lundi 10 janvier 2011

Révision constitutionnelle, Menaces de l’opposition : Le ciel ne tombera pas sur la Rdc

(L'Avenir Quotidien 10/01/2011)
*F. Muamba use de manœuvre pour attendre JP Bemba en utilisant le prétexte de la révision constitutionnelle. *Cette position du leader de l’Udps dément l’agitation de l’opposition et relativise les propos du cardinal Monsengwo. *L’esprit de la Constitution, c’est qu’une fois élu, on est président de ceux qui ont voté pour vous, de ceux qui n’ont pas voté pour vous et de ceux qui n’ont pas participé au vote pour une raison ou une autre. *Un élu qui serait mal à l’aise parce qu’il aurait obtenu 20% de suffrages, est contre l’esprit démocratique qui veut qu’il oublie ses électeurs pour se mettre au service de tous.
L’opposition avait choisi de se réunir Dans une certaine opinion congolaise, l’heure serait au retour à l’irresponsabilité. On donne donc l’impression que tout étant réalisé, il faut désormais revenir au Grand Hôtel Kinshasa. Elle s’est finalement retrouvée au Faden Housse. Pendant que Tshisekedi se veut rassurant, François Muamba persiste dans l’erreur. Pour lui, le deuxième tour est un résultat de longue lutte. Ce qui n’est pas vrai.
A la Cns, le combat était pour les suffrages universels. C’était aussi le cas à Sun City. Le scrutin à deux tours n’a jamais été au centre des débats. Le combat contre le régime de Mobutu auquel le leader du Mlc étaient partie prenante était la fin de la dictature. François Muamba ne peut pas nous dire que la dictature n’a pas été vaincue dans ce pays. Bien plus, il fallait qu’arrive Mzée pour que l’on mette fin aux gesticulations politiques. Cette opposition, presque la même, avec le même discours dans une amnésie collective qui frise une irresponsabilité sans pareille, avait tout promis, tout proféré contre Mobutu. Mais le ciel n’est pas tombé sur le Congo. Bien au contraire, c’est la même opposition qui est accouru avec Tshisekedi en tête pour demander à Mzée Kabila d’accepter 5 postes ministériels et laisser Mobutu régner.
L’opposition joue à faire peur. Pour un gouvernement responsable qui se sait dans le droit conforme aux lois du pays, telle démarche, c’est du déjà entendu. On attend que l’opposition oppose les arguments de droit dans un problème de droit en lieu du chantage sans cause. Le malheur de cette opposition c’est de s’octroyer des monopoles. Elle croit avoir le monopole du langage de la rue. Elle doit s’attendre à une réplique sans réserves des partis politiques de la majorité. La vérité c’est qu’à ce jour, l’opposition n’est pas capable de démontrer que la démarche sur la révision constitutionnelle dans le but d’introduire un scrutin présidentiel à un seul tour violerait une quelconque loi du pays. Le Mlc joue sa carte en retardant les élections jusqu’à l’éventuelle libération de JP Bemba. Chacun joue sa partition en utilisant le deuxième tour comme prétexte.
On comprend la peur de l’opposition qui, comme un chien, aboie en croyant faire peur. Si cette opposition est populaire comme on le fait croire, elle devrait être prête à aller aux élections et les gagner quel que soit le nombre de tours à faire. Dans sa déclaration, Etienne Tshisekedi a fait croire que malgré la révision de la Constitution, il battra Joseph Kabila dès le premier tour. Voilà qui doit mettre fin aux débats et permettre au pays d’éviter les dépenses d’un deuxième tour. Cela met également fin à la politique politicienne qui commence à inquiéter. Car, on a amorcé un retour aux années 1990 avec la querelle politicienne essentiellement autour des individus. Il est malheureux de constater que l’on va désormais d’une querelle à une autre avec au bout de la chaîne, une intention manifeste de bloquer la marche politique. La raison est toute simple, revenir à la politique de combines politiciennes. Car, certaines gens ont compris qu’en suivant la marche démocratique, ils ne pourront plus supporter œuvrer loin des loges du pouvoir, de la gestion du pays.
