L’opposition burundaise a rejeté ce matin le nouveau calendrier proposé par la commission électorale pour les législatives et la présidentielle au Burundi et posé plusieurs conditions à l’organisation des scrutins. Charles Nditije, un des dirigeants de l’opposition, a notamment réclamé l’établissement d’une nouvelle Commission électorale nationale indépendante (Céni), dont deux des cinq membres ont démissionné et quitté le pays. On peut raisonnablement affirmer que c’est une Céni totalement affaiblie qui s’est lancée dans une fuite en avant en annonçant déjà une présidentielle le 15 juillet sans avoir procédé au remplacement de ses deux démissionnaires. Charles Nditije a également exigé le désarmement des Imbonerakure –les jeunes du parti au pouvoir– et l’abandon par le Président, Pierre Nkurunziza, de sa volonté de briguer un troisième mandat, au cœur de la crise qui touche le Burundi depuis fin avril. «On ne peut pas organiser des élections aujourd’hui si on ne s’assoit pas ensemble pour négocier la mise en place d’une nouvelle Céni, si on ne se met pas ensemble pour négocier les conditions politico-sécuritaires de la tenue des élections, si on ne désarme pas les Imbonerakure, si Nkurunziza ne renonce pas à son troisième mandat», a-t-il affirmé à l’Agence France-Presse.

«Mascarade»

Charles Nditije ajoute : «Les conditions ne sont pas là, donc il n’y aura pas d’élections qui puissent être crédibles et donner des résultats acceptables pour la population. […] Si les choses restent en l’état, nous considérons que ça sera une mascarade, une parodie d’élections et l’opposition n’y répondra pas». Charles Nditije s’exprimait quelques heures après que la Céni eut proposé lundi soir d’organiser le 26 juin les législatives (initialement prévues le 26 mai et reportées une première fois au 5 juin sous pression internationale) et de reporter la présidentielle du 26 juin au 15 juillet.
La très influente Eglise catholique avait décidé de se retirer du processus électoral et de ne plus cautionner des élections «pleines de lacunes», selon une déclaration des évêques du Burundi. L’Eglise pointe un fichier électoral douteux, ainsi que les violences policières qui ont accompagné les manifestations des opposants à un troisième mandat de Nkurunziza. Ce dernier, élu en 2005 par le Parlement et reconduit en 2010 au suffrage universel, avait déclenché le 26 avril un mouvement de contestation émaillé de violences qui a déjà fait une quarantaine de victimes et poussé à l’exode plus de 100 000 Burundais vers les pays voisins. Un sommet des chefs d’Etats d’Afrique de l’Est à Dar es Salaam, en Tanzanie, avait réclamé le 31 mai le report des scrutins d’au moins un mois et demi et l’arrêt des violences.
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