mardi 29 mars 2011

CONGO - Retour samedi de l’Ambassadeur rd-congolais : Kinshasa-Brazza, condamnés à la coexistence pacifique

(L'Avenir Quotidien 29/03/2011)

*Arrivée à Kinshasa le samedi dernier vers 16 heures, heure de Kinshasa, Esther Kirongonzi, ambassadeur de la Rdc rappelée de Brazzaville, s’est interdite de toute déclaration à la presse.
On peut parler, sans peur d’être contredit qu’entre Kinshasa et Brazzaville, c’est l’escalade. Pour rappel, le gouvernement congolais, par le ministre des Affaires étrangères, Alexis Thambwe Mwamba, a pris la décision de rappeler l’ambassadeur de la Rdc à Brazzaville avec effets immédiats. Le week-end-dernier, l’ambassadeur de la RDC au Congo Brazzaville, Madame Esther Kirongozi, a effectivement foulé le sol kinois en respect de la décision de l’autorité gouvernementale. Il était 16 heures, heure de Kinshasa lorsque la diplomate congolaise est arrivée à Kinshasa. La raison de ce rappel, on le sait, c’est ce que d’aucuns appellent brouille entre les deux capitales.
A son arrivée à Kinshasa, sans doute pour ne pas envenimer la situation ou pour donner des informations que seules les autorités gouvernementales seraient habilitées à fournir, la diplomate congolaise s’est interdite de toute déclaration. Dans l’opinion, on se demande si Esther Kirongozi, ambassadeur de la Rdc à Brazzaville était elle-même informée de la raison de son rappel au pays. Faute d’interroger le ministre des affaires étrangères qui, depuis son communiqué rappelant l’ambassadeur de la Rdc à Brazzaville, semble s’interdire d’en fournir des détails. Normalement, dans le cadre de la réciprocité, Brazzaville devrait également rappeler son ambassadeur à Kinshasa. Sassou Nguesso jouerait-il à l’apaisement ? On croit le savoir. L’opinion reste dans sa soif de connaître la suite de cette énième brouille entre les deux capitales les plus rapprochées du monde. Tout ce qu’on dit au sujet de cette brouille entre les deux pays relève de supputations journalistiques voire politiciennes. On attendait donc avec impatience la suite de l’affaire.
Pas de fumée sans feu
En attendant, on croit savoir que cette brouille a des rapports avec les incidents survenus le 27 février dernier lorsque des personnes armées d’armes blanches et même d’armes à feu, ont attaqué en plus la résidence du Chef de l’Etat dans la commune de la Gombe, la base logistique du camp colonel Kokolo dans la commune de Bandal. A cette occasion, des assaillants ont été arrêtés. Selon certaines indiscrétions, lors de l’interrogatoire, on a appris que certains des assaillants sont venus de la province de l’Equateur jusqu’à Brazzaville où ils auraient fait jonction avec d’autres éléments résidant sur place dans la capitale congolaise. C’est, selon la même source, à Brazzaville qu’ils se sont entraînés à l’attaque et où ils ont bénéficié de l’initiation à un rite qui devrait les rendre invincibles et invisibles face aux éléments de la garde présidentielle de Kinshasa. A Kinshasa, selon la même source, ils auraient bénéficié de l’apport de quelques éléments aussi bien de la police de la Rdc que des Fardc.
Une rencontre inutile ?
Ceci était connu dès le lendemain de l’arrestation des interrogatoires. Entretemps, entre les deux pays, on a assisté à des gestes d’amitié notamment à travers la dernière réunion mixte de défense tenue à Kinshasa. Les dossiers qui fâchent étaient à l’ordre du jour. On pensait que les deux pays avaient pris l’option de laver le linge sale en famille. Comment en est-on arrivé à l’escalade ? On croit comprendre que lors de la rencontre de Kinshasa, les deux parties avaient pris des engagements qui n’ont pas été tenus. Les observateurs croient savoir que Kinshasa étant la victime et demandeur dans ce cas, étant donné aussi que c’est lui qui prend l’initiative de rappel de son ambassadeur, ce serait lui la partie lésée.
