jeudi 25 novembre 2010

Egypte - Climat tendu à la veille des législatives

(Ouest-France 25/11/2010)
Un an avant la présidentielle, qui désignera le successeur d'Hosni Moubarak, le régime a verrouillé le scrutin dont le premier tour a lieu dimanche. Au grand dam des Frères musulmans.
Assis devant une petite épicerie, des jeunes jouent au backgammon et fument la chicha. Lorsqu'Amr Zaki arrive avec ses supporters, beaucoup se lèvent pour saluer le candidat local des Frères musulmans. « Il n'y a pas de travail pour les jeunes, on reste au café toute la journée. À quelques rues d'ici, il y a des bidonvilles... Le député du parti au pouvoir n'a rien fait. J'espère que les Frères musulmans vont gagner », lance Ahmed, 28 ans.
Dans ce quartier populaire du centre du Caire, le candidat des Frères musulmans, un homme jovial d'une quarantaine d'années, a plutôt bonne presse. Mais a-t-il une chance de devenir député ? Un an avant la présidentielle, et alors que la santé d'Hosni Moubarak, 82 ans (dont vingt-neuf ans de pouvoir), n'est plus celle d'un jeune homme, le régime a décidé de verrouiller cette élection.
Des fraudes plus faciles
Des caciques du pouvoir ont affirmé que la « surprise » de 2005, lorsque la confrérie islamiste avait remporté un cinquième des 454 sièges l'Assemblée du Peuple, ne se reproduirait pas. Comme à chaque élection, des centaines de membres des Frères musulmans ¯ un mouvement islamiste officiellement interdit sur le plan politique, mais toléré sous l'étiquette « indépendant » ¯ ont été arrêtés. Et, depuis une semaine, leurs partisans et les forces de l'ordre multiplient les affrontements.
Le régime a également préparé le terrain au niveau légal. « Les fraudes vont être facilitées cette année par l'absence des juges, qui avaient supervisé les élections de 2005 et limité l'ampleur des trucages », note Leslie Piquemal, politologue. En 2007, le gouvernement avait fait voter des amendements à la Constitution pour remplacer les juges par une « commission électorale », proche du pouvoir.
Face à ce qu'ils qualifient de « simulacre » d'élection, certains mouvements d'opposition ont appelé au boycott des législatives. C'est le cas de la Coalition nationale pour le changement de Mohamed El Baradei, l'ancien directeur de l'Agence internationale à l'énergie atomique. « J'avais envie de faire changer les choses depuis longtemps. El Baradei nous a redonné cet espoir », témoigne Mohamed, un avocat de 25 ans. Il parcourt la ville pour faire signer une pétition réclamant une modification de la Constitution, afin qu'un candidat indépendant puisse se présenter à la présidentielle. C'est actuellement impossible. Comme d'autres jeunes Égyptiens, il souhaite une réelle démocratisation de son pays. Et ne la croit possible qu'avec un autre président à sa tête. Hosni Moubarak, lui, tente d'imposer son fils Gamal.

Nina HUBINET.
Le Caire.Correspondance
jeudi 25 novembre 2010

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