lundi 28 mars 2011

Bénin - PRESIDENTIELLE BENINOISE: la Cour constitutionnelle pourra-t-elle sauver le processus ?

(Le Pays 28/03/2011)

Les candidats et les simples citoyens qui avaient quelque chose à redire de l’élection présidentielle béninoise du 13 mars 2011 avaient jusqu’au 25 mars dernier pour le faire. A cette date, cinq recours dont ceux de trois citoyens ordinaires ont été enregistrés au niveau du greffe de cette haute juridiction. Depuis, les regards sont tournés vers la Cour constitutionnelle béninoise qui dispose, au terme des textes, de dix jours pour proclamer les résultats définitifs de la présidentielle. Et ce, après avoir examiné les recours.
Et c’est peu dire que la Cour constitutionnelle aura du pain sur la planche avec notamment les recours pour fraudes ou en annulation du scrutin introduits par les candidats Adrien Houngbédji et Abdoulaye Bio-Tchané qui contestent la réélection, dès le premier tour, du président sortant, Yayi Boni, avec un score de 53% selon les résultats provisoires. Ce dernier, usant de son droit, a aussi introduit un recours pour que soit corrigé et revu à la hausse son score qui, en l’état actuel, ne reflète pas, à ses yeux, la réalité. En plus des recours, la contestation des résultats provisoires se fait aussi en dehors des voies légales. Depuis la proclamation desdits résultats, l’opposant Adrien Houngbédji menace de faire descendre ses militants dans la rue pour dénoncer le hold-up électoral en préparation.
Pour prouver sa tenacité, il a appelé ses militants à manifester le 24 mars dernier. Il a fallu user de gaz lacrymogène pour les disperser. Le plus inquiétant dans tout cela, c’est que l’opposant menace de s’autoproclamer chef de l’Etat élu. Cette perspective du scénario ivoirien inquiète tant la CEDEAO que l’ONU au regard des mille et une difficultés que le bicéphalisme sur les bords de la lagune Ebrié a engendrées. Au regard de ce qui précède, on se demande si une crise postélectorale est inévitable au Bénin qui a toujours donné un bon exemple en matière de démocratie. Tout le monde acceptera-t-il le verdict de la Cour constitutionnelle ? Sauf omission de notre part, c’est l’une des rares fois où l’on retient son souffle à propos d’une élection présidentielle dans ce pays.
C’est à se demander si, 20 ans après, le modèle béninois a montré ses limites ou est tout simplement en panne. En effet, la situation actuelle était prévisible au regard des conditions dans lesquelles a été organisé le premier tour de la présidentielle. Certes, il y a eu deux reports du scrutin opérés d’ailleurs au forceps avec comme ligne rouge à ne pas franchir le 6 avril 2011, date de la fin de mandat du président sortant. Mais ceux-ci étaient insuffisants pour permettre de régler le problème de la fameuse Liste électorale permanente informatisée (LEPI). Conséquence : un bon million de Béninois a été mis de côté bien qu’ayant l’âge de voter. Une situation qui a même obligé le président sortant à demander pardon à ces oubliés de la LEPI le jour du premier tour. Visiblement, on a préféré respecter un délai constitutionnel et organiser des élections chaotiques plutôt que de faire preuve de réalisme. Un signe qui ne trompe pas par rapport au malaise électoral, c’est qu’aucun chef d’Etat, aucun pays n’a encore félicité le président réélu. Pas même ceux dont la spécialité est de s’empresser en pareille circonstance à peine les résultats provisoires proclamés.
Chacun attend de voir comment seront gérées les conséquences de ce légalisme qui n’est pas mauvais en soi tant qu’il n’est pas excessif. En dernier ressort, il revient à la Cour constitutionnelle de sauver un processus électoral qui risque dangereusement de dérailler. Y parviendra-t-elle pour que le mandat du président qui sera élu ne soit pas pourri ? Réponse dans quelques jours à l’issue du contentieux électoral.

Séni DABO
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