mardi 20 avril 2010

R.D.C. - Les non-dits d’une visite canadienne: L’affrontement « américano-européen » se précise en RDC

(Le Potentiel 20/04/2010)
Un Américain s’en va, une Canadienne débarque à Kinshasa. Véritable chassé-croisé diplomatique. A peine que le président turc venait de séjourner à Kinshasa pour donner une nouvelle impulsion à la coopération bilatérale entre la RDC et la Turquie, deux éminentes personnalités étrangères ont pris sa relève. Il s’agit du Sous-secrétaire d’Etat américain aux Affaires africaines, Johnnie Carson, et de la Gouverneure du Canada, Michaelle Jean. Certes, le côté protocolaire, c’est-à-dire diplomatique, passe en premier lieu. Mais les choses sérieuses sont celles qui ne se disent rien en public. Il n’y a qu’à interpréter l’itinéraire de « Monsieur Afrique » de Obama et celle de la gouverneure du Canada pour se convenir que le rôle de la République démocratique du Congo dans la région des Grands Lacs a été au centre des entretiens. Que Johnnie Carson passe par Paris pour arriver en RDC et regagne Washington en passant par Londres ; que Michaelle Jean prolonge son séjour dans les Grands Lacs en faisant escale à Kigali presqu’au même moment où Carson est à Londres, les grandes puissances sont en train de se répartir les rôles dans la région des Grands Lacs. Si ce n’est pas encore la redistribution des cartes, c’est comme si c’était déjà cela.
se Congo est en train de se réveiller. Du moins si l’on prend en compte tous ces chassés-croisés diplomatiques qui démontrent, si besoin en est encore, de l’intérêt que l’on manifeste autour de la RDC. Pays au plan géostratégique enviable, doté de richesses innombrables, la RDC suscite des convoitises illimitées à telle enseigne qu’elle est au centre des enjeux régionaux et internationaux.
En l’espace d’un mois, de hautes personnalités politiques étrangères viennent d’effectuer des visites d’Etat en RDC. L’on en voudrait pour preuve, le séjour du Sous-secrétaire d’Etat américain aux Affaires africaines, Johnnie Carson, et de la gouverneure du Canada, Michaelle Jean. La visite de l’Américain a été placée sous le signe de la sécurité, de la stabilité et de la redynamisation des relations entre la RDC et les Etats-Unis. Le sous-secrétaire d’Etat américain a saisi cette opportunité pour souligner le rôle stratégique de la RDC en Afrique. Pour ce faire, le renforcement des capacités des FARDC par la professionnalisation de son armée est un facteur essentiel en vue de consacrer la stabilité des institutions nationales. Raison pour laquelle les Etats-Unis se sont engagés à accompagner la RDC dans cette voie. Un bataillon commando d’intervention rapide est en formation à Kisangani, dans la Province Orientale, sous les auspices de l’AFRICOM, le Commandement militaire américain pour l’Afrique.
La Gouverneure du Canada, avec des mots différents, a souligné que la stabilité en Afrique passe par la paix en RDC et que le vent du changement dans le continent, est de plus en plus une réalité. Des mots simples mais importants pour souligner la responsabilité historique de la RDC dans ce continent. REDISTRIBUTION DES CARTES ?
Seulement voilà. Les coïncidences suscitent toujours plusieurs interrogations et poussent à des réflexions profondes. Tenez.
Johnnie Carson arrive à Kinshasa en passant par Paris. Or, Paris à l’égard de certains pays européens, joue un rôle important dans la région des Grands Lacs. C’est ainsi que dernièrement, Paris a suggéré la mise en place des « projets économiques communs » pour éloigner les conflits armés dans cette région. Une escale importante pour le « Monsieur Afrique » des Etats-Unis d’échanger avec les responsables français sur la nouvelle vision africaine des Etats-Unis. Aussi, avant de rentrer à Washington, Johnnie Carson passe par Londres où il a eu inévitablement avec les Britanniques les mêmes entretiens.
Comme s’ils se relayaient, la gouverneure du Canada succède à Carson à Kinshasa. Officiellement, c’est pour relancer la coopération bilatérale avec la RDC. Mais trêve de naïveté. L’on n’exclut pas que les questions économiques aient été également abordées.
En effet, le « Dossier KMT » oppose toujours le gouvernement canadien au gouvernement congolais. L’affaire se trouve maintenant devant un arbitrage international à Paris. Mais la porte d’un compromis à l’amiable n’est pas toujours fermée. Or, dans ce secteur, de grands investisseurs canadiens sont prêts à débarquer en RDC, une information qui ne laissera pas indifférentes les autorités congolaises. En attendant, l’Agence canadienne de développement international intervient dans 40 projets de développement retenus pour la RDC. D’où des entretiens sur l’amélioration du climat des affaires.
Mais il y a bien plus. Les questions de sécurité intéressent également le Canada. A en croire des rumeurs persistantes, le Canada envisagerait d’envoyer une «Force de maintien de la paix en RDC » si jamais la MONUC partait précipitamment. Les discussions secrètes seraient très avancées pendant qu’au plan politique un débat y afférent est d’actualité au Canada.
Toujours est-il qu’au moment où Johnnie Carson est à Londres, la gouverneure du Canada est attendue à Kigali, très proche de Londres depuis cette crise dans la région des Grands Lacs. Or, il est important de retenir que le Canada et les Etats-Unis font partie de l’Alliance des Etats du Nord Amérique, ALENA, et partagent les mêmes préoccupations économiques et sécuritaires. Les Etats-Unis et le Canada se sont-ils répartis les tâches en Afrique des Grands Lacs qu’une Canadienne succède, curieusement, à un Américain dans la région ?
Les deux pays sont omniprésents en Afrique. Par ces temps qui courent, le Canada est très actif dans la région et conduit en ces moments le « Groupe des amis des Grands Lacs » pour des projets de développement des pays de la région.
Mais tout se passe également comme si l’on est en train de distribuer de nouvelles cartes dans la région. Ce qui est vrai, c’est que les Grands Lacs ne seront plus jamais une plate-bande des pays européens. Les Etats-Unis ont décidé d’y être présents au regard des enjeux économiques. Ces chassés-croisés diplomatiques sont une illustration parfaite de l’affrontement entre d’une part, les Etats-Unis et le Canada, et de l’autre les pays européens conduits par la France, la France, la Grande -Bretagne et la Belgique. Au centre de ces enjeux économiques, la RDC.

Par Le Potentiel
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