Dans les déclarations de certains officiels de Brazzaville, on lit un certain réflexe de défense. Pour quelle raison Brazzaville se met-il à la défensive ? Qui a besoin de cette crise en ce moment ? Kinshasa et Brazzaville ont connu des moments oubliables de crise. Dans les médias, on a assisté à des échanges houleux, voire à des injures. Le fond de cette crise était la différence des idéologies. Brazzaville était sous le socialisme scientifique avec le PCT alors qu’à Kinshasa sous la couverture de ni à gauche ni à droite, ni même au centre, on priait dans la chapelle du capitalisme occidental.
Aujourd’hui, on parle de la renaissance africaine sur la base d’affranchissement face à des idées reçues. Si Pierre Mulele avait choisi Brazzaville après sa débâcle au Kwilu dans la province du Bandundu, c’est parce qu’il espérait y trouver des frères idéologiques qui le protégeraient. Malheureusement, Brazzaville a livré Pierre Mulele en se laissant rouler dans la farine par un régime qui n’avait aucun respect de la parole donnée. Un véritable cas de conscience. Mais est-ce une raison pour Brazzaville de s’interdire tout discernement ?
Faustin Munene est un des ténors du régime en place à Kinshasa. Chancelier des Ordres nationaux , Faustin Munene avait démissionné volontairement pour se livrer à la politique. Candidat malheureux aux législatives dans la circonscription de la Lukunga, son chemin vers l’opposition est presque ignoré de beaucoup jusqu’au jour où, appelé à répondre à une invitation judiciaire, il se sauvera. Dans certains milieux, on avait même dit qu’il était mort. On mettait sa mort sur le dos du régime de Kinshasa.
Les preuves de la méfiance de Kinshasa
D’autres milieux, particulièrement ceux proches de Honoré Ngbanda, avaient déclaré à qui voulait les entendre que le général était en sécurité et que c’est l’Apareco qui l’avait prévenu pour se soustraire de la justice. Ce sont ces milieux qui informeront également l’opinion que Faustin Munene venait de créer une armée de résistance populaire (ARP). Ses sources iront plus loin jusqu’à révéler que l’attaque attribuée aux Enyele à Mbandaka et celle de Kikwit était l’œuvre de l’ARP. Avant même que la justice congolaise l’informe des griefs mis à sa charge, ses collaborateurs qui continuent à s’afficher, ont démontré à l’opinion que la justice congolaise avait des raisons sérieuses de s’intéresser au général.
Lorsqu’on sait qu’à ce jour, il y a une sorte de jonction entre Udjani et Munene à Brazzaville et que des actions de déstabilisation des institutions de la Rdc sont enregistrées, le cas de près d’une centaine de soldats arrêtés au Bas-Congo et dernièrement l’attaque de la résidence de Joseph Kabila, aucun gouvernement accepterait se laisser faire conter une histoire sans aucun lien ni avec l’époque ni avec le régime en place encore moins avec l’environnement international.
Le respect et la protection mutuels
Par contre, s’il y a des raisons pour ne pas livrer les personnes recherchées par leur pays à leur juge naturel, on peut expliquer sans arrogance ni ironie provocatrice. Kinshasa a toutes les raisons de s’offusquer de l’attitude de Brazzaville lorsqu’on sait qu’un certain Bernard Kolelas, parce que défiant le régime de Brazzaville tenait à rentrer contre la volonté de son pays, a été non seulement stoppé à Kinshasa, mais renvoyé d’où il venait. Kinshasa démontrait encore une fois par ce geste qu’il tenait aux relations de bon voisinage avec Brazzaville.
Pourquoi Brazzaville ne se souviendrait-il que des exemples malheureux qui n’ont rien à voir avec le régime actuel à Kinshasa en lieu place de se souvenir de bons gestes du régime plus proche de celui actuellement en place à Kinshasa ? Les deux peuples de deux rives du Congo ont besoin de projets de développement et non des crises archaïques sur un fond difficile à soutenir. Kinshasa et Brazzaville sont condamnés à la coexistence pacifique.

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