lundi 20 septembre 2010

Enlèvements au Niger : polémique entre Areva et Niamey

(Le Monde 20/09/2010)
Le gouvernement nigérien et le groupe français Areva se sont rejeté, dimanche, la responsabilité de la sécurité du personnel à Arlit (nord du Niger), après l'enlèvement le 16 septembre sur ce site minier de cinq Français, un Togolais et un Malgache, kidnappés à leur domicile en pleine nuit par un groupe armé qui, selon Paris et Niamey, pourrait appartenir à Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI). Après avoir annoncé dès jeudi un nouveau renforcement des mesures de sécurité à Arlit, Areva et Vinci ont finalement entrepris d'évacuer leurs expatriés de la région.
A Paris, confirmant des propos d'un salarié nigérien d'Areva, une porte-parole du géant nucléaire a expliqué que les agents des sociétés de sécurité privées affectées à la surveillance du domicile des expatriés "n'étaient pas armés". Cette disposition relevait d'un accord avec le gouvernement nigérien, qui assurait la présence à Arlit de 350 gendarmes et militaires qui, eux, étaient armés, a-t-elle dit. "Ces agents [privés] n'étaient pas armés parce qu'ils n'étaient pas autorisés à l'être" par la loi locale, a-t-on fait valoir du côté du groupe de construction Vinci. La porte-parole d'Areva a affirmé que militaires et gendarmes pratiquaient rondes et patrouilles pour la protection du site où logeaient les expatriés. Selon Vinci, ils étaient "entraînés spécialement pour la lutte antiterroriste".
"Qu'elle [Areva] ne rejette pas la responsabilité sur le gouvernement", a répliqué le porte-parole du gouvernement nigérien, Laouali Dan Dah. "Si les ravisseurs ont pu opérer avec cette facilité, c'est parce que, notamment, la sécurité du personnel était assurée par des agents privés qui n'étaient pas armés", a-t-il tranché. Les autorités avaient proposé à Areva de confier à l'armée "la sécurité de ses agents", mais l'entreprise "a fait le choix d'assurer la sécurité de son personnel", a-t-il affirmé. Selon lui, les militaires sont seulement affectés à la protection des "stratégiques" sites d'extraction d'uranium.
TENSIONS
Les relations entre Areva et Niamey ont connu ces dernières années des tensions, le pouvoir du président Mamadou Tandja (renversé en février) ayant accusé le groupe français de liens avec la rébellion touareg, dont le dernier front a été actif dans la région de 2007 à 2009. Début 2009 est venu le temps de la normalisation avec la signature d'un accord d'exploitation par Areva de la mine géante d'Imouraren, près d'Arlit, qui devrait propulser le Niger du rang de troisième à deuxième producteur mondial d'uranium.
Il n'y avait "aucun dispositif sérieux de sécurité" autour des domiciles des expatriés, a estimé l'ex-ministre de l'intérieur nigérien Idi Ango Omar, soulignant aussi des "complicités" sur le site, évoquées de source proche de l'enquête. M. Omar a également soutenu que les sociétés de gardiennage privées appartenaient à d'ex-chefs de la rébellion touareg. "Selon toute vraisemblance", des employés de ces sociétés ont "participé à la première rébellion", celle des années 1990, et certainement pas à la seconde, a répondu la porte-parole d'Areva. En juin 2008, quatre Français du groupe avaient été brièvement retenus par un mouvement rebelle touareg. Dimanche, un habitant d'Arlit a souligné que la cité était désormais "sous haute sécurité" avec l'arrivée depuis la veille de "renforts de soldats". Dans un courrier officiel en date du 1er septembre, le préfet d'Arlit évoquait une situation sécuritaire "en train de se dégrader" dans la région.
Le Niger a autorisé des militaires français à utiliser son espace aérien et son territoire pour la première fois depuis près de vingt-cinq ans, a déclaré dimanche une source proche du gouvernement nigérien. "Après ce qui s'est passé à Arlit, nous avons donné notre consentement à la France pour qu'elle déploie des avions et du personnel sur notre sol, afin de trouver les otages et de les libérer", a dit sous le sceau de l'anonymat une source proche de la junte au pouvoir au Niger.
Une centaine de spécialistes français de l'antiterrorisme sont arrivés à Niamey à bord de plusieurs appareils de reconnaissance, a ajouté cette source. - (avec AFP)

LEMONDE.FR avec AFP
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