(Agence Ecofin 20/01/2012)
(Agence Ecofin) - Un nouveau rapport d’enquête sur l’attentat du président rwandais Juvenal Habyarimana du 6 avril 1994 innocente les sept proches de Paul Kagame et laisse présager une amélioration des rapports politico-diplomatiques entre les deux Etats. Le rapport d’expertise français rendu public mardi 10 janvier, au sujet de l’attentat du président hutu, à l’origine du génocide et du massacre de plus de 800 000 Rwandais (selon l’ONU), bouleverse les précédentes conclusions. D’après le rapport, l’avion a été abattu par des missiles tirés depuis le camp militaire de Kanombe, tenu par des hutus loyalistes et non depuis la colline de Masaka occupée par des rebelles tutsis. Cette dernière hypothèse était celle de juge Bruguière, en charge de l’affaire avant de prendre sa retraite. Pour l’avocat des sept Rwandais encore inculpés, « la divulgation de ce rapport d'expertise marque un tournant définitif dans cette instruction ». Ces derniers devraient ainsi être innocentés.
Pour la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo (photo), « il est clair pour tous désormais que l'attentat contre l'avion était un coup d'Etat mené par des extrémistes hutus et leurs conseillers ». La présence de victime française dans l’avion du président rwandais a conduit l’ouverture d’une enquête française dirigée, à l’époque, par le juge Bruguière. L’enquête conclut à la responsabilité des rebelles tutsis du FPR (Front patriotique rwandais). Neuf mandats d’arrêt internationaux ont ainsi été lancés, en 2006, contre de hauts responsables du FPR, proches de l’actuel président Paul Kagame. Ces mandats ont immédiatement abouti à la rupture des relations diplomatiques avec la France et à une riposte rwandaise avec la rédaction d’un rapport officiel sur le rôle controversé de la France au Rwanda au moment du génocide.
Marc Trévidic, magistrat anti-terroriste et Nathalie Poux ont été chargés de clore le dossier suite à la retraite de Bruguière. Les deux magistrats ont repris l’enquête dès le départ avec investigations sur les lieux de l’attentat aux côtés d’experts aéronautique, géomètres, balisticiens et acousticiens avant de fournir ces nouvelles conclusions des plus surprenantes. Pour Paris, le résultat de l’enquête apparait comme un « soulagement ». La réconciliation avec Kigali était, en effet, un objectif du président Sarkozy depuis 2007. Déjà en 2010, il reconnaissait une « forme d’aveuglement » sur la « nature génocidaire » du régime d’Habyarimana que le gouvernement français soutenait fortement.
L’enjeu politique d’un tel rapport est considérable eu égard aux relations entre Kigali et Paris et notamment au sujet d’un négationnisme largement contesté du génocide rwandais. « Avec cette vérité scientifique, les juges Trévidic et Poux ont fermé brutalement la porte à 17 ans de campagne de négation du génocide (...) », a d’ailleurs affirmé Louise Mushikiwabo.
Toutefois, la réaction de Paul Kagamé ne semble pas dénuée de contestation. En effet, s’il a déclaré être heureux du rapport, il aurait ajouté qu’il n’appréciait pas que le Rwanda ou le continent africain soit jugé par des étrangers.
Vendredi, 20 Janvier 2012 08:27
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