lundi 18 octobre 2010

Niger - Le devoir de maintenir le cap

(Afriscoop 18/10/2010)
Il y a de l’eau dans le gaz au Niger. La transition qui semblait marcher comme sur des roulettes, connaît des couacs. Depuis quelques jours, un climat délétère règne en effet à Niamey. Pourtant, la junte qui avait pris le pouvoir un après-midi du 18 février 2010, mettant fin aux turpitudes du président Mamadou Tandja, avait incarné les espoirs de tout un peuple meurtri. Le président Mamadou Tandja, tel un sot d’Acadie, si boulimique du pouvoir, avait entrepris et réussi au forceps, un projet de modification de la Constitution nigérienne afin de proroger son mandat et pouvoir "achever ses grands chantiers".
L’homme qui s’achète actuellement une conduite avait même caché la grave crise alimentaire qui sévit dans son pays, que seul le coup de force a permis de révéler. Pour rappel, le Niger, indépendant depuis le 3 août 1960, a connu une histoire sociopolitique assez mouvementée, caractérisée par cinq régimes d’exception, depuis le père de l’indépendance Hamani Diori à l’actuel Salou Djibo. Le Niger a-t-il donc été toujours malade de sa classe politique ? Tout porte à le croire. En effet, le Conseil suprême pour la restauration de la démocratie (CSRD), avec à sa tête le général Salou Djibo, dans son apparent élan prométhéen d’un retour rapide à l’ordre constitutionnel, risque de se heurter à des entraves sérieuses avec surtout ces graves dissensions internes étalées au grand jour. Il semblait pourtant convaincre plus d’un observateur quant à sa volonté de s’en aller du pouvoir, après avoir organisé des élections libres et transparentes.
Quatre officiers dont Abdoulaye Badié, le numéro 2 de la junte, sont désormais sous les verrous au Niger. Et le pouvoir militaire en place garde jusque-là le silence. La junte nigérienne fait preuve de discrétion et de prudence. Une attitude digne de la grande muette et qui montre le caractère sensible de l’affaire. Peut-être faudra-t-il attendre que la junte contrôle toute la situation, avant de révéler les tenants et les aboutissants de la crise.
L’une des caractéristiques de la junte nigérienne, depuis son avènement au pouvoir, est la circonspection et le pragmatisme. Toutes choses qui lui ont valu la sympathie et l’admiration de la communauté internationale. En tout état de cause, ces arrestations traduisent un grand malaise au sein de la junte. Dès lors, on ne peut que se demander si la transition en cours en prendra un coup. La piste d’une tentative de déstabilisation, au regard du contexte actuel, semble se préciser. Alors, qu’est-ce qui a pu bien engendrer ces dissensions au sein de la junte ? Est-ce une divergence liée à la conduite de la transition ou à la gestion des deniers publics ?
De toute façon, si ces arrestations sont opérées dans le souci de débarrasser les éléments récalcitrants et réfractaires au processus en cours, on ne peut qu’applaudir, d’autant qu’elles traduisent davantage la détermination du pouvoir militaire à aller rapidement aux élections. On pourrait parler ainsi d’une bienheureuse opération de salubrité. Par contre, s’il s’avère que le général Salou Djibo joue à la roublardise dans l’unique dessein de renforcer son pouvoir et de renvoyer les élections aux calendes grecques, on ne peut que s’en inquiéter. L’un dans l’autre, cet incident de parcours ne devrait nullement entraver le processus de transition en cours. Les forces vives nigériennes ne l’accepteraient pas. La junte a donc le devoir impérieux de maintenir le cap.

Par Boundi OUOBA - LE PAYS
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