(Afriscoop 21/04/2010)
Après le travail de sa mission d’observation électorale qu’elle a eu à déployer sur le terrain dans le cadre de la dernière élection présidentielle, l’Eglise catholique n’a toujours pas encore donné sa lecture du déroulement du scrutin de début mars au Togo. Au sein de l’Eglise de Dieu de ce pays, ce qu’on appelle désormais dans les coulisses le « mutisme organisé » de la Cenjp (Mission d’observation de la Commission épiscopale nationale justice et paix) suscite de plus en plus un malaise que les « hommes de Dieu » catholiques arrivent de moins en moins à dissimuler. Ainsi, de sources proches de la Cenjp, la publication de ce rapport général est bloquée par des raisons toutes particulières, a appris AfriSCOOP à Lomé.
« Mon Père, quand est-ce que l’Eglise catholique va communiquer au grand public sa propre lecture de l’organisation et du déroulement de la joute électorale de début mars au Togo ? », lance une fidèle à un vicaire d’une paroisse de Lomé, au détour d’une banale discussion sur l’évolution et les derniers charivaris de la situation socio-politique sur la « Terre de nos aïeux ». En guise de réponse à cette interrogation, le prélat précité pousse un soupir d’amertume et affirme : « Bon, je suis un peu pressé, on se voit plus tard ». Cette réaction devant un sujet devenu “quasi tabou” au sein de "l’Eglise famille de Dieu" du Togo est assez caricaturale de la position ambiguë des principaux responsables catholiques sur la suite à donner au travail de leur Mission d’observation électorale.
Selon une source proche de la Cenjp, « les résultats de l’observation électorale que détient cette Mission plaident en faveur du candidat de l’Ufc (Union des forces de changement), Jean-Pierre Fabre. L’épiscopat togolais a tout simplement peur de la réaction du parti au pouvoir vis-à-vis de ce type de résultats. C’est la raison pour laquelle ll bloque la publication de ce rapport général » ! La même source confiera à AfriSCOOP que les principaux responsables de la Cenjp ne sont pour rien dans le silence radio qu’ils observent sur la suite à donner à la tâche à eux assignée. « Les responsables de la Cenjp ne font qu’obéir aux ordres de leurs supérieurs ecclésiastiques », complète l’interlocuteur d’AfriSCOOP.
Le mutisme autour de cette observation électorale est-il la face visible de la division qui mine la tête pensante de l’Eglise de Rome du Togo, au sujet de la lecture qu’elle fait du déroulement du fil de l’actualité socio-politique togolaise ? « La Cet (Conférence des évêques du Togo) est traversée par divers courants politiques. Certains évêques sont pro-Rpt, d’autres sont pro-opposition. C’est l’une des raisons fondamentales qui explique sa difficulté à adopter une position ferme vis-à-vis des contorsions à la démocratie au Togo. Même si, comme tous les êtres humains, les prêtres sont libres d’avoir leurs propres convictions politiques », confie sous le sceau de l’anonymat à AfriSCOOP, un aspirant à la prêtrise qui est en fin de formation au Grand séminaire de Lomé. Le même étudiant souligne : « Au sein de l’Eglise catholique du Togo, nous avons besoin d’un ecclésiastique charismatique comme Mgr Ntumi au Cameroun » !
La dernière sortie publique à mettre à l’actif de la Cet remonte au 17 mars et s’inscrivait dans le cadre de la commémoration du cinquantenaire de l’accession du Togo à la souveraineté internationale. Dans ce message, les “patrons de l’Eglise de Rome du Togo” ont convié leurs compatriotes « à s’engager d’arrache-pied, avec détermination, pour que les années à venir soient des plus belles, afin que le Togo soit comme un paradis terrestre pour ceux qui y vivent. La bonne gouvernance devra prendre sens et corps tous les jours dans les comportements aussi bien des dirigeants que du peuple ».
A l’issue de la joute électorale du 04 mars 2010, la Cenjp ne s’est fendue que d’un communiqué qui disait entre autres : « La Cenjp se félicite du travail de ses membres nationaux et internationaux déployés sur les sept diocèses du Togo. Cette Mission a pu constater le bon déroulement du scrutin dans son ensemble. D’une manière générale, les élections ont eu lieu dans le calme et dans le respect des règles édictées par le Code électoral en vigueur (…) Cependant, la Cenjp est surprise par les déclarations unilatérales et prématurées de certains partis politiques avant la proclamation de la Commission électorale nationale. Ces déclarations intempestives contredisent l’esprit démocratique qui aurait dû prévaloir.
La Mission d’observation craint que la population togolaise ne soit influencée voire instrumentalisée à des fins partisanes et que ces déclarations hâtives ne détruisent la confiance que le processus engagé voulait instaurer. La Cenjp espère et souhaite que l’issue du scrutin n’engendre point de violences et que le processus démocratique se poursuive dans le débat pacifique des différents partis politiques en vue des prochaines échéances électorales ». Une conclusion de la Cenjp sur le processus électoral de début mars qui continue d’intriguer même les observateurs qui lui ont servi de bras armé sur le terrain !
mercredi 21 avril 2010
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