vendredi 1 octobre 2010

Togo - Bientôt le 05 octobre au Togo | Quel bilan 20 ans après ?

(Interview) (Afriscoop 01/10/2010)
Interview exclusive/ M. Ayayi Apedo-Amah, enseignant-chercheur : « Pour sortir de la crise qui est fondamentalement une crise de légitimité du pouvoir, il faut qu’émerge une nouvelle opposition… »
(AfriSCOOP Lomé, Interview exclusive) — Ayayi Togoata Apedo-Amah est enseignant-chercheur dans les Universités togolaises, plus précisément à la Flesh (Faculté des langues et sciences humaines). Il n’aime presque jamais mâcher ses mots. Ses sorties médiatiques font généralement rire ou sourire, mais donnent surtout à réfléchir sur le devenir du Togo. M. Apedo-Amah n’a pas dérogé à cette habitude dans cet entretien qu’il nous a accordé.
Ayayi Togoata Apedo-Amah, le 05 octobre prochain va être célébré le 20ème anniversaire de l’enclenchement de la lutte pour l’avènement d’une véritable ère démocratique au Togo. Quels sont grosso modo les principaux acquis de cette démarche ?
Le 05 octobre 1990 a été dans l’histoire récente du Togo un évènement capital au cours duquel le peuple togolais s’est soulevé contre la dictature minable d’Eyadèma Gnassingbé et du RPT. Le 05 octobre 1990 a été un camouflet cinglant sur le visage d’un tyran qui avait fini par croire que le Togo était son champ de maïs. Le peuple togolais humilié par des conneries comme l’animation, une sorte de gesticulation obscène des reins accompagnée de chants idiots à la gloire du Timonier National, s’est exprimé ce jour-là pour dire à la dictature militaro-fasciste son ras-le-bol, sa volonté de changement pour que le Togo, notre pays, soit enfin gouverné par des dirigeants dignes et compétents. Le 5 octobre 1990, les Togolais voulaient enfin que l’intelligence soit au pouvoir pour affronter les défis du développement et de la démocratie. Ils voulaient devenir les acteurs de leur histoire, c’est-à-dire des citoyens à part entière et non les esclaves de dirigeants incultes et ignares à la moralité douteuse.
Les acquis de la lutte ne sont pas négligeables si l’on prend l’année 1990 comme repère. Que les antidémocrates du RPT le veuillent ou non, la démocratisation du Togo est enclenchée, même si elle est bloquée par des élections frauduleuses dont les présidentielles de 2005 et 2010. Le compte à rebours est enclenché mais je ne saurais vous dire si l’on est à 9 ou 3. Que le clan Gnassingbé soit obligé, malgré les putschs électoraux, d’organiser périodiquement des élections frauduleusement frauduleuses, est symptomatique d’un changement d’époque. Sous le parti unique d’Eyadèma, il n’y avait jamais d’élections, et pluralistes de surcroît. Le fait pour le régime usurpateur de voler les élections est indirectement un hommage à la résistance du peuple togolais qui, malgré les massacres, la stratégie de la terreur, les violations systématiques et massives des droits de l’Homme, continue à dire non, non et non. La liberté d’expression et la liberté de presse sont aussi des acquis du peuple togolais arrachés de haute lutte en dépit de toutes les tentatives scélérates pour les supprimer. La lutte présente du peuple togolais est inséparable de ces deux libertés. Avoir réussi à donner une audience internationale à la lutte de libération du peuple togolais est un acquis très important que les résistants démocrates de l’intérieur et de la diaspora ont offert au Togo par leur travail acharné. La capacité des Togolais à transcender les appartenances partisanes est le fruit de vingt années de combat ponctuées par des trahisons odieuses d’individus sans foi ni lois qui s’étaient fait passer pour des démocrates afin de poignarder le peuple dans le dos. Parmi ces fumiers figurent la plupart des anciens leaders des partis du COD (Collectif de l’opposition démocratique) I et du COD II. C’est si vrai que le fantoche monarchiste Gilchrist Olympio l’a appris à ses dépens lorsqu’il a jeté bas son masque hideux de vil traître pour rejoindre le RPT fasciste. Il a été vomi par les Togolais.
En tant que défenseur des droits de l’Homme, quels sont, à vos yeux, les droits dont les Togolais doivent encore arracher leur respect à leurs gouvernants ?
