(Le Figaro 31/03/2011)
Le premier ministre d'Alassane Ouattara, dont les troupes sont aux portes d'Abidjan, donne quelques minutes au président sortant pour démissionner. Les militaires de la force Licorne se postent pour protéger les ressortissants français.
• Les forces pro-Ouattara «encerclent» Abidjan
La tension est au maximum ce jeudi à Abidjan, où l'on craint un affrontement final entre les forces d'Alassane Ouattara et celles de Laurent Gbagbo. Selon Guillaume Soro, premier ministre du président élu et reconnu par la communauté internationale, les Forces républicaines ont encerclé dans l'après-midi Abidjan, le coeur du pouvoir de Laurent Gbagbo, le président sortant. «Il faut que Gbagbo se rende maintenant», a averti Guillaume Soro, qui affirme que plusieurs généraux pro-Gbagbo ont rallié Ouattara. «La partie est terminée» pour Laurent Gbagbo, qui devra quitter le pouvoir «dans un délai de deux ou trois heures», a-t-il également déclaré. Le président ivoirien sortant a «jusqu'à 19 heures (21 heures, heure de Paris) pour démissionner», a-t-il indiqué, sinon «on viendra, hélas, le chercher là où il est».
Dans un discours radio-télévisé, Alassane Ouattara a appelé jeudi les militaires fidèles au chef d'Etat sortant à «rallier» ses forces. Par ailleurs, le chef de l'Onuci - la mission de l'ONU en Côte d'Ivoire - a affirmé que l'Hôtel du Golf, où le président élu en novembre était retranché depuis lors, n'est plus soumis au blocus des forces pro-Gbagbo. «Les 50.000 policiers et gendarmes armés ont tous quitté Gbagbo. Il n'y a que les forces spéciales de la Garde républicaine et les Cecos (commandos de forces spéciales)», a également annoncé Choi Young-jin. Ces forces encore fidèles à Laurent Gbagbo sont positionnées en «deux endroits»: «le palais présidentiel» et la «résidence» du président sortant, a-t-il précisé. L'Afrique du Sud a en outre affirmé que le chef d'état-major des armées de Côte d'Ivoire s'était réfugié au domicile de l'ambassadeur d'Afrique du Sud à Abidjan.
De leur côté, des militaires français se déployés en certains endroits de la ville, notamment pour protéger des ressortissants français attaqués par des partisans de Laurent Gbagbo dans le quartier des Deux Plateaux. Un millier de soldats français se trouvent en Côte d'Ivoire dans le cadre de l'opération Licorne.
• Pression internationale sur Gbagbo
La pression extérieure sur le régime en place va croissant. La France a appelé jeudi Laurent Gbagbo à «entendre le message» du Conseil de sécurité de l'ONU, qui a exigé mercredi son départ immédiat, et à «arrêter de faire couler le sang» des Ivoiriens. Nicolas Sarkozy réunira vendredi le premier ministre François Fillon, les ministres des Affaires étrangères Alain Juppé et de la Défense Gérard Longuet, afin de «faire le point» sur la situation.
Les Etats-Unis ont quant à eux prévenu le président sortant que «s'il y a des violences importantes à Abidjan et que Gbagbo ne quitte pas le pouvoir, lui et ses proches, y compris sa femme Simone Gbagbo, devront être tenus responsables des actions qu'ils n'auront pas empêchées».
Longtemps solide alliée du président sortant avant de reconnaître la victoire de son rival au scrutin de novembre, l'Afrique du Sud a également appelé à la fin des violences, déplorant que le pays soit «en train de replonger dans la guerre civile».
• Silence de Laurent Gbagbo
Le président sortant, qui, selon certaines sources, doit s'adresser à la nation jeudi soir - il y avait renoncé la veille - n'a pas fait savoir quel choix il ferait : bataille d'Abidjan ou retrait. Laurent Gbagbo «n'a pas l'intention de démissionner» et «des milliers d'Ivoiriens vont prendre les armes pour défendre leur pays», a néanmoins lancé jeudi l'un de ses conseillers.
Si son rival se rendait, Alassane Ouattara a demandé selon son ambassadeur en France que son «intégrité physique» soit préservée. Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a appelé jeudi les deux camps opposés en Côte d'Ivoire à éviter tout acte de «vengeance».
• Situation humanitaire «dramatique»
L'ONG Human Rights Watch (HRW) accuse des milices et mercenaires libériens soutenant le président sortant d'avoir «massacré» des Ouest-Africains, dont «au moins 37» en un jour, le 22 mars dans une localité de l'ouest cacaoyer.
À Duékoué, dans l'ouest, quelque 40.000 déplacés se trouvent à la mission catholique, où la situation humanitaire est «grave et préoccupante», a indiqué jeudi la Mission de l'ONU en Côte d'Ivoire (Onuci). La ville est contrôlée depuis mardi par les forces d'Alassane Ouattara.
«Afin de répondre aux besoins de la population ivoirienne et face à l'accroissement du nombre de déplacés intérieurs et de réfugiés» dans les pays voisins, la France a annoncé jeudi sa décision «d'apporter une aide humanitaire d'urgence» d'un montant global de «2,5 millions d'euros». «Un million d'euros sera alloué au Programme alimentaire mondial (PAM)», a déclaré le quai d'Orsay.
Par Thomas Vampouille
31/03/2011
Mise à jour : 20:50
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