(Afrik.com 24/11/2010)
L’opposition burkinabè est en colère. Dénonçant de graves irrégularités qui ont entaché l’élection présidentielle, elle rejette d’avance les résultats du scrutin, dont la proclamation officielle devrait avoir lieu jeudi (selon les chiffres avancés par le quotidien d’État Sidwaya aujourd’hui, le président sortant Blaise Compaoré aurait obtenu 80,98 % des voix). Elle exige une reprise du vote, avec à la tête de la commission électorale un nouveau président. Au passage, elle descend en flammes les observateurs de la CEDEAO.
La compilation des données à laquelle se livrent les agents de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) serait vaine. Du moins, pour l’opposition burkinabè. Alors que les résultats du scrutin sont attendus pour demain jeudi, quatre candidats de l’opposition, Hama Arba Diallo, Boukary Kaboré dit Le Lion, François O. Kaboré et Me Bénéwendé Sankara, les ont rejetés d’avance. Au cours d’une conférence de presse qu’ils ont animée mardi 23 novembre, à Ouagadougou, ils ont égrainé un chapelet « d’irrégularités graves » qui, de leur avis, « entachent sérieusement la crédibilité et la régularité du scrutin ».
Il s’agit, ont-ils mentionné, entre autres de « l’existence de listes parallèles d’électeurs, de la rétention intentionnelle des cartes nationales d’identité (ndlr : pièce exigée pour le vote) dans certains fiefs de l’opposition, de votes multiples de certains électeurs titulaires de plusieurs cartes en leur nom etc. » Ces manquements, ont-ils relevé, viennent se greffer à l’illégalité de la carte électorale qui a servi pour le scrutin.
Les observateurs de la CEDEAO critiqués
Pour ces raisons donc, l’opposition exige l’annulation et la reprise effective de l’élection présidentielle, avec au préalable l’éviction du président de la CENI, Moussa Michel Tapsoba, accusé d’avoir tout mis en œuvre pour conduire l’opposition à sa perte. « On ne peut pas faire une démocratie au rabais alors que le Burkina Faso donne des leçons de démocratie et de transparence ailleurs. Le peuple burkinabè ne va pas accepter cette gifle », a protesté Me Bénéwendé Sankara.
Mais ces vitupérations seront-elles entendues, alors que les observateurs ont donné un blanc seing au scrutin ? « Ces élections sont crédibles, transparentes et libres, par conséquent elles sont parfaitement valables », avait déclaré, le lendemain des votes, Koffi Sama, le directeur de la commission d’observation de la CEDEAO. Il n’en fallut pas plus pour ulcérer davantage les opposants burkinabè. « Je pense que les observateurs devraient prêter serment de dire la vérité, rien que la vérité. Autrement dit, ils ne servent pas. Dans des pays de la sous-région, des élections ont été menées avec le satisfecit des observateurs nationaux et internationaux. Et il est survenu une grave crise, juste la seconde d’après. Le Burkina Faso n’a pas besoin de ces observateurs-là » a asséné Me Sankara, avant de prendre la CEDEAO au mot. « La CEDEAO recommande que six mois avant une élection majeure, il ne faut pas modifier une loi électorale. Le Burkina l’a fait. Et ce sont les mêmes qui viennent applaudir, nous prenons acte », a ajouté le chef de file de l’opposition burkinabè.
Bien loin de ces récriminations, les partisans de Blaise Compaoré sont à la fête. Leur champion est en tête. Il obtiendrait 80,98 % des voix selon le quotidien d’État Sidwaya, qui s’appuie sur un calcul réalisé à partir des résultats locaux provisoires. Et les cris d’orfraie des opposants ne parviendront pas à leurs oreilles, pas plus que, peut-être, leur plainte portée à la cour constitutionnelle pour une hypothétique reprise du scrutin. Financées à hauteur de 12,5 milliards de francs CFA, on se demande bien quel bailleur de fonds se tiendrait prêt à casquer pour des élections « intègres » au pays des hommes intègres.
De notre correspondant
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