mercredi 3 mars 2010

Congo - Mathias Dzon : " Les gens souffrent trop, il n y a plus rien à manger "

(Mwinda 03/03/2010)
Mathias Dzon, ancien ministre des Finances et un des leaders de l'opposition congolaise, au micro de François Bikindou.
Sans langue de bois il aborde les questions de l'achat, par le Congo, d'armes de guerre à la Corée du Nord en violation de l'embargo de l'Onu, du harcèlement judiciaire de l'opposition par le pouvoir, de la misère sociale au Congo, de la corruption des dirigeants syndicaux...
Dzon se défend contre contre l’accusation de léthargie de l’opposition qu'on lui fait. L'opposition, dit-il, a récemment organisé des manifestations, des points de presse, adressé un message aux populations, évoqué les questions sociales...
Sur les poursuites judicaires dont sont victimes les membres de l’opposition il considère que le pouvoir les « conçoit comme une épée de Damoclès pesant sur la tête des opposants. Ils sortent les dossiers, ils les rangent » à leur gré, s’insurge-t-il.
Et l’opposant de poursuivre, en expliquant la raison pour laquelle il ne voyage plus à l’étranger.
« Moi, je disposerais d’une milice et des armes de guerre, voilà ce qu’on dit, donc le motif préfabriqué par le pouvoir c’est celui-là. Je suis inculpé devant le TGI de Brazzaville et tant que je n’ai pas liquidé ce dossier là je crois qu’il est utile d’être sur place que d’être surpris par un procès derrière moi et d’une condamnation par défaut (….) Ce procès a été fabriqué de toutes pièces et de là qu’il dise qu’il est condamné par défaut parce que je suis loin de Brazzaville…. »
Sur la violation par le Congo de l’embargo sur l’importation des armes de Corée du Nord
« Nous, nous l’avons dénoncé bien avant (…) Rappelez-vous, à la dernière convention que nous avons tenue après les élections de juillet 2009, nous avons dénoncé l’achat massif d’armes de guerre par Denis Sassou Nguesso en provenance de Corée, de Chine et de Singapour. Nous avons donné même le type d’armes, mais la presse internationale n’a pas réagi. Ce qui s’est passé en Afrique du sud n’est qu’une confirmation de ce que nous avons déjà dénoncé. Et ce que nous avions affirmé c’était avec certitude ! Non seulement les armes ont été livrées mais au Congo tout le monde a vu des caisses et des caisses aller dans des camions vers Oyo avec ces armes là ! ».

Sur les élections
« L’opposition veut des élections transparentes », que « les médias de l’Etat ne soient pas réservés au pouvoir, que les élections soient préparées sur des bases nouvelles avec une commission électorale indépendante ».
Dzon entre Jacques toubon et Patrick Gaubert
A la remarque que cette demande de l’opposition n’avait pas été entendue par le pouvoir Dzon répond que le peuple l’avait entendue puisqu’il s’est abstenu d’aller voter à 95 % mais le pouvoir s’est entêté.
Selon un rapport du Programme alimentaire mondial (PAM) 41 % de Congolais sont sous alimentés on lui demande si cela l’étonne-t-il
« Pas du tout ! Même pour ceux qui travaillent pour des salaires de misère qu’on leur propose (l’inflation, le coût de la vie), les gens n’ont plus les moyens de vivre ! Est-ce que vous savez qu’il y a des Congolais qui vont au marché avec 1 000 FCFA ? [1,52 euro, ndlr] Un manioc coûte 1 200 FCFA. Je pense que le rapport du PAM est même large, je pense que le pourcentage est même plus important que ça ! Les gens souffrent trop, il n’y a plus rien à manger avec ces salaires de misère, il y a le chômage, il n’y a strictement rien ici alors que nous avons une situation publique financière qui est florissante avec une production pétrolière record. 137 millions de barils par an c’est beaucoup pour arroser les Congolais ! Alors les nantis vivent bien et ceux qui ne sont pas nantis continuent de souffrir ».
Sur les négociations syndicales à propos du gel des salaires
« La base des syndicats attend énormément des négociations mais les directions syndicales sont corrompues. A la tête des syndicats vous avez des retraités qu’on a mis là qui sont arrosés par le pouvoir et qui ne sont pas capables de défendre jusqu’au bout les revendications des travailleurs.
Alors ça piétine ! Le pouvoir a promis qu’en 2010 il devait améliorer la situation des travailleurs. Maintenant on a trouvé des subterfuges : il faut attendre le point d’achèvement ; et quand le point d’achèvement est arrivé le pouvoir se rebiffe pour dire que le point d’achèvement n’a pas apporté l’argent, on ne peut rien faire pour vous. Pendant ce temps on prévoit de fêter avec faste le cinquantenaire. Alors qu’est ce qu’il faut ? Que les gens mangent, se soignent ou qu’ils fassent une grande fête ? »

François Bikindou
© Copyright Mwinda

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