mercredi 21 avril 2010

Ile Maurice - Législatives en Ile Maurice: Brûler les scories ethniques

(L'Observateur Paalga 21/04/2010)
L’Ile Maurice est connue pour ses plages paradisiaques de Port-Louis, la capitale, où viennent se prélasser des touristes nantis. D’ailleurs les recettes touristiques constituent la principale source de revenus de ce pays.
Ce bout de terre de 2000 km2 qu’occupent 1,3 millions d’âmes est un pays émergent, dont la croissance du PIB devrait atteindre 4 ,2% malgré la crise et une hausse du déficit, qui devrait tourner autour de 11% selon le FMI. Textiles, sucre et tourisme devraient en principe booster l’économie de ce pays.
Mais il n’y a pas que l’économie qui distingue l’île, qui, géographiquement, fait bien partie de l’Afrique mais qui, dans beaucoup de domaines, pourrait être rattachée à l’Asie. D’ailleurs son emplacement dans l’océan Indien est déjà un signe que ce pays est écartelé entre plusieurs cultures, entouré si on peut dire, par la Réunion française, les Seychelles, les Comores... Il y a aussi la politique.
Sur un continent noir où les exemples en matière de modèle de démocratie sont rarissimes, Maurice fait figure d’exemple : les alternances s’y font en douceur, et l’Etat de droit marche bien, même si la vie politique est dominée par les 2 mêmes grandes personnalités : Navim Ramgoolam, actuel Premier ministre, et Paul Bérenger, ex-chef de gouvernement aussi. Le 31 mars 2010, le Premier ministre a dissous l’Assemblée nationale et convoqué le corps électoral pour des législatives anticipées le 5 mai prochain. Raison invoquée par Navim pour expliquer son geste : « une atmosphère d’incertitudes », politiques notamment. Mais il y a une autre raison, officieuse, celle-là : fragilisé par son esseulement, il cherche à renforcer son assise en faisant coalition avec le fils du ... président Pravind Jugnaud.
S’il faut saluer ce scrutin, qui se dessine sous de bons auspices, il y a tout de même une tache qui risque de l’assombrir : l’exigence que les citoyens mentionnent leur ethnie sur les cartes électorales, et louer le courage de tous ceux qui ont opposé une fin de non-recevoir à cette pratique, rétrograde, bien qu’ils aient été mis hors jeu. Il est vrai que le mélange de la politique et de l’ethnie est une donnée longtemps exploitée par les politiques, mais cette exigence de « l’ethnie correcte » tend à s’estomper du fait de la maturité des populations.
50 ans après les indépendances, a-t-on idée encore que, par exemple au Burkina Faso, on mentionne qu’on est Peul, Mossi ou Gourmantché sur nos cartes d’électeur ? En agitant cet épouvantail du communalisme, les partisans de cette pratique mettent la citoyenneté sous le boisseau, obnubilés qu’ils sont par leurs seuls intérêts.
Ceci n’est ni plus ni moins qu’une forme de stigmatisation ethnico-religieuse que tente d’imposer le « Best Loser system ». A quoi sert-il à un Mauricien d’afficher son appartenance ethnique pour montrer qu’il est Mauricien ? A enraciner sa culture et son identité ? Un Mauricien n’est-il pas égal à un autre Mauricien ?
Pour tout dire, les mœurs politiques mauriciennes gagneraient à être débarrassées de ces scories, qui pourraient mettre les pendules de sa démocratie en retard, pour ne pas dire plus. Car il n’y a pas terreau plus favorable à toutes les dérives que les exacerbations de clivages ethniques ou religieux.

Par Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana
© Copyright L'Observateur Paalga

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire