Alors, le RHDP plus le PIT auront une fois de plus déjoué le piège de Gbagbo.
Eddy PEHE
Anaky Kobena (président du Mfa): “Le Mfa entre par solidarité”
Le gouvernement Soro 2 enregistrera l`entrée du Mouvement des forces d`avenir (Mfa) du président Anaky Kobena. Farouchement opposé à une participation du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp), le ministre Anaky a même lancé un appel à ses alliés. Car, il était convaincu que le camp présidentiel créait toujours une situation pour bloquer le processus. Et face à une telle attitude, il fallait être ferme et démontrer aux refondateurs qu`ils ne pouvaient faire avaler constamment à la majorité sociologique que constitue l`opposition ivoirienne. "Le Rhdp n`aurait pas dû siéger dans ce gouvernement. Le Mfa sera représenté par solidarité dans le gouvernement Soro 2. Je n`y entre pas moi-même, mais le parti y sera. Je me suis résolu à le faire pour ne pas jeter un malaise au sein du Rhdp", a expliqué, hier, le ministre Anaky Kobena dont la formation politique aura en charge le département de la Culture dans le nouveau gouvernement du Premier ministre Guillaume Soro.
P. Tadjau
Pr Francis Wodié (présidet du Pit) : “La marche commune avec le RHDP s`arrête pour l`instant”
Les tractations pour l'entrée au gouvernement des personnalités du Rhdp et du Pit se poursuivent et tendent vers un dénouement heureux. Pour ce qui est de la participation du Pit, le professeur Francis Wodié, joint hier après-midi a dit que le Pit n'avait aucun problème de récusation de la part de Laurent Gbagbo. Le Pit s'était abstenu d'entrer dans le gouvernement par solidarité aux autres partis qui avaient des problèmes de récusation. Le RHDP et le PIT exigeaient que la Cei soit d'abord rétablie avant toute formation de gouvernement. Le Pit s'est donc mis du côté du Rhdp pour mener le juste et bon combat de la restauration de la Commission électorale indépendante. Depuis le jeudi dernier, on peut le dire, la Cei est restaurée et donc peut reprendre à fonctionner comme il se doit. Après la remise en place de la Cei, et sans doute après l'aboutissement des négociations, le Pit, par la voix de son président dit "au revoir" au Rhdp. Et le Pr Wodié de préciser tout de suite : "… Ce n'est pas un adieu à nos pairs du Rhdp, c'est un au revoir pour l'instant. C'est une forme particulière de collaboration qui s'arrête. Mais si demain, d'autres obstacles ou de nouvelles menaces devaient se dresser devant la marche du processus électoral, il n'est pas exclu que nous nous retrouvions, que nous nous remettions ensemble, pour penser la nouvelle forme de collaboration. Nous sommes condamnés, dans tous les cas à travailler ensemble".

EDDY PEHE
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