lundi 8 mars 2010

Niger - Après le coup d’Etat du 18 février 2010 : les Nigériens se sont-ils déjà réconciliés avec eux-mêmes ?

(Nigerdiaspora 08/03/2010)
Dès sa prise du pouvoir, le Conseil Suprême pour la Restauration de la Démocratie (CSRD) s’est fixé trois objectifs essentiels : l’assainissement politique et économique du pays, la réconciliation des citoyens et la restauration de la démocratie. En 2 semaines d’exercice du pouvoir d’Etat, si pour l’instant rien ne semble significativement bouger du côté des premier et troisième objectif, celui du milieu est visiblement en train d’être gagné de façon extraordinaire.
Les Nigériens qui étaient, il y a seulement quelques jours, à couteaux tirés regardent pour la première fois depuis plusieurs mois dans la même direction : celle de la reconstruction nationale. Certains seront probablement étonnés voire choqués par l’emploi du mot « reconstruction » puisque le Niger n’était ni en guerre encore moins sorti d’un génocide. Il faudra bien les comprendre. Mais la situation de « ni paix ni guerre » pour paraphraser le Tazartchiste, Abdoulaye Sanda Maïga du MPN-Matassa, outre son caractère potentiellement explosif a focalisé toutes les attentions, les énergies et les intelligences sur la prolongation illégale du régime Tandja ainsi que sur la lutte démocratique qui en est découlée.
De sorte que même l’ancien Premier ministre Ali Badio Gamatié a regretté devoir utiliser son précieux temps à expliquer le changement constitutionnel aux partenaires et pays amis du Niger qu’à oeuvrer véritablement pour les intérêts du PEUPLE nigérien. Aujourd’hui, les déclarations de toutes les forces organisées du pays ont au moins une phrases en commun : « prenons acte du coup d’Etat du 18 février et des intentions du CSRD de restaurer la démocratie». Fini donc les positions extrémistes du genre : « nous nous battrons jusqu’à la mort pour le retour de l’ordre constitutionnel normal » ou encore « nous sommes les seuls patriotes, nous sommes les soldats et les sentinelles de la 6ème République et nous sommes prêts à mourir pour être dans la position de défendre la Refondation. »
Tous ces discours va-t-en-guerre font désormais place à un soutien clair ou plus ou moins caché à la junte militaire. Si les militants de la CFDR (regroupement des forces démocratiques) laissent exploser leur joie quant à la nouvelle donne politique, les Tazartchistes (ceux qui soutenaient le maintien de Tandja au pouvoir) dont le MNSD-Nassara, disent aussi « prendre acte » de la prise du pouvoir par le CSRD. En termes moins diplomatiques cela veut dire qu’ils cautionnent le renversement de leur régime controversé. En ces temps de renouveau, seul le Mouvement Patriotique pour la Refondation de la République a publié une déclaration qui ne va pas dans le sens de l’apaisement et qui semble provoquer la junte au pouvoir avec des terminologies telles que « des officiers subalternes » ou encore de « kidnapping » de leur bien aimé Président Tandja. Ceci a vite sonné comme une façon de piéger les militaires dans des attitudes réactionnaires permettant aux tenants de ces propos de se présenter comme des martyrs de la Refondation. Même si le CSRD n’a jusque- là pas fait signe de soutien ou d’austérité à quelque bord politique ou d’opinion que ce soit. Et continuant son chemin à la manière de « le chien aboie la caravane passe », le CSRD n’a procédé à aucune arrestation ni même de mise en garde, officielle en tout cas. Du reste, la télévision nationale, Télé Sahel, illustre assez bien la toute nouvelle réconciliation entamée par les Nigériens.
En effet, depuis l’avènement des militaires à la tête de l’Etat, tous les acteurs de la vie sociopolitique se font voir sur les antennes nationales, qu’ils soient de l’ancien pouvoir ou de l’ex-opposition. On y entend même des déclarations du genre « demande la libération immédiate du Président Tandja ». Nous sommes dans une espèce de situation du monde à l’envers où c’est un régime militaire qui accorde plus de liberté que le défunt pouvoir dit civil pourtant. Ce qui permet de se faire une moindre idée de jusqu’où la défunte sixième République est allée dans sa dictature. Maintenant que les choses rentrent progressivement dans leur ordre normal, il ne reste plus aux Nigériens qu’à se souder les coudes et s’atteler à la reconstruction nationale.

Ibrahim YERO
6 mars 2010
Source : Canard D.
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