(Radio Canada 05/05/2010)
Henri Jean-Claude Seyoboka, un ancien militaire rwandais menacé d'expulsion, a remporté une importante victoire judiciaire dans la bataille qu'il mène afin de pouvoir rester au Canada. La Cour fédérale du Canada a en effet ordonné, mardi, à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada (CISR) de l'entendre à nouveau.
L'homme, qui réside actuellement à Gatineau, s'était déjà fait dire à six reprises, lors de procédures judiciaires et administratives, qu'il ne pouvait plus bénéficier de la protection accordée aux réfugiés que le Canada lui avait accordée en 1996.
D'origine à la fois hutue et tutsie, cet ancien sous-lieutenant de l'armée rwandaise s'est vu retirer son statut de réfugié en 2005. La raison : lors de son arrivée au pays, il n'avait pas précisé qu'il avait été militaire au moment du génocide rwandais.
La CISR avait notamment fondé sa décision sur les déclarations d'un témoin ayant comparu devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) et sur des documents présentés devant la même cour.
Lors du procès du colonel Théoneste Bagosora, condamné à perpétuité par le TPIR pour génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre, un témoin a affirmé en cour que Henri Jean-Claude Seyoboka avait tué une femme parce qu'elle refusait d'avoir des relations sexuelles avec lui.
Des documents présentés devant le tribunal invoquaient en outre sa présence aux côtés d'autres militaires et de miliciens hutus sur les lieux d'un barrage où avaient été tués des Tutsis, en 1994.
M. Seyoboka avait tenté de faire renverser la décision de la CISR, invoquant le fait qu'elle avait écarté des témoignages le disculpant et que, dans son jugement final, le TPIR concluait que les éléments l'incriminant n'étaient pas suffisamment crédibles ou n'avaient pas été prouvés.
Estimant qu'elle n'avait pas la compétence pour rouvrir la procédure, la CISR avait refusé de considérer de nouveaux éléments lui permettant de clarifier son passé militaire. Elle avait du même coup refusé de revenir sur son jugement qui l'avait privé de son statut de réfugié.
Or, dans sa décision, le juge James O'Oreilly de la Cour fédérale écrit que la CISR était en mesure se pencher sur les nouveaux éléments, puisqu'il y avait eu « violation des principes de justice naturelle ».
La requête présentée par le gouvernement fédéral, en 2005, a précédé de quelques mois l'arrestation, au Canada, du Rwandais Désiré Munyaneza. En mai 2009, il a été reconnu coupable de sept chefs d'accusation de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et de génocide commis au Rwanda en 1994. Il a été condamné à la prison à perpétuité, sans possibilité de libération avant 25 ans.
C'était le premier procès pour crimes contre l'humanité à se dérouler au Canada.
Selon les Nations unies, le génocide rwandais a fait environ 800 000 victimes, des Tutsis et Hutus modérés, en plus de forcer 4 millions de Rwandais à fuir vers les pays voisins.
Radio-Canada.ca avec
Agence France Presse
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