(Le Potentiel 26/02/2010)
Belle moisson que celle récoltée par la délégation congolaise dépêchée à Paris pour prendre langue avec les créanciers membres du Club de Paris. En plus d’un rééchelonnement de près de 1,65 milliard Usd, le Club de Paris a accepté d’annuler environ 1,3 milliard Usd de dette de la RDC. Cependant, la promesse du Club de Paris est assortie d’une condition : le respect des engagements en matière de gestion et de gouvernance économique conformément au programme conclu avec le FMI.
Le Club de Paris, groupe informel de créanciers publics, a annoncé hier jeudi avoir procédé à l’annulation d’une partie de la dette due par la République démocratique du Congo. L’accord, qui porte sur près de 3 milliards de dollars de dette (en arriérés et échéances), conduit à l’annulation de 1,31 milliard de dollars et au rééchelonnement d’environ 1,65 milliard de dollars de dette, après 2012, précise le communiqué.
En raison de la capacité de paiement limitée du pays, souligne le Club, les créanciers ont différé après le 1er juillet 2012 le remboursement des échéances restant dues sur sa dette à court terme.
En pratique, le coût du paiement de la dette sera réduit de 97% par an sur la période allant de mi-2009 à mi-2012.
Cependant, la concrétisation de la promesse du Club de Paris dépend de la bonne conduite de la RDC. Des sources internes du Club de Paris rapportent que cette opération devrait intervenir d’ici quelques mois, lorsque le pays aura respecté ses engagements en matière de gestion et de gouvernance économique conformément à l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) appuyée par le FMI et la Banque mondiale.
Ultime mission du FMI
Le stock de dette due par la RDC aux créanciers du Club de Paris était estimé à 6,92 milliards de dollars au 30 juin 2009, selon le communiqué.
Une mission des experts du département Afrique du FMI arrive à Kinshasa le mardi 2 mars 2010 pour scruter les comptes du nouveau Programme économique du gouvernement (PEG 2). C’est le premier test oral auquel doit se soumettre le gouvernement depuis la conclusion le 11 décembre 2009 d’un nouvel accord formel avec le Fonds.
La mission du FMI s’est donné juste deux semaines pour faire le tour du PEG 2. Deux semaines qui définiront les chances de la RDC de prétendre, à brève échéance, au point d’achèvement de l’initiative PPTE. Mais, la dernière sonnette d’alarme, tirée depuis la Banque centrale du Congo par le Comité de politique monétaire, sème le doute dans les esprits.
Deux semaines décisives
Le 11 décembre 2009, jour d’approbation du nouvel accord formel avec la RDC, le Conseil d’administration du FMI avait prévenu, dans le communiqué diffusé à ce propos, toute l’importance qu’il attachait à cette première revue du PEG 2. « L’achèvement satisfaisant de la première revue du programme économique du gouvernement qui est appuyé par la FRPC, notait-il, est une des conditions essentielles à remplir pour que la RDC atteigne le point d’achèvement de l’initiative PPTE renforcée et bénéficie de l’initiative d’allégement de la dette multilatérale (IADM), ce qui pourrait conduire à un allégement de la grande majorité de la dette extérieure du pays ».
Dans tous les cas, les deux semaines de mission à Kinshasa des experts du FMI est bien crucial pour ne pas en minimiser sur les chances de la RDC d’atteindre à brève échéance, soit fin juin 2010, le point d’achèvement de l’Initiative PPTE. Au gouvernement, on mesure l’étendue des enjeux et l’on semble n’avoir ménagé aucun effort ni mis de côté aucun détail technique pour convaincre. Car, au bout du parcours, c’est un effacement d’environ 10 milliards de dollars USD auquel aura droit la RDC si les conditions requises pour atteindre le point d’achèvement étaient réunies. En juin prochain, le Conseil d’administration se penchera sur le sujet. Mais, à condition que jusqu’au 16 février 2010, date de fin de clôture de la mission du FMI en RDC, le gouvernement produise des éléments qui rassurent.
Or, sur ce point précis, le gouvernement a fait preuve d’un laxisme qui se traduit depuis début février par la résurgence des tensions sur le marché des changes. Même si l’inflation est en perte de vitesse, la dépréciation monétaire est bien prononcée par le fait d’un désordre criant dans les finances publiques.
Mardi 16 février 2010, le Comité de politique monétaire, élargi aux experts de la Présidence, de la Primature et de certains ministères techniques du gouvernement, a évoqué le sujet, formulant une série des recommandations, pour prévenir le danger. A l’État – sous-entendu le Gouvernement - principal responsable des déséquilibres, il a notamment recommandé : « la nécessité pour le Trésor de tempérer le rythme de consommation des excédents de trésorerie sur une courte période en limitant le volume des décaissements et ce, en raison de l’exiguïté du marché des changes afin d’éviter de nourrir les anticipations; le maintien de la gestion sur base caisse en vue de prévenir toute détérioration de la position nette du Gouvernement ; l’intérêt de fournir régulièrement au sous-comité technique des prévisions de la liquidité toutes les informations utiles sur les dépenses de l’Etat dans le cadre de la prévision de la liquidité ».
La RDC n’a pas été aussi proche du point d’achèvement que le gouvernement n’a plus droit à l’erreur. C’est l’ultime sacrifice auquel il doit se livrer afin de conforter le dossier de notre pays et d’obtenir des annulations substantielles du stock de la dette extérieure, environ 10 milliards de dollars US sur un stock de 13,1 milliards de dollars au titre de l’initiative PPTE et de celle d’annulation de la dette multilatérale (IADM).
Point d’achèvement : un pari possible
D’autres pays africains, comme tout récemment le Congo/Brazzaville, ont franchi cette étape. Pourquoi n’en serait-il le cas pour la RDC? Pour autant qu’il soit aujourd’hui prouvé – Brazzaville l’a démontré - que le point d’achèvement n’est pas un miracle ou un objectif relevant d’une intervention divine. C’est plutôt la résultante d’un effort coordonné de l’exécutif, mobilisé autour d’un idéal, mû par le souci de relever le défi. Si en 2003, le point de décision a été possible, en 2010, cela doit être autant pour le point d’achèvement.
A ce stade, l’objectif poursuivi est de présenter le dossier de la RDC au Conseil d’administration conjoint du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale de juin 2010. Ce dossier devrait être alimenté par le rapport de la première revue du programme FRPC par les services du Fonds monétaire international et par celui de l’évaluation conjointe du niveau de réalisation des déclencheurs du point d’achèvement.
En encadré, l’essentiel du communiqué posté sur son site par le Club de Paris.
Le Club de Paris et la RDC concluent un accord de restructuration de dette au titre de l’I-PPTE
Les créanciers du Club de Paris sont convenus le 25 février 2010 avec le Gouvernement de la RDC d’un accord de restructuration de sa dette publique extérieure, suite à l’approbation le 11 décembre 2009 par le FMI d’un nouvel arrangement de trois ans au titre de la Facilité de crédit élargie.
Cet accord a été conclu selon les termes dits « de Cologne » élaborés par les créanciers du Club de Paris en vue de la mise en œuvre de l’effort intérimaire de l’initiative PPTE. Il traite environ 2.957 millions de dollars de dettes (arriérés et échéances) et conduit à l’annulation de 1.310 millions de dollars et au rééchelonnement d’environ 1.647 millions de dollars, durant la période du programme du FMI.
A titre exceptionnel, au vu de la capacité de paiement limitée de la République démocratique du Congo, les créanciers ont également accepté de différer après le 1er juillet 2012 le remboursement des échéances dues par la RDC sur sa dette court terme et post date butoir, ainsi que sur une partie significative des arriérés sur ces créances. Ils ont également convenu de différer tous les intérêts dus sur les montants traités.
Ces mesures devraient permettre de réduire de 97% le service