mardi 14 septembre 2010

Le Burkina, un gigantesque « black market »

(Le Pays 14/09/2010)
Il est écrit « Vente interdite » sur les couvertures de certains manuels scolaires. Mais, les ouvrages en question se retrouvent sur les étals des librairies de la place. Il s’agit bien des livres que l’Etat a décidé de donner gratuitement aux élèves depuis un certain nombre d’années. Malheureusement, tout est tombé dans le domaine du deal au Burkina. Voilà pourtant une bonne initiative qui avait été unanimement saluée et avait suscité beaucoup d’espoir.
De fait, pour promouvoir la scolarisation des enfants burkinabè, un certain nombre de mesures avaient été prises dont la gratuité des frais de scolarité et des manuels scolaires ; ce qui a sensiblement rehaussé le taux de scolarisation, notamment celui des filles. Hélas, les fossoyeurs de l’éducation sont entrés dans la danse sans que l’Etat ne réagisse de façon prompte et énergique.
En effet, au détour d’un week-end bien arrosé, des agents de l’Etat qui se retrouvent fauchés, choisissent de brader des cartons de livres de lecture ou de calcul auprès de libraires. Du coup, les ouvrages, censés être gratuits, se retrouvent sur la place du marché. Par ces temps difficiles, combien de parents refuseraient de rentrer dans le jeu en n’achetant pas ces livres initialement gratuits ?
Se retrouvant dans la quasi-impossibilité d’acquérir ces livres dans les écoles, ils n’ont pratiquement pas le choix.Dans la chaîne d’écoulement de ces manuels, les complices sont nombreux. Mais, jusque-là, l’Etat semble n’avoir pas encore installé la peur dans le camp des détourneurs et des receleurs. Et c’est pourquoi l’impunité se poursuit dans le contexte général de la déliquescence des valeurs morales. Il faut absolument que l’Etat ouvre l’oeil et le bon, sur les prédateurs de notre système éducatif, en démasquant les brebis galeuses. Il est aussi important qu’un système de contrôle s’il est déjà mis en place, soit renforcé pour vérifier que les manuels scolaires sont effectivement remis aux élèves.
A ce tableau, il faut ajouter le détournement des vivres des cantines. Comme quoi, tout ou presque est devenu du business dans les écoles. Comment, dans ces conditions, le Burkina pourra-t-il atteindre les objectifs de qualité dans l’éducation de façon générale ? Ces dernières années, avec l’appui de ses partenaires, de nombreux efforts ont été consentis pour construire des classes, recruter des maîtres ou réformer les programmes d’enseignement. Mais, tous ces efforts seront vains si l’Etat ne trouve pas les moyens de mieux s’organiser pour combattre ceux qui tirent le système par le bas. « Les blacks markets » du livre (entendez les « marchés noirs ») doivent être combattus.

SIDZABDA, Le Pays
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