(Xinhuanet 12/12/2011)
YAOUNDE -- Le nouveau gouvernement camerounais, formé vendredi par le président Paul Biya à la suite de sa réélection lors de l'élection présidentielle tenue le 9 octobre, a été installé dans sa quasi-totalité samedi à Yaoundé.
C'est le Premier ministre Philemon Yang, reconduit lui-même à cette fonction, qui a mené cette valse des installations. Cette opération express relève d'une tradition politique de plus en plus observée au Cemeroun après la formation d'une nouvelle équipe gouvernementale.
Mais, pour ce cabinet qui inaugure le nouveau septennat de Paul Biya, son avènement intervient la veille de la finale de l'édition 2011 de la Coupe du Cameroun de football que le dirigeant préside ce dimanche, entouré de son gouvernement.
Le nouveau ministre des Sports et de l'Education physique, Adoum Garoua, précédemment en charge du portefeuille de la Jeunesse, a été le premier à prendre ses fonctions samedi. Ce qui lui permettait de procéder aux réglages nécessaires pour le bon déroulement de la rencontre de ce dimanche qui clôture généralement une saison sportive finissante et en ouvre une nouvelle.
La boucle sera bouclée dimanche matin par l'entrée en fonction du nouveau ministre des Relations extérieures, Pierre Moukoko Mbonjo, qui signe un come-back après avoir été écarté du ministère de la Communication en septembre 2007 où, alors directeur de cabinet du Premier ministre, à l'époque Ephraïm Inoni, il a été promu au terme de la présidentielle d'octobre 2004.
Le passage à témoin se fera avec Henri Eyebé Ayissi, affecté au Contrôle supérieur de l'Etat, un département qui, croient savoir les observateurs, répond au profil d'inspecteur d'Etat de cet ex- ministre de l'Urbanisme et de l'Habitat et ex-inspecteur général chargé des élections au ministère de l'Administration territoriale et de la Décentralisation aux côtés de Hamidou Yaya Marafa.
Ancien secrétaire général de la présidence de la République, Marafa n'a pas la même chance de ses collègues qui arborent le sourire d'heureux élus au maintien au poste. Cité dans une transaction jugée douteuse pour une acquisition non opérée d'un avion présidentiel, un dossier pour lequel d'autres responsables camerounais font face à la justice, sa mise à la touche sonne comme un présage de mauvais augure, s'accordent à dire les observateurs.
C'est le cas aussi du ministre des Travaux publics, Bernard Messengue Avom, indexé par un rapport de la Commission nationale anti-corruption (CONAC). Pour le remplacer, le président Biya a fait appel à Patrice Amba Salla, maire d'Ayos, une commune de la région du Centre.
Très attendu du peuple camerounais, le nouveau gouvernement a finalement créé peu de surprises. Le grand chamboulement escompté pour fixer le cap de la politique des "grandes réalisations" annoncée par le chef de l'Etat réélu après 29 ans de magistrature suprême comme un chantier d'envergure destiné à inscrire le Cameroun au rang des pays émergents au cours des prochaines années, n'a pas eu lieu.
Sur une soixantaine de membres du cabinet Yang, mis à part Marafa et Messengue Avom, seuls perdent également leurs postes, Jean-Baptiste Béléoken des Domaines et des Affaires étrangères, Michael Ngako de l'Energie et de l'Eau, Clobert Tchatat du Développement urbain et de l'Habitat, Baba Hamadou du Tourisme, Siegfried David Etame Massoma du Contrôle supérieur de l'Etat, Badel Ndanga Ndinga des Mines, de l'Industrie et du Développement technologique, Michel Zoah des Sports et de l'Education physique puis Elvis Ngolle Ngolle des Forêts et de la Faune.
"Moi je crois que les vrais changements interviendront après les élections (législatives et municipales couplées, et peut-être même aussi les sénatoriales pour la mise en place longtemps de la Chambre haute du Parlement, ndlr) de l'année prochaine", a tenté de d'analyser à Xinhua le politologue Joseph Vincent Ntuda Ebodé, vice-doyen de la faculté des sciences politiques et juridiques de l'Université de Yaoundé II.
Dans les couloirs du pouvoir lui-même, il est plutôt fait état d'un jeu de chaises musicales à caractère purement politique. Ainsi, la mutation de Louis Paul Motaze, anciennement directeur général de la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS), du ministère de l'Economie, de la Planification et de l'Aménagement du territoire pour le secrétariat général des services du Premier ministre est décrite comme une étape préparatoire à des responsabilités plus importantes.
Le même lecture est faite dans le sens d'une mise en condition du départ de René Emmanuel Sadi, considéré comme un potentiel dauphin de Paul Biya, du secrétariat général du comité central du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC, au pouvoir) pour le ministère de l'Administration territoriale et de la Décentralisation. Lui succède, Jean Nkueté, précédemment vice- Premier ministre, ministre de l'Agriculture et du Développement rural.
Ce secteur sera désormais animé par le ministre sortant des Finances, Essimi Menye, jugé par les observateurs comme chargé de mission pour booster la production agricole qui donne des soucis ces dernières années et sur laquelle pourtant le leader camerounais mise comme un important vecteur du développement économique de ce pays d'Afrique centrale.
Annoncé à un poste ardemment réclamé par l'élite politique du Grand-Nord du Cameroun mais pour lequel en revanche il aurait longtemps décliné l'offre, le nouvel argentier Alamine Ousmane Mey, directeur général de la banque commerciale camerounaise Afriland First Bank, devrait pouvoir mettre en confiance le secteur privé en vue de la mobilisation de l'épargne privée au profit du financement de l'économie nationale, dont penser des sources proches du pouvoir.
A l'Economie, Emmanuel Nganou Djoumessi, qui officiait dans les services du Premier ministre comme secrétaire général adjoint, a la charge de mettre ses compétences en oeuvre pour la réussite des grands projets d'investissement en cours d'exécution.
Autres ministres en mission, Abba Sadou pour la transparence dans les marchés publics à la tête d'un département nouvellement créé, et Laurent Esso, descendu du secrétariat général de la présidence de la République (où il a été remplacé par le "jeune" Ferdinand Ngoh Ngoh, précédemment secrétaire général du ministère des Relations extérieures) pour la Justice afin de mettre en place, en sa qualité de magistrat, le tribunal spécial criminel fraîchement créé pour juger des gestionnaires indélicats des fonds publics.
Bien dans leur peau, les femmes sont les seules à conserver, parmi la soixantaine de membres du cabinet conduit par Philemon Yang, dont 32 ministres, 10 ministres délégués et 9 secrétaires d' Etat, la confiance de Paul Biya. Aucune n'a été écartée, et même leur nombre a augmenté de 6 à 9. Un symbole, tout comme la nomination comme ambassadeur itinérant d'Ahidjo Mohamadou, maire de Garoua (Nord) et fils de l'ancien président Ahmadou Ahidjo dont les restes reposent à Dakar au Sénégal.
Par Raphaël MVOGO
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