Ce sont tous les droits fondamentaux qui sont tout le temps bafoués par le régime RPT qui a peur de la jouissance de leurs libertés par les Togolais. Des hommes libres n’ont pas peur de dire la vérité. Or la vérité sur son bilan calamiteux et honteux est la chose dont a le plus peur un régime qui vit dans le mensonge érigé en méthode de gouvernement. La dictature a peur que les gens réfléchissent par eux-mêmes. C’est pourquoi chaque fois qu’une catégorie sociale manifeste ou proteste contre les méfaits du régime rétrograde, celui-ci hurle à la manipulation comme pour dire que ceux qui souffrent d’une politique scélérate et néocolonialiste sont incapables de réfléchir et de réagir par eux-mêmes. Au niveau des femmes, il y a encore beaucoup à dire, car dans bien des domaines, à travers la loi, elles sont encore considérées comme des mineures. Mais les droits les plus visibles pour lesquels les Togolais se battent au prix de leur vie, sont le droit d’élire librement et dans la transparence les dirigeants du pays ; le droit pour les partis politiques d’exercer librement leurs activités ; la liberté de culte, de manifester ; la liberté d’association, etc. Tous ces droits légitimes et reconnus par la Constitution ne seront pleinement reconnus que sous un régime démocratique. Même les droits socio-économiques et culturels sont bafoués : des femmes togolaises continuent à l’heure où je vous parle d’accoucher par terre dans les dispensaires et les hôpitaux. Le 05 octobre 1990 a été un cri séditieux du peuple pour jouir de toutes ses libertés piétinées.
Tout comme dans de nombreux pays francophones d’Afrique, le processus démocratique a été enclenché au Togo dans les années 1990. Qu’est-ce qui, selon vous, empêche profondément la « Terre de nos Aïeux » de s’élever au niveau des modèles démocratiques ouest-africains comme le Ghana, le Sénégal, le Bénin ou encore le Cap-Vert ?
Cela tient tout simplement à la qualité de nos soi-disant dirigeants. C’est en se comparant aux autres que l’on connaît sa propre valeur. Pour son plus grand malheur, le Togo est sous l’emprise d’une médiocratie dont il n’y a pas d’équivalent dans la sous-région. L’absence de patriotisme, l’égoïsme arrogant des médiocres, l’incompétence, la corruption qui génère des milliardaires politico-administratifs, le manque d’humilité, l’inculture, la culture du mensonge et de l’impunité sont autant de tares qui sont à l’origine de la régression du Togo. Quand il arrive, pour le plus grand déshonneur d’un pays, que ce soit les plus médiocres qui tiennent le gouvernail, l’avenir est lugubre, car le bateau ne peut que couler à pic. Et en général, quand il coule, les rats fuient le navire pour aller croquer leurs milliards dans un exil doré. On ne peut pas demander à un animal qui rampe comme le ver de terre de s’élever dans les airs comme un aigle ; c’est impossible. La race de dirigeants dont les Togolais sont affublés ne peut que tirer ce pays vers le bas comme nous le constatons tous avec amertume. Au Togo, la dictature militaire qui est au pouvoir n’a pas encore compris que les temps ont changé et que les mœurs politiques doivent aussi changer. Nous vivons sous un régime politique bâtard et anachronique : un régime à parti unique de fait et qui doit s’accommoder d’un multipartisme qu’il ne supporte pas. Au niveau des exemples africains de démocratie que vous citez, il faut retirer le Sénégal de Wade qui s’est transformé en tyran en vue de préparer une succession héréditaire au pouvoir à travers son fils. Quelle honte qu’un Wade en vienne à singer Eyadèma ! L’Afrique marche décidément sur la tête.
Pourtant, en vingt ans de marchandage politique, les acteurs sociopolitiques togolais ont signé 12 accords politiques !
L’important dans un accord, ce n’est pas la signature, c’est son application. Comment des gens qui n’ont aucune légitimité populaire et institutionnelle peuvent-ils respecter des accords ? Tous les accords entre une dictature et des opposants démocrates ont trait à une diminution de la dictature pour une augmentation de la démocratie. Or toute amélioration de la démocratie est perçue par les antidémocrates comme un danger pour leurs prérogatives et privilèges indus d’usurpateurs. Tout ce qui était négociable à l’amiable a donc été négocié ; maintenant, il ne reste plus qu’à négocier le départ de Faure Gnassingbé et du régime militaire du pouvoir.
