jeudi 8 juillet 2010

Burkina Faso - Le Nord-Burkina dans l’oeil d’Al-qaïda

(Monde Actu 08/07/2010)
Fin prématurée de mission pour les Peace corps (Volontaires du Corps de la paix) américains à Ouahigouya ? On est en tout cas tenté de le penser avec le rappel précipité de tous ces jeunes yankee de cette région du Burkina Faso. En effet, selon des informations concordantes, dans la nuit du jeudi 1er juillet 2010, tous les Corps de la paix ont été rappelés dare-dare des différents villages du Yatenga. Rassemblés dans la cité de Naba Kango, c’est sous bonne escorte militaire qu’ils ont quitté cette ville le lendemain matin.
Raison de ce départ sur la pointe des pieds ? Des militants de la nébuleuse AlQaida s’apprêteraient à y prendre en otages des Occidentaux, notamment des compatriotes de Barack Obama. Présente dans nos colonnes dès lundi dernier, cette information a été aussi diffusée sur les ondes de Radio France internationale (RFI) deux jours plus tard. Mais pas plus.
Et curieusement, les autorités américaines et burkinabè semblent garder un mutisme total sur ce sujet. Une omerta qui intrigue d’autant plus que c’est bien la première fois, sauf erreur ou omission de notre part, que le réseau d’Oussama Ben Laden menace de mener des expéditions en terre burkinabè par le biais de sa branche maghrébine, AlQaida au Maghreb islamique (AQMI), ce tentacule terroriste qui a acquis sa triste réputation, particulièrement dans les déserts algérien, malien, nigérien et mauritanien.
Une chose est sûre, l’efficacité du réseau d’information des Américains est telle qu’il n’y a pas de place au doute quant à la véracité et au sérieux des renseignements ayant conduit l’Oncle Sam à procéder au rappel des volontaires yankee du nord burkinabè.
Jusque-là, cette zone du Faso semblait une enclave de quiétude, un îlot épargné par les djihadistes qui guerroient dans la bande sahélo-sahélienne, avec pour cibles privilégiées les citoyens occidentaux, qu’ils enlèvent, séquestrent et dont ils monnaient la libération.
Alors, qu’est-ce qui a bien pu amener ces fous d’Allah à s’intéresser à la terre des hommes intègres et à vouloir y mener des attaques ? Les hypothèses sont très nombreuses, mais nous pouvons en retenir trois qui nous semblent les plus importantes.
La première pourrait être le rapprochement du Burkina Faso des Etats-Unis d’Amérique. Après une longue période de froid, les relations entre Ouagadougou et Washington se sont réchauffées au cours de cette dernière décennie.
Pour preuve, le Burkina a été déclaré éligible à nombre de programmes et d’aides américains, comme le MCC (Millenium challenge account) et l’AGOA (African Growth and Opportunity Act) et, tout récemment, il y a eu Flint¬lock dont Ouagadougou a abrité le centre de commandement. Les islamistes ont peut-être voulu appliquer l’adage selon lequel « l’ami de mon ennemi est mon ennemi ».
Ou encore, l’AQMI aurait menacé de frapper dans la région de Ouahigouya afin d’amener le Burkina à réviser ses liens et sa coopération, pour ne pas dire sa collaboration, avec le gendarme du monde. On se souvient aussi que nombre de nos lecteurs s’inquiétaient de la tenue de Flint¬lock au Burkina et du courroux des islamistes que cela pourrait attirer sur nous…
La deuxième hypothèse pourrait être la résultante des médiations et négociations assurées par le président du Faso, Blaise Compaoré, dans les affaires de prise d’otages dans la bande sahélo-saharienne. Notre président a montré, ces derniers temps lors de ces négociations qu’il avait un carnet d’adresses et des contacts sûrs avec les islamistes qui écument le désert. Et le problème est qu’avec ce genre d’accointances, parfois, ça devient comme l’histoire du chien qui, pour une raison ou une autre, cherche à mordre ses connaissances.
Notre troisième postulat pourrait être qu’AQMI serait tout simplement en train de profiter de la porosité des frontières pour coloniser et étendre son théâtre d’opérations à l’entièreté de la zone désertique du Sahel. Ou alors, la pression et la répression sont si fortes contre eux dans leurs anciens terrains qu’ils ont eu envie de venir prendre un peu d’air frais au Burkina, où ils pensent peut-être pouvoir faire face aux forces de défense et de sécurité.
L’un dans l’autre, il faut reconnaître que cette menace des partisans de Ben Laden sonne le glas d’une époque où on croyait ici au Burkina que certaines choses n’arrivaient qu’aux autres. Dans un monde globalisé, le Faso ne peut indéfiniment rester un îlot de tranquillité au moment où les autres sont en train de trimer et de casser de l’islamiste.
Cet épisode doit être la sonnerie du tocsin pour des actions conséquentes contre le fantôme, qui est déjà entré au Burkina. Il faut à présent une lutte acharnée et concertée entre nos hommes de tenue mais aussi les populations civiles pour endiguer et bouter les terroristes hors de nos frontières.
Parce qu’il est une destination de grands rendez-vous, il serait très dommageable à notre pays de laisser les fondamentalistes musulmans y foutre le bordel.

San Evariste Barro, l’Observateur
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1 commentaire:

  1. "Notre troisième postulat"? Ou l'art de s'approprier les écrits des autres. On retrouve d'étranges similitudes entre cet article et celui du courrier international...
    http://www.courrierinternational.com/article/2010/07/12/al-qaida-commence-a-faire-peur

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