Les Togolais doivent élire samedi leur prochain président. Le chef de l'Etat sortant, Faure Gnassingbé, au pouvoir depuis 2005, part favori face à une opposition divisée présentant quatre candidats.
Voici cinq clés pour mieux comprendre cette élection.
- UN HERITIER CONTRE UNE OPPOSITION DIVISEE
"Grand argentier" du général Gnassignbé Eyadéma, qui a régné en maître sur le pays pendant 38 ans, et à qui il a succédé il y a dix ans, Faure Gnassingbé est aussi réservé que son père était exubérant.
Ses signes d'ouverture --multipartisme, liberté de la presse, abolition de la peine de mort-- ont poussé la communauté internationale à lever les sanctions instaurées en 1993 pour "déficit démocratique".
Il reste toutefois l'héritier du général et tous les rouages de l'Etat lui sont acquis. Il est aussi favorisé par la présidentielle à un tour, qui dessert l'opposition divisée présentant quatre candidats.
Son principal adversaire, Jean-Pierre Fabre, du CAP 2015 (Combat pour l'alternance politique), a une personnalité peu consensuelle selon les observateurs.
Le deuxième parti de l'opposition, le Comité d'action pour le renouveau (CAR), a prôné le boycott, estimant la présidentielle non crédible tant qu'elle sera à un tour et que le nombre de mandats présidentiels ne sera pas limité.
- CREDIBILITE DU SCRUTIN
Plusieurs milliers d'observateurs doivent être déployés samedi: 1.200 pour la Concertation nationale de la société civile (CNSC, une ONG togolaise), 50 pour l'Union africaine, 100 pour la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), 800 pour le Haut commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme, ainsi que d'autres associations locales.
Les divers candidats disposeront également, en théorie, d'observateurs de leurs partis dans les bureaux de vote.
Le fichier électoral, contesté car comportant des doublons et des personnes décédées, a été rectifié. L'opposition s'est dite satisfaite.
La dernière présidentielle, remportée en 2010 par M. Gnassingbé avec 60,88% des suffrages contre 33,93% à son principal opposant --déjà M.Fabre, avait été jugée acceptable par la communauté internationale, mais elle les résultats avaient été contestés par l'opposition.
Cette année encore, l'opposition accuse le régime de vouloir frauder au moment du décompte des bulletins, notamment dans les zones rurales où l'opposition ne pourra pas être partout présente.
- LE POIDS DE L'ARMEE
Si l'opposition gagne, l'armée, pilier du régime, dont les officiers viennent surtout du Nord, la région d'origine des Gnassingbé, acceptera-t-elle une alternance politique?
L'analyste politique togolais David Ihou en doute: "On a peur que si quelqu'un du Sud gagne", comme Jean-Pierre Fabre, "l'armée ne l'accepte pas".
La CNSC partage ces inquiétudes. Les forces de sécurité, qui ne pèsent que 20.000 voix, ont voté par anticipation jeudi, et certains pourraient être tentés de revoter frauduleusement samedi, estime l'ONG.
Le général Eyadéma, arrivé au pouvoir en 1967 par un coup d'Etat, s'était maintenu à la tête de l'Etat avec le soutien indéfectible de l'armée. Qui a porté le fils au pouvoir au décès du père.
- LES RISQUES DE VIOLENCES
La Cédéao a rappelé, cette semaine, que "tous les candidats (...) doivent être prêts à accepter les résultats", pour prévenir des violences potentielles.
Les clashes post-électoraux qui ont éclaté au lendemain de la présidentielle de 2005, la première remportée par Faure Gnassingbé, entachée de fraudes massives, avaient fait 400 à 500 morts et des milliers de blessés, selon l'ONU.
Cette année, "les gens ne sont plus dans l'optique des violences. Beaucoup se disent +Tous ces morts, ils sont morts pourquoi?+. Aucun candidat n'a parlé des morts. Et le régime est beaucoup moins violent" que celui du général Eyadéma, estime M. Ihou.
- UNE POPULATION LASSEE PAR LA POLITIQUE
De l'avis général, la campagne électorale, plutôt bon enfant, n'a pas passionné les Togolais, échaudés par l'abandon des réformes électorales.
Les candidats ont sillonné l'intérieur du pays, délaissant la capitale (acquise à l'opposition) et organisant des meetings dans les campagnes.
Mais "la population togolaise est un peu lassée, désorientée par les hommes politiques togolais. On a une piètre classe politique en général", assène M.Ihou.
Par Marc BASTIA
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