(L'Express 26/02/2010)
Point d'orgue de la "réconciliation" franco-rwandaise, la visite à Kigali, ce jeudi 25 février, de Nicolas Sarkozy reflète la volonté élyséenne de solder les mécomptes africains de l'ère Chirac.
Alors que Nicolas Sarkozy est en visite à Kigali, ce jeudi, le ministre rwandais de la Justice attend que les responsables du génocide, exilés en France notamment, soient traduits devant les tribunaux. Et pourquoi pas dans leur pays d'origine.
Quelle est votre position sur le dossier Rwamucyo, du nom de ce médecin rwandais qui exerçait à l'hôpital de Maubeuge juqu'en octobre dernier, alors qu'il est soupçonné d'être l'un des idéologues du génocide à Butare?
Tharcisse Karugarama:Un mandat d'arrêt international a été émis par les autorités rwandaises à l'encontre du docteur Eugène Rwamucyo en août 2007. Une plainte existait également en France, malgré laquelle il a pu continuer d'exerçer son activité en toute quiétude. Fin 2009, deux juges d'instruction, mesdames Pous et Ganassia, sont venues de Paris pour se renseigner à son sujet. Sauf que Rwamucyo, lui, vit désormais en Belgique...
Cette affaire n'a que trop duré. Il est temps que tous les Rwandais soupçonnés de crimes contre l'humanité et réfugiés à l'étranger (dont une quinzaine en France, ndlr) soient jugés. C'est important pour le Rwanda, pour la France et pour la communauté internationale.
P. Huguen/AFP
Eugène Rwamucyo, médecin rwandais qui exerçait à l'hôpital de Maubeuge juqu'en octobre dernier, alors qu'il est soupçonné d'être l'un des idéologues du génocide à Butare.
Le docteur Rwamucyo dément toutes les accusations et se dit victime d'une cabale en tant qu'opposant au régime...
Le gouvernement rwandais prône la politique de réconciliation nationale. Le docteur Rwamucyo devrait avoir confiance en la justice de son pays. Ces dernières années, les tribunaux gacaca (jurys populaires mis en place pour solder les affaires liées au génocide) ont jugé près d'un million de personnes. Or, actuellement, dans les prisons rwandaises, il n'y a plus que 34 000 détenus accusés d'avoir participé aux massacres de 1994. Tous les autres ont accompli leurs peines, à moins qu'ils n'aient été relaxés, et sont parfaitement réinsérés dans la société rwandaise.
Eugène Rwamucyo, lui, a été condamné par un tribunal gacaca, mais par contumace. Ici, il aurait droit à un nouveau procès. Notre gouvernement ne cherchera jamais à incriminer quelqu'un d'innocent. Mais la réconciliation nationale passe aussi par le combat judiciaire et diplomatique contre l'impunité.
Par Henri Haget © Copyright L'Express
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