(L'Observateur Paalga 07/03/2011)
C’est un DG sûr de lui et très en verve, auréolé de son nouveau statut de ministre des Mines, des Carrières et de l’Energie qui a reçu ses invités au siège du département dans la soirée du vendredi 4 mars 2011. Le menu du jour portait naturellement sur les actuels délestages servis aux abonnés burkinabè par la Nationale de l’électricité. Le jus serait coupé depuis la Côte d’Ivoire, a informé l’initiateur de ce point de presse.
« Les quelques informations obtenues de la Compagnie ivoirienne d’Electricité (CIE) indiquent que l’exploitation du système électrique de la Côte d’Ivoire est actuellement sous contrôle de personnes étrangères à l’entreprise qui a en charge l’exploitation.
Le centre de contrôle et les postes haute tension qui alimentent l’Ouest et le Nord du pays ont été investis par des personnes étrangères à la compagnie et qui ont ordonné la mise hors tension des lignes allant vers le centre, le nord et l’ouest. ».
Telle est l’attaque de la déclaration liminaire, lue par le ministre Salif Kaboré, avant le jeu de questions-réponses et qui a permis de lever tout de même un pan de voile sur les actuelles perturbations électriques au Burkina Faso.
Foi du nouveau ministre des Mines, des Carrières et de l’Energie, pour pallier cette baisse de tension, en plus de la mobilisation de l’ensemble des moyens de production nationale, l’Etat aurait permis à la SONABEL de signer rapidement des contrats avec des entreprises de location de groupes électrogènes pour l’installation de deux centrales de 30 MW et 31 MW, soit une puissance totale de 61 MW. Les premiers mégawatts de ces groupes auraient été injectés sur le réseau depuis le jeudi 3 mars 2011.
Ces groupes loués vont entrer progressivement en service pour résorber le déficit occasionné par l’absence de la ligne d’interconnexion. Les charges financières de cette opération seront supportées par l’Etat et la SONABEL. L’Etat, sur son budget, financera les charges fixes qui s’élèvent à 6,5 milliards de FCFA et la SONABEL les frais de carburant à hauteur de 25 milliards de FCFA.
Ces machines qui joueront au pompier pourraient-elles circonscrire l’incendie aux effets ravageurs ? Ce n’est pas évident et le principal hôte de la soirée n’a pas voulu verser dans le triomphalisme face à des pareilles interrogations.
Ce qui semble sûr cependant, c’est cette information qui n’est pas à même de rassurer ceux qui ne jurent que par Dame électricité : après le FESPACO (le point de presse a eu lieu la veille de la clôture de cette rencontre cinématographique) le programme du délestage pourrait être … respecté à la lettre, dans le temps et dans l’espace. En effet, un plan scindant les clients de Ouagadougou en deux groupes et ceux de Bobo en trois avait été élaboré.
Il connaissait toutefois quelques perturbations en raison de la tenue de la semaine du cinéma à Ouagadougou. Pour le bon déroulement de cette fête, des zones avaient été privilégiées à certaines heures, obligeant ainsi à délester plus longtemps certains quartiers. Quant à l’éventualité d’un rétablissement de l’interconnexion du côté de la Côte d’Ivoire, c’est aussi mystère et boule de gomme.
« L’interruption intervenue depuis le 28 février dernier échappe à tout contrôle de nos techniciens du fait d’une communication presqu’inexistante avec la partie ivoirienne », s’est désolé Salif L. Kaboré, comme pour ajouter au mystère. Les pistes de solution restent donc l’utilisation à plein régime des groupes loués et la remise en service des centrales thermiques qui avaient été mises au repos depuis belle lurette.
Les dégâts collatéraux liés à la situation sociopolitique en Côte d’Ivoire sont donc là, en grandeur nature, même si quelque part le fraîchement nommé ministre n’a pas voulu rentrer dans ce débat politico-politique avec les hommes de médias, malgré leur insistance.
« Par patriotisme, supportez ! »
En effet, beaucoup d’observateurs se sont déjà fait leur opinion. Malgré tout, tentons de dédramatiser en osant cette comparaison : à l’image du commando invisible qui ratisse dans le quartier d’Abobo (Abidjan), des mains invisibles nous coupent le jus.
Avec cet énième problème énergétique, la présence d’un DG à temps plein ne permettrait-il pas de mieux appréhender la situation ? « Ne vous inquiétez pas, un Directeur général sera nommé très bientôt », a rassuré le ministre qui occupe jusque-là ce poste. N’empêche, en matière de distribution électrique, c’est encore parti pour des lendemains incertains.
Si bien que des consommateurs qui ont l’imagination assez fertile ont vite fait d’appeler ces incessantes interruptions « Lamoussa », faisant allusion à qui l’on sait ; lequel a souri face à cette évocation. Ce dernier a imploré toutefois la clémence des Burkinabè face à cette déconvenue électrique qui court-circuite bien des activités.
L’Etat a déjà fait « un grand effort » avec la location des deux groupes, a-t-il fait remarquer par plusieurs fois avant de faire appel à l’esprit patriotique des tous.
Issa K. Barry
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