INTERVIEW - Richard Banegas, maître de conférences à l'Université Paris-I Panthéon-Sorbonne et chercheur au Centre d'études des mondes africains (Cemaf), fait le point sur la situation...
Le Premier ministre kényan a annoncé mercredi l'échec de la mission de médiation de l'Union africaine en Côte d'Ivoire pour résoudre la crise née de l'élection présidentielle du 28 novembre. Finalement, au fil des semaines, il semble que Laurent Gbagbo ait réussi à maintenir un statu quo en sa faveur…
Tout à fait. C’est ce qui se dessinait dès le déclenchement du second tour par Laurent Gbagbo contre Alassane Ouattara aux lendemains des élections du 28 novembre. Et, rien, malgré les sanctions financières et les menaces de poursuites devant la Cour pénale internationale (CPI) , rien, ne semble pouvoir le faire partir. Jamais des sanctions financières n’ont fait tomber aucun régime. Et de toute façon, Gbagbo est en mesure de se maintenir, notamment grâce aux richesses du pays (Cacao, notamment), à l’armée qu’il a organisée à sa solde ces dix dernières années, aux administrations, etc.
Quels moyens y aurait-il de déloger Gbagbo?
Une intervention militaire quelle qu’elle soit aurait un effet désastreux. En outre, le fait qu'Alassane Ouattara, sans cesse présenté comme le candidat de l’extérieur par Gbagbo, soit porté au pouvoir par l'armée risquerait d’être politiquement désastreux pour lui.
Ouattara a-t-il commis des erreurs?
Il a sans doute raté le coche en termes de mobilisation politique et sociale, aux lendemains de l’élection. Même si, évidemment, la situation est extrêmement complexe tant pour lui que pour ses militants, en termes de sécurité… A vrai dire, la seule variable qui pourrait changer la donne, ce serait que les Forces nouvelles, sans doute seules à même de modifier le rapport de force, interviennent.
Est-ce que la communauté internationale a fait ce qu’il fallait?
D’emblée, la communauté internationale a affirmé son soutien à Ouattara, mais, finalement, de façon si unanime, que, paradoxalement, cela ne l’a peut-être pas aidé à prendre la mesure de son incapacité sur le plan politique interne.
Est-ce que la situation pourrait dégénérer en guerre civile?
Une reprise du conflit n’est pas impossible, bien sûr. Mais, pour l’instant, ce que l’on voit poindre, ce sont surtout des guérillas urbaines comme dans le quartier d’Abobo à Abidjan, la semaine dernière. Et c’est dans les milieux urbains comme à Abidjan, où les milices et les mouvements de jeunesse sont implantés et puissants, que les choses pourraient dangereusement dégénérer. Mais ce n’est pas le seul scénario. Une négociation n’est pas à exclure. Auparavant, Gbagbo a déjà montré qu’il pouvait négocier, notamment, à Marcoussis, en 2003 et surtout à Ouagadougou en 2002.
Propos recueillis Armelle Le Goff
20minutes.fr/
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