vendredi 1 octobre 2010

Rwanda-RD : Génocide, ce mot qui hérisse le poil de Kagamé

(Afriscoop 01/10/2010)
Aujourd’hui 1er octobre 2010, l’ONU devrait rendre public son rapport sur les crimes perpétrés en RDCongo durant 1993 à 2003. Un rapport dont le premier draft avait provoqué un tollé à Kigali. En effet, dans cette mouture datant d’il y a quelques semaines, il était écrit que “les troupes rwandaises avaient commis des exactions dans l’Est de la RDCongo entre 1996 et 1998, des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre, voire de génocide”.
Génocide ! Ce terme n’a pas la même connotation au pays des Mille Collines que dans n’importe quelle autre région d’Afrique. Seize ans nous séparent de 1994 ! Et ce vocable hérisse le poil de Kagamé. Il n’en fallait pas plus pour que ce dernier montre du muscle, coutumier qu’il est de se faire entendre. D’où sa mise dans la balance entre élaguer ce rapport, c’est-à-dire ôter les bouts de phrase querellés, et le retrait des milliers de soldats rwandais du Darfour. L’homme mince de Kigali, qui reste droit, a osé et force est de reconnaître qu’il a les moyens de sa politique.
Elles sont très peu nombreuses, les nations qui se risqueraient à engager un bras de fer contre l’ONU. L’artisan du décollage économique du Rwanda l’a fait, comme il avait croisé le fer avec la France, toujours d’ailleurs sur la tragédie du peuple rwandais. C’est donc finalement un document édulcoré que l’ONU publiera ce début octobre, puisque les experts prendront des gans dans l’emploi du mot “génocide”.
Victoire pour le premier magistrat rwandais, qui, sur certains sujets, reste droit dans ses bottes comme une lance tutsi : ces menaces ont porté leurs fruits. Car quelles que soient les contorsions langagières dont useront les rapporteurs, ceux-ci se garderont d’employer ce terme tabou dont le contenu sémantique donne l’urticaire aux autorités du Rwanda. Cependant, en vérité, l’ONU n’avait pas vraiment le choix face à ce douloureux dilemme.
En effet, et déjà que les pays ne se bousculent plus au portillon pour envoyer leurs troupes sur le théâtre des brûlots africains, laisser amputer de plusieurs millliers d’hommes ces forces onusiennes du Darfour, c’est un luxe qu’en bon premier responsable Ban-Ki Moon ne saurait s’offrir. Il fallait qu’il lâche du lest face à Paul Kagamé. Entre les deux, il y a finalement eu un semblant de match nul, avec le score de 1 but partout.
Le moins qu’on puisse dire est que l’ONU a vu juste en agissant de la sorte, car le maniement des mots doit se faire avec délicatesse. Or souvent, pour choquer ou mettre en relief le sérieux d’un rapport, on use et on abuse d’expressions qui ne traduisent pas la réalité des choses. Ainsi, il est, par exemple, prudent de ne pas faire l’amalgame entre des meurtres, des assassinats, un génocide ni un pogrom.
Surtout pour un pays qui a déjà fait l’amère expérience de l’épuration des “igninzé” (cafards, terme utilisé au moment du génocide en 1994 pour désigner les Tutsis ou Hutus modérés). Cette réculade ne signifie nullement que des actes répréhensibles par la justice n’ont pas eu lieu en RDCongo de par le fait des “libérateurs” rwandais. C’est connu aussi, ni Kagamé ni ses hommes ne sont des enfants de chœur. Ils passent même pour être les trublions de la sous-région.

Par Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana
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