Au RPT et dans l’entourage du président Faure Gnassingbé, on estime que la teneur des débats corrosifs qui ont eu lieu au cours de la Conférence Nationale dite « souveraine » explique en partie le maintien du statu quo politique en terre togolaise. Votre lecture de cette interprétation politique ?
Une telle interprétation relève de la lâcheté. C’est comme un bourreau qui mettrait en accusation les cris de son supplicié. Les criminels voulaient-ils des félicitations pour avoir torturé, tué, violé, pillé, menti, ruiné le pays et clochardisé les Togolais ? Et puis quoi encore ? Un bilan est forcément une sorte de procès à charge ou à décharge. C’est l’expression de la mauvaise foi. Si notre Conférence Nationale Souveraine a tourné au vinaigre, le seul responsable en est Eyadèma qui a ordonné à l’armée de quitter la salle parce qu’il avait peur de la démocratie et voulait sauver ses privilèges tout en préservant son impunité. La situation se présentait comme celle d’un locataire (les forces démocratiques) qui voulait modifier l’architecture (le système politique) d’une maison louée (le pouvoir) sans l’accord ou en l’absence de son propriétaire (les FAT, Forces armées togolaises). Il ne faut jamais perdre de vue que le Togo subit une dictature militaire depuis 1967 jusqu’à ce jour. Comment ces individus expliquent les coups de force et le coup d’Etat contre la transition démocratique le 3 décembre 1991 ? Etaient-ce les démocrates qui pilotaient les chars et donnaient l’assaut à la primature ? Et la lâche et barbare prise en otage du Haut Conseil de la République en octobre 1992, ce fut l’œuvre de l’opposition ? Du fait de la culture du mensonge dans lequel baigne la pratique politique du RPT, les antidémocrates sont toujours obligés de justifier l’injustifiable quitte à tordre le cou au bon sens. C’est d’ailleurs pourquoi ils sont la risée de la population.
Depuis l’apparition au grand jour de la guéguerre qui mine l’UFC et l’entrée des proches collaborateurs de Gilchrist Olympio dans l’actuel gouvernement, plusieurs observateurs politiques estiment qu’il n’existe plus d’opposants au régime en place. Etes-vous de cet avis ?
La crise qui annonce l’agonie de l’UFC est symptomatique du fonctionnement antidémocratique de ce parti qui a calqué son fonctionnement sur le RPT d’Eyadèma avec à son sommet un dieu de la terre intouchable, un véritable dictateur qui décide de tout et tout seul, le bureau exécutif n’étant là que pour amuser la galerie. En fuyant lâchement le pays, le poltron Gilchrist Olympio, l’« héritier politique et biologique », a aiguisé l’appétit de ses « employés » du bureau exécutif qui se sont emparés de son fauteuil présidentiel, son instrument pour venger son papa chéri. Le paradoxe dans cette crise, c’est que ce soit Faure Gnassingbé qui épaule Olympio contre ses adversaires avec le concours des forces de l’ordre et des militants du RPT. Tout ce qui se passe au sein de l’UFC aujourd’hui est une bonne chose pour le combat libérateur du peuple togolais : les traîtres jettent leurs masques et présentent leur visage hideux au peuple. Si vous dites qu’il n’y a plus d’opposants à la dictature du clan Gnassingbé, vous faîtes une grave erreur ; il y en a une foultitude à commencer par le peuple togolais. J’en suis un moi-même. Ce ne sont donc pas les opposants qui manquent dans ce pays. Ce qui n’existe plus, c’est une opposition structurée. Presque tous les partis héritiers du COD ont trahi le peuple et doivent être considérés comme des cadavres faisandés que quelques marabouts tentent de réanimer avec des formules cabalistiques tout en demandant des médicaments à la personne responsable des décès. Une nouvelle opposition occupera le vide laissé par les cancres politiques qui ont liquidé la lutte du peuple togolais en allant prendre leurs aises autour de la mangeoire nationale. Tous les ex-leaders de l’ex-opposition ont laissé derrière eux une longue traînée de souillure. Ils ont lapé comme des clébards ce qu’ils ont vomi.
En 20 ans de lutte populaire et démocratique, à qui imputer ce cuisant échec ?
Eliminons d’office les tenants de la dictature, les ennemis du peuple, puisque leur rôle consiste à empêcher le peuple de se libérer de leur oppression et de leur exploitation. Il faut donc se tourner du côté des soi-disant acteurs du changement démocratique, c’est-à-dire les partis politiques et la société civile. Dans les luttes de libération, les erreurs sont souvent nombreuses, parce que liées à des erreurs d’appréciation, d’analyse, à des positions opportunistes, à la corruption, à la trahison, etc. Ce qui favorise ces erreurs sont souvent des écarts par rapport à la ligne politique que l’on s’est donné. Les zigzagues par rapport à la ligne politique perturbent les militants, divisent les équipes dirigeantes et font que les partenaires et les adversaires ne vous prennent pas au sérieux. Le pire consiste à ne pas avoir de ligne du tout. Il faut surtout se donner les moyens de sa politique sous peine de passer pour un rigolo.
La faillite des anciens partis les plus représentatifs de l’opposition comme le CAR, l’UFC et la CDPA tiennent à tous ces facteurs. Je ne fais même pas cas des partis comme la CPP, le PDU, le PDR, l’UDS, le PAD… dont la plupart des dirigeants étaient des taupes infiltrées au sein des forces démocratiques pour servir le RPT.
Le plus grand commun diviseur des forces démocratiques a été la CDPA de Messan Gnininvi. En effet, ce parti, petit par la taille, mais grand dans les magouilles n’a eu de cesse de calomnier les poids lourds de l’opposition en espérant en tirer profit. Au COD II, les leaders devaient se succéder à la tête du collectif par rotation. Une fois que son tour est arrivé, Gnininvi refusa mordicus, en bon dictateur, après le mois réglementaire, de céder la place à Gilchrist Olympio lorsqu’arriva le tour de l’UFC. Grave faute pour un individu qui prétendait représenter les forces démocratiques. Mais pire que cela, Gnininvi et ses acolytes ont constamment manœuvré contre leurs partenaires de l’opposition en manipulant des associations pour agir et s’exprimer à sa place. Se croyant plus rusé que les autres, il s’affubla fièrement du surnom « Araignée », confondant naïvement ruse et intelligence. A cause de ses actions criminelles, conjuguées au double jeu de son grand allié Edem Kodjo de l’UTD/CPP, le traître Gnininvi rendit un énorme service à Eyadèma et au RPT en créant un climat de zizanie et de méfiance au sein des forces démocratiques. Faure Gnassingbé le récompensera pour service rendu en faisant de lui un ministre d’Etat dans son gouvernement RPT où il se conduisit comme un mouton bien apprivoisé. La soupe est bonne, pardi !
Au sein du COD II, il n’y avait pas de ligne mais des états d’âme et un populisme de bas étage qui permettait à toutes les grandes gueules de faire leur one-man-show. Par mesquinerie, certains jaloux faisaient tout pour empêcher le plus populaire d’entre eux, à l’époque, Yawovi Agboyibo du CAR, de prendre la parole. Ils furent chaque fois obligés, ivres de rage, de lui donner la parole sous la pression insistante de la foule lors des meetings. S’il fallait prendre des décisions, quelques clowns, sans avoir réfléchi préalablement, se prononçaient en direct devant la foule, par pure démagogie. Conséquence : le COD II disait tout et le contraire de tout. Pour imposer leurs choix, les partis, au lieu de faire de la pédagogie à travers des débats, recouraient au dénigrement des partenaires, en réalité des adversaires plus combattus que le RPT. Ce tohu-bohu indescriptible augmentait avec la constitution de coalitions farfelues au sein du même COD II pour combattre certains partis désignés comme les adversaires à abattre. Ces coalitions éphémères se faisaient et se défaisaient au bout de deux ou trois mois, voire une semaine en laissant des haines farouches entre anciens alliés, car l’objectif visé consistait à combattre certains tout en essayant sournoisement d’affaiblir ses alliés du moment. Ces collectifs au sein du Collectif de l’Opposition Démocratique (COD) ont été une énorme pagaille, de l’enfantillage. L’essentiel, le changement, était oublié au profit des trouducuteries. Pour écarter coûte que coûte Agboyibo et Olympio, Gnininvi et d’autres minus poussèrent le ridicule jusqu’à faire introniser l’homme de la France, le fondateur du RPT, Edem Kodjo, comme le candidat unique du COD II à l’élection présidentielle de 1993. Ce fut un tollé au sein de la population qui voyait en Kodjo le RPT. L’UFC et le CAR boycottèrent le choix de Kodjo et préconisèrent le boycott de la mascarade électorale sans liste électorale fiable et qui allait être organisée par le ministère de l’Intérieur spécialiste en élections truquées. Le peuple se rallia à la position du CAR et de l’UFC au grand désespoir du tandem RPTiste Kodjo-Gnininvi. Gnininvi n’est pas le seul criminel qui ait sévi dans les rangs des forces démocratiques ; certains zozos ont fait pire que lui, mais nous ne pouvons situer toutes les responsabilités individuelles ici. Nous le signalons parce qu’il a été le premier à foutre le bordel au sein de l’opposition au point d’en faire une ligne politique du chaos. N’ayant qu’un tout petit parti, il avait intérêt, pensait-il, à foutre la merde pour affaiblir les deux grands partis qu’étaient le CAR et l’UFC. Et dire que ce n’était pas pour ces singeries-là que j’ai avancé l’idée de la création du COD lors d’une Assemblée générale de la Ligue Togolaise des Droits de l’Homme, à l’hôtel Sarakawa vers la fin du 1er semestre 1991 ! Voyez aujourd’hui la haine qui existe entre le CAR et l’UFC qui se combattent à mort au cours de chaque campagne électorale en oubliant outrageusement de combattre le RPT ! Les malheurs actuels de l’UFC réjouissent les dirigeants du CAR et des autres partis qui ne font pas partie du FRAC. Ils se croisent les bras, le sourire aux lèvres, et regardent faire tout en espérant secrètement en tirer profit en récupérant le leadership de l’UFC. Le CAR vécut douloureusement la même situation, seul contre tous, au Parlement après sa victoire aux législatives de 1994. Le CAR et l’UFC ont eu le tort de céder à l’arrogance des vainqueurs en considérant leurs partenaires de l’opposition comme des microbes invisibles à leurs pieds. C’est par rapport à ce genre d’attitude que l’UFC-tendance Fabre est obligé de faire bande avec des partis dont les leaders sont tous des dissidents du RPT. Qui l’eût cru ?
Tout cela, bien entendu, est symptomatique de l’absence de ligne politique. C’est de la politique spectacle, des exercices de rhétorique. Dès qu’il sera question de prendre une décision importante imposant le choix d’une ligne politique, tout ce petit monde va imploser en poussant des cris d’orfraie.
Au-delà du combat politique, une réalité s’impose actuellement au Togo. La tenue de la présidentielle du 04 mars 2010 a davantage enfoncé la « Terre de nos Aïeux » dans la crise politique. Au vu des derniers développements de cette crise, quelle solution durable préconisez-vous pour sortir de l’ornière ?
Le problème de ce régime qui oppresse et exploite les Togolais, c’est que ses dirigeants n’ont pas de parole et donc de dignité. Tout le monde se souvient de la promesse du tyran Eyadèma faite en présence de la crapule française Jacques Chirac, en visite au Togo, en 2002 : « Je ne resterai pas une seconde de plus au pouvoir après la fin de mon mandat. Parole de militaire ! » J’avais, à l’époque qualifié cette promesse de « promesse d’ivrogne » et les faits m’ont malheureusement donné raison. En effet, il modifia la Constitution en faisant sauter le verrou du second mandat présidentiel. Pour sortir de la crise togolaise qui est fondamentalement une crise de légitimité du pouvoir, il faut qu’émerge une nouvelle opposition avec de nouveaux leaders pour constituer l’équivalent d’un autre COD afin d’exiger, grâce à une gigantesque mobilisation populaire, le retrait définitif de l’armée togolaise du pouvoir. Si des négociations doivent avoir lieu, elles doivent écarter le RPT ; le seul et unique interlocuteur des forces démocratiques sera l’armée togolaise. Il faudra la persuader de quitter le pouvoir en lui démontrant que son expérience politique a été un échec catastrophique et un malheur pour le pays. En quittant le pouvoir, l’armée devra emporter avec elle dans ses bagages son héritage politique : Faure Gnassingbé qu’elle a installé à la tête de l’Etat le 5 février 2005 contre la volonté du peuple togolais, et le RPT, parti cache-sexe de l’armée, qui devra être dissout purement et simplement.

Interview réalisée par Edem Gadegbeku
par Edem GADEGBEKU
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