Hier, c’était l’intransigeance sur la composition de la Ceni. Connaissant l’importance de cet organe on est étonné par le silence de cimetière de la part de la société civile, particulièrement des Eglises et des hommes d’Eglise. On comprend en effet que l’opposition étant dans l’erreur en ce qui concerne le respect du critère de neutralité dans le choix des membres du bureau de la Ceni, certains hommes d’Eglises n’osaient prendre position. Le faire dans le sens de soutenir la loi qui exige des personnes indépendantes, serait de la part de ces hommes de Dieu, soutenir le pouvoir. Ce qui serait pour eux un sacrilège. Dans le cas où ils appuyaient l’opposition, ils décevraient la société civile à qui la loi offre les sept postes du bureau de la Ceni. Cette loi, tout en reconnaissant la nécessité de l’indépendance des membres de la Société civile, sait qu’il existe des obédiences qui n’annulent en rien l’indépendance des membres de la société civile. Le problème qui s’est posé, c’est sur le mode de désignation. Qui doit les désigner sans susciter la suspicion des autres. Le pouvoir et la majorité se sont partagés le choix des « indépendants ».
L’échelle d’importance
Pendant que l’on s’est montré aphone sur ce dossier, les Eglises, particulièrement l’Eglise catholique, avec le Cardinal Laurent Monsengwo Pasinya en tête, se jette dans la bataille du dossier de la révision constitutionnelle. Cette échelle d’importance est renversante. En quoi le mode de scrutin est-il plus important que la composition de la Ceni ? Il est pourtant clair que, quel que soit le mode de scrutin, si l’organe organisateur du scrutin n’est pas en mesure de faire son travail en règle, on sera loin de bonnes élections. La question de la composition de la Ceni concerne toutes les élections alors que le mode de scrutin tel qu’on veut le modifier, ne concerne que l’élection présidentielle. C’est une question de quelques hommes. La dose de la politique politicienne est très grande dans cette question. Pas étonnant que les positions prises jusque-là soient essentiellement politiciennes. Alors qu’il s’agit d’une question de droit.
La dose de manipulation avec l’intention manifeste d’orienter l’opinion est aussi grande dans les positions qui ont été prises et souvent à dessein. C’est ainsi par exemple qu’à ce jour, bien que plus d’un politicien aient donné leur avis, seul l’avis du cardinal Monsengwo est brandi comme la preuve de la « mauvaisure » de la majorité. Le cardinal le savait. Et c’est pour cette raison qu’il a décidé de parler. Le cardinal sait également que ce qu’il a dit n’est pas une vérité absolue. On peut même dire que ce n’est pas la vérité. Son avis est totalement faux au regard des expériences, même dans de vieilles démocraties et suivant même sa propre logique.
La définition de la légitimité
Le Cardinal Monsengwo voulait toucher la corde sensible en démontrant qu’une élection à un tour amènerait fatalement à un président illégitime. On connaît la charge émotive que les Congolais mettent dans ce vocable « illégitime ». C’est ainsi que le cardinal met la barre très bas. Il parle d’un président qui pourrait être élu avec 20%. Il ignore éperdument la récente expérience congolaise de 2006. Avec 33 candidats, le mieux placé avait recueilli 44% des suffrages exprimés. S’il ne voulait pas manipulateur, il aurait pris cet exemple que les Congolais ont vécu.
Le cardinal pouvait nous répliquer en disant qu’il ne s’agissait que d’une hypothèse de travail. Elle n’est malheureusement pas gratuite. On pouvait en douter si la suite du point de vue du cardinal n’était pas un parti pris tout nu. Lorsque le cardinal évoque les raisons avancées par le gouvernement et les rejette sans moindre nuance, il prend une position politique dans un débat politique. Le ministre de la Communication et Médias a pleinement raison d’avoir entendu parler un militant et non un cardinal, responsable d’une « Eglise au milieu du village ». C’est son droit en tant que Congolais de choisir son camp. Mais, ce n’est pas du tout orthodoxe d’engager sa qualité de cardinal. On sait qu’il est difficile de séparer le politique Monsengwo du cardinal Monsengwo. Avec un peu d’honnêteté intellectuelle, il pouvait circonscrire le cadre de son adresse. Malheureusement, on a eu un cardinal qui voulait apporter un démenti sur les intentions qui ont été prêtées dans son homélie à l’occasion de sa première messe comme cardinal au Stade des Martyrs de la Pentecôte. Le Monsengwo politique en a profité pour donner un avis politique. Cela gêne les catholiques qui ne sont pas obligés d’être de son bord politique.
La logique interne de l’avis du cardinal
