dimanche 19 avril 2015

Au Bénin, la campagne pour les législatives ne décolle pas

« De quelle campagne me parlez-vous ? La campagne pendant laquelle les hommes politiques viendront distribuer de l’argent et ne pas penser à nous une fois qu’ils seront élus ? » Comme de nombreux autres Béninois, Nassiri, la trentaine, dit ne rien attendre de la campagne pour les prochaines législatives qui se déroule dans le pays depuis le 11 avril.
A une semaine du scrutin prévu le 26 avril, les habitants de Cotonou, la capitale économique semblent avoir d’autres préoccupations et d’autres priorités que d’assister aux réunions publiques des partis politiques.
« Il n’y a pas d’argent dans le pays, on en a vraiment assez. Je n’ai pas le temps de battre campagne pour quelqu’un alors que je peine à régler mes factures », lance Akanni, quarante ans. Il a toujours voté pour le Parti du renouveau démocratique (PRD) d’Adrien Houngbédji, ancien premier ministre et adversaire malheureux de Thomas Boni Yayi à la présidentielle de 2010. « Mais qu’est-ce qu’ils ont fait pour le pays ? Ils ne sont même pas capables d’assainir les rues de Cotonou », grince-t-il, en désignant la voie encombrée de déchets qui passe devant son atelier de sérigraphie dans le quartier populaire de Gbégamey.
C’est pourtant sur ce même chemin sale et inondé qu’a paradé mardi 14 avril une caravane de zémidjans, les motos-taxis de Cotonou, en faveur d’Edgard-Yves Monnou, ancien ambassadeur du Bénin en France, et candidat du PRD à Cotonou.
« En réalité, la crise économique a entamé cette ferveur populaire. Les populations sont beaucoup plus préoccupées par leur quotidien que par des politiciens qui ne proposent aucune solution », explique l’universitaire Blaise Donou.
Les états-majors des partis politiques se veulent rassurants et ne croient pas au désintérêt des populations quant aux législatives. « Les débuts de campagne électorale ont toujours été timides. Elle prendra son envol au fur et à mesure », affirme Eugène Azatassou, coordonnateur national du parti présidentiel, les Forces Cauris pour un Bénin émergent (FCBE). Même son de cloche du côté de la Renaissance du Bénin, le parti de Nicéphore Soglo, ancien président et maire de Cotonou depuis 2002.
Dans ses différents meetings, l’opposition met l’accent sur les polémiques autour des velléités de révision constitutionnelle prêtées à l’actuel président Boni Yayi, laquelle révision lui permettrait de briguer un troisième mandat consécutif. La crainte de l’opposition est renforcée par l’objectif affiché par le parti au pouvoir de glaner au moins 50 sièges de députés sur 83 lors des élections du 26 avril. L’opposition s’inquiète aussi de ce que les cartes d’électeurs n’ont toujours pas été distribuées alors que la loi électorale fixe un délai de quinze jours minimum avant le scrutin pour cette opération.

Par Hermann Boko (contributeur Le Monde Afrique, Cotonou)
lemonde.fr

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