(Sidwaya 18/10/2012)
Un différend frontalier oppose le Burkina Faso et la République sœur du Niger. Ces deux Etats, tous colonisés par la France, se disputent la paternité de localités dans la zone de l’Est du Burkina. Dans cette zone, Burkinabè et Nigériens vivent ensemble, sur le terrain, ignorant les questions de frontières, allant et revenant de part et d’autre, partageant parfois les mêmes infrastructures sanitaires, se mariant même entre eux… Signe d’une intégration parfaite entre les peuples, sur le terrain. Mais, des Etats responsables peuvent-ils se contenter de vivre, de façon informelle, sans se soucier des limites territoriales, même virtuelles, qui les séparent ? Comme on le dit et à l’image d’un mariage où tout se passe bien, tant qu’il n’y a pas de problème, l’on peut aussi dire qu’aux frontières, les populations peuvent se fréquenter, vivre ensemble, tant que tout se passe bien.
Certains pourraient se demander si c’était utile de se tirailler pour de pauvres portions de terrains. Mais, mieux vaut toujours prévenir, car, en cas de difficultés, de frictions, la gestion des crises devient difficile. C’est pour cela qu’il est bon que l’on sache exactement quelles sont les limites de chaque Etat. Même si cela ne doit pas fouler aux pieds les idéaux de fraternité et d’intégration.
Ce qui est important à saluer dans la façon dont ce différend entre le Burkina Faso et la République du Niger a été conduit, c’est la méthode choisie. Un choix de raison. En effet, les deux Etats ont décidé, unanimement, de faire recours à la justice, en allant à la Cour internationale de justice. Ainsi, de manière respectueuse, sans discours va-t-en guerre, les deux parties se sont engagées de s’en tenir à la décision de justice. Les propos des autorités, de part et d’autre, le prouvent. En témoignent les propos du ministre burkinabè de la Communication, Alain Edouard Traoré : « Ce qu’il faut retenir de fondamental, c’est la volonté des deux pays à se défendre dans un climat apaisé pour que la Cour internationale de justice puisse trancher ce litige définitivement.
Nous avons de bonnes relations et nous pensons que ce litige ne doit pas nous perturber. Avec un tel esprit, il y a une certaine bonne foi qui se manifeste de part et d’autre ». Et le ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères, de la Coopération, de l’Intégration africaine et des Nigériens de l’extérieur, Mohamed Bazoum, de rassurer aussi en ces termes : « Nos autorités ont, par moment pensé qu’elles s’étaient entendues et puis cela a été mis en cause. De guerre lasse, nous avons décidé, depuis 2009, de saisir la Cour internationale de justice. Elle va rendre un verdict qui sera accepté et par le Burkina et par le Niger, quel qu’il soit. Cela rendra notre relation encore plus facile, qu’elle ne l’a été jusqu’à présent ».
Tout cela est le signe d’un pas en avant pour les pays africains. Les uns et les autres ont compris qu’il n’y a pas lieu de prendre des armes pour se combattre, pour des territoires, quelles que soient leurs richesses. Si cela arrivait en Afrique, ce serait une occasion de plus pour pointer du doigt les Africains. Ce choix est d’autant plus responsable et à encourager, quand on sait que des questions de frontières ont très vite provoqué des conflits, voire des guerres entre pays amis et voisins. Le Burkina Faso et le Mali, dans leur histoire, en savent quelque chose (…) Et des exemples de crises contemporaines, dûs aux problèmes de territoires, existent à travers le monde. Il y a le cas des crises entre le Japon et la Chine, l’Argentine et l’Angleterre, l’Espagne et le Maroc…
Il y a lieu donc d’accompagner le processus engagé entre les autorités burkinabè et nigériennes. Les deux pays, on se souvient, ont, le 20 juillet 2010, saisi conjointement la Cour internationale de justice (CIJ) d’un différend frontalier les opposant. Ainsi, par lettre conjointe datée du 12 mai 2010 et déposée au greffe, le 20 juillet 2010, les deux Etats ont notifié à la Cour, un compromis signé le 24 février 2009 à Niamey et entré en vigueur le 20 novembre 2009. Aux termes de l’article premier de ce compromis, les parties ont convenu de soumettre leur différend frontalier à la Cour et de procéder, chacune, à la désignation d’un juge ad hoc.
Selon les termes de l’entente, la Cour est priée de déterminer le tracé de la frontière entre les deux pays dans le secteur allant de la borne astronomique de Tong–Tong (Latitude : 14° 25’ 04" N/Longitude 00° 12’ 47" E) au début de la boucle de Botou (Latitude 12° 36’ 18" N/Longitude 01° 52’ 07" E) ; de donner acte aux parties de leur entente sur les résultats des travaux de la Commission technique mixte d’abornement de la frontière Burkina Faso-Niger en ce qui concerne les secteurs suivants : le secteur allant des hauteurs du N’Gourma à la borne astronomique de Tong-Tong et le secteur allant du début de la boucle de Botou jusqu’à la Rivière Mékrou.
Les politiques se sont entendus. Les populations sur le terrain vivent en parfaite harmonie. La balle est donc dans le camp de la Cour internationale de justice. Pour trancher, une bonne fois pour toute, ce différend qui n’a que trop duré.
Ali TRAORE (traore_ali2005@yahoo.fr)
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