Pour revenir à la logique interne de son propos, il y a lieu de faire remarquer que le cardinal n’a pas raison. Selon lui, la légitimité d’un « élu » résiderait dans le nombre de personnes qui ont porté le choix sur lui. Tant que ce nombre est grand, tant la légitimité est grande (sic). Selon cette logique, s’il y a 10 personnes pour élire un président, si 9 votent pour lui, il est légitime. On peut poser au cardinal la question de savoir cette légitimité, c’est par rapport aux 10 électeurs ou par rapport à la population que ce président dirigera ? On peut aussi lui poser la question de savoir, dans le cas où il ne serait élu que par deux personnes, il serait mal à l’aise par rapport aux dix électeurs ou par rapport à toute la population. Ce flou était voulu dans la mesure où pour bien manipuler la population, il faut entretenir la confusion. Nous osons croire que le cardinal situe la légitimité par rapport à la population du pays. Si tel n’était pas le cas, il ferait croire que le président élu serait le président du corps des électeurs. Nous osons croire également que le mal élu serait mal à l’aise par rapport à la population et non par rapport au corps des électeurs.
Et si le cardinal s’était trompé ?
Partant de cette précision, on veut faire remarquer que le cardinal s’était trompé pour ne pas dire il a menti. Dans une démocratie, l’esprit de la loi, c’est que l’élu devient le président de tout le monde. En ce moment-là, la légitimité s’obtient en échange des aspirations et non du nombre des suffrages obtenus. Je suis paysan du Kivu, mon aspiration est la paix. J’accorde ma légitimité au président qui m’aidé à avoir cette paix et non à celui qui a eu un grand nombre de suffrages.
Il serait superflu que la population continue à juger un président tout au long de son mandat par rapport aux suffrages qu’il avait obtenus. Ce serait démentir le sacro-saint principe selon lequel une fois élu, un président devient président de ceux qui ont voté pour lui, de ceux qui n’ont pas voté pour lui et de ceux qui n’ont pas participé au vote pour une raison ou une autre. Si par contre, ce président se met mal à l’aise parce qu’il aurait été élu par 20%, c’est qu’il ne se met pas dans la peau de président de tout le monde. Sauf respect dû à cette imminente personnalité de notre pays, honnêtement, le cardinal a faussé « l’esprit de la loi » en matière de la démocratie représentative.
Les exemples vécus ailleurs
Les exemples dans le monde le démontrent. Aux Usa, une vieille démocratie, en 2000, Albert Gore avait obtenu 48,4% contre 47,9% à George Bush. Ce dernier a été élu par les Grands électeurs. Qui peut dire qu’en dépit de la polémique, Bush se sentirait mal à l’aise tout au long de son mandat ?
Au Canada, une autre vieille démocratie, Stephen Harper du parti conservateur avait obtenu en 2008 39% contre 24,6 % à Stephan Dion. Nous n’avons appris nulle part qu’il se sentirait mal à l’aise dans sa peau de Premier ministre. On peut en dire autant de la Grande Bretagne, une très vieille démocratie. En 2010, David Cameron du parti conservateur avait été élu avec 36,1% contre le travailliste Gordon Brawn avec 29%. On ne peut pas dire que le Saint Père qui est élu par une poignée de cardinaux, manquerait de légitimité par rapport à des millions de fidèles catholiques à travers le monde.
Devant ces évidences, on dira qu’il ne faut pas comparer. Peut-être. Mais pour quelle raison faire croire au peuple congolais que le scrutin à un seul tour serait un péché démocratique. La démocratie et les élections ne sont pas une invention congolaise. C’est le côté manipulateur du point de vue du cardinal. Cette attitude est très dangereuse. On peut bien vouloir se couvrir derrière la neutralité qu’exigent les fonctions occupées, on se met dans la position du singe qui, en montant haut, dévoile sa nudité. Notre avis est qu’on n’avait même pas besoin du cardinal dans ce débat où les politiciens n’avaient pas vidé leurs cartouches. Il est intervenu précipitamment en donnant l’impression de courir au secours de l’opposition.

Joachim Diana G.
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1 commentaire:

  1. A l'absence d'une société civile digne,il est inutile de vider vos cartouches sur le cardinal, qui du reste n'est intervenu sur le principe et non sur le fait.Balancez nous bien des exemples de démocratie avancées qui sont inadaptées chez nous, mais nous qui sommes sur place, si ce n'est pas l'exemple tunisien qu'on va suivre...

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