jeudi 23 juillet 2015

Sassou : son dernier combat au prix du sang

L’homme ne manque pas une occasion pour menacer de paisibles populations sans défense. Allant jusqu’à parler froidement du « goût du sang humain » ou du « sang des autres » si, d’aventure, sa réforme constitutionnelle se heurtait à l’hostilité prévisible d’un peuple dont les aspirations sont aux antipodes de sa volonté de mourir au pouvoir.
Tribune libre
Sentant sa chute inéluctable, après des décennies de règne sans partage, le président congolais, voïvode de son Etat, veut encore croire à la puissance de sa baïonnette. Dissimulant à peine son désarroi, il tient de plus en plus des discours glaçants, face à son peuple.
L’homme ne manque pas une occasion de lancer des menaces à des paisibles populations sans défense. Allant jusqu’à parler froidement du « goût du sang humain » ou « le sang des autres », si d’aventure sa réforme constitutionnelle se heurtait à l’hostilité prévisible d’un peuple dont les aspirations sont aux antipodes de sa volonté de mourir au pouvoir.
Claire comme de l’eau de roche, la Constitution congolaise constitue une avancée démocratique contemporaine garantissant l’alternance. Inspirant le respect, en ce sens qu’elle contient une triple limitation intouchable sans ambiguïté notamment le nombre de mandats, la durée d’un mandat ainsi que l’âge limite des candidats.
A quelques mois des présidentielles, la Loi Fondamentale, exige du premier magistrat qu’est le Président de la République son respect absolu et par conséquent son application stricte.
Mais l’anti-constitutionalisme viscéral du Président le conduit à se dérober de son devoir en regardant ailleurs tout en développant des multiples initiatives visant la conservation du pouvoir coûte que coûte. C’est de la haute trahison, ont tranché récemment les parlementaires burkinabè confrontés à la même problématique.
Pervertir la sagesse traditionnelle ou pratiquer la pseudo-concertation ou encore monologuer en palabrant en lieu et place d’un dialogue sain constituent des itinéraires bis de la voie de contournement de la Constitution. Il est effarant de constater que la seule personne ayant prêté serment quant à la défense absolue de cette Constitution feigne d’ignorer sa tâche ainsi que les institutions étatiques mises à sa disposition à l’instar de la Cour Constitutionnelle.
Les bourreaux de cette Constitution, érigés en sages, dialogueurs nationaux ou en Président, ont lancé l’assaut de l’ordre constitutionnel et tentent de déverrouiller les fondamentaux garantissant l’alternance. Composé essentiellement d’opportunistes et courtisans du pouvoir militaro-ethno-mafieux passéistes, un coup d’Etat est en cours désormais au Congo. Leur objectif consiste à porter le fer à une disposition fondamentale ayant garanti la paix et la stabilité du pays. Un paradoxe.
Le président congolais qui cumule plus d’un demi-siècle de pouvoir fait figure de dernier chef de guerre venu du passé et fossilisé à la tête de son Etat. Incontestablement, le chef de l’Etat congolais a déjà manqué sa sortie. Son sort, scellé par la Constitution, attend un dénouement peut-être dans la rue qu’il quadrille pour l’instant.
Ce dernier combat que livre en fait ce futur ex-président est assez inédit. Il est, sans nul doute, le plus compliqué pour lui. En effet, se battre avec un papier rédigé par soi-même donne le tournis et incite le Président à la paranoïa. Affronter la Constitution en 2015, à coups de pseudos sages, de concertation et de dialogue s’avère cocasse et dérisoire.
Cependant, sortir les blindés et hélicoptères constitue une déclaration de guerre face à une population sans défense. Peut-on déclarer la guerre à son peuple ? Quelle hérésie !
Devant cette démonstration de panique du pouvoir, les rues de Brazza et Pointe-Noire sont étonnamment calmes. Mais ce silence dissimule beaucoup de bruit. Au torrent d’hémoglobine non encore asséché, le pouvoir de Brazzaville, en chaussant ses grandes bottes, veut-il à nouveau y ajouter des mètres cubes de sang en marchant sur les cadavres des congolais ?
Complètement absurde, cet acte de violence, aux senteurs cadavériques, propre à un pouvoir aux abois révèle surtout le caractère injuste de sa cause. Mépriser le peuple inspire le dégout d’un pouvoir déjà vomi en 1992 et tyrannique de surcroit.
Ce quadrillage de la ville par des blindés précise malheureusement l’engagement du pouvoir de Brazzaville dans son processus du « gout du sang humain » dévoilé par le Président à Kinkala. Trop de cadavres jonchent le sol congolais et trop d’énigmes attendent d’être élucidés.
Arrivé au pouvoir par l’épée, ce pouvoir mérite bien sa place dans les poubelles de l’histoire. Comme tous les jeunes du monde entier, la jeunesse congolaise dont la moyenne d’âge est de 19 ans veut du pain, pas de sang ; du lait, pas des larmes de sang ; du boulot, pas de bagne … Bref, la fin des humiliations afin de se dresser debout et contribuer fièrement au concert mondial à travers son talent non encore exploité.
Affolé à l’idée de quitter le pouvoir, le président semble à peine réaliser que nul n’est détenteur d’un quelconque titre foncier du pays. Et pour cause, celui-ci appartient à tous les congolais. Totalement étrangers à la culture démocratique, les cadres et dirigeants de l’establishment, habitués à la manipulation des données électorales en vue des résultats officiels voulus et toujours biaisés sont confrontés à une difficile équation.
Entre conserver le pouvoir au prix du sang d’une part, et sonner les trompettes de libération du peuple au prix du sang, d’autre part, il y a, sans aucun doute, un juge de paix que constitue le respect de la Constitution actuelle. Option, hélas, rejetée par la dictature qui s’emploie à déconstruire les acquis tout en convoquant, sans cesse, les facteurs douloureux d’instabilité.
C’est là qu’apparait la responsabilité ardente et historique de la diaspora qui est d’accompagner la gestation de ce temps nouveau en défiant cette dictature à travers un soutien réel et efficace en vue de l’instauration de la démocratie en cette Afrique naufragée.
Abraham Avellan WASSIAMA
http://mwinda.org

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