(Le Pays 26/05/2010)
Le président de la Haute autorité de transition malgache, Andrey Rajoelina, alias TGV, vient, une fois de plus, de remanier son gouvernement. Dix nouveaux ministres, dont cinq militaires, ont fait leur entrée dans ce deuxième gouvernement du premier ministre Camille Vital, un général de l’armée malgache.
Ce remaniement consacre la mise en place du gouvernement neutre promis par TGV après l’échec, en fin avril en Afrique du Sud, des pourparlers pour un partage du pouvoir avec les mouvances des anciens chefs d’Etat. TGV avait jeté son dévolu sur les militaires, ceux qui l’ont vraiment fait roi, pour les convaincre d’entrer dans le gouvernement qu’il voulait former. Il a su parvenir à ses fins aujourd’hui, même si le nombre de portefeuilles octroyé est en deçà de ce qu’il avait proposé aux militaires. Mais l’entrée des 5 militaires dans le gouvernement est même une surprise.
En effet, elle intervient dans un contexte de tension au sein de la grande muette. L’illustration parfaite de cet état de fait est la rébellion de la gendarmerie, officiellement pour des primes détournées par la hiérarchie. TGV que l’on disait en sursis, a repris la main pour le moment. Néanmoins, on se demande pendant combien de temps durera la situation. Des militaires son entrés dans le gouvernement sans que l’on ne soit certain que cela mettra définitivement fin à la crise au sein de l’armée. D’ailleurs, tout le monde approuve-t-il cette entrée au gouvernement ? Les divisions étant loin d’être terminées, les militaires appelés au gouvernement sont loin d’être représentatifs de toute l’armée.
Les gages qu’ils ont dû donner au chef de l’Etat n’engagent que leur personne et ceux qui les ont conseillés de monter à la soupe. On ne sait pas ce que ces militaires qui ne se sentent pas liés par un quelconque pacte pourraient faire de mieux. D’ailleurs on se demande comment elle pourrait fondamentalement changer parce que la solution à la crise ne réside pas forcément dans les changements, les remaniements de gouvernement.
On ne touche pas au coeur du vrai problème qui est l’entêtement et la démarche unilatéraliste et solitaire de Rajoelina. Le jeune président a oculté les adversaires qui comptent et veut résoudre tout seul la crise. Or cela est manifestement impossible. Il se berce d’illusions en se considérant comme celui qui détient la clé de la sortie de crise. Si c’était le cas, sa déclaration de ne pas se présenter à la présidentielle prévue en novembre 2010 conformément à sa feuille de route, aurait déjà décanté la situation. Malheureusement, il n’en a rien été. Ce fut un non- événement et encore une occasion de crispation avec l’interdiction qu’il a faite aux anciens présidents de ne pas être non plus candidats à la même élection alors qu’il n’est ni une Cour constitutionnelle, ni une Commission électorale nationale indépendante.
En décidant de n’écouter personne, TGV a du mal à proposer des solutions acceptables par tous et qui soient à même de sortir la Grande île du tumulte. En s’enfermant également sur lui, il ne réalise plus qu’il est lui-même le problème et non la solution. " Le chien ne sent pas l’odeur de sa tête", dit un proverbe. Malheureusement, il n’y a pas quelqu’un pour faire entendre raison à l’ancien maire d’Antananarive, pour lui dire qu’il fait fausse route.
Pas même certains de ses soutiens extérieurs qui ont récemment applaudi à tout rompre sa dernière décision de ne pas être candidat à la prochaine présidentielle. TGV doit savoir que ce qu’il a proposé jusque-là comme solution de sortie de crise n’est en fait qu’une fuite en avant permanente. Les changements de gouvernements auxquels il se livre avec frénésie ne sont en fait que du replâtrage. Si c’était cela la solution, il y a bien longtemps que la crise qui agite l’île serait un mauvais souvenir.
Séni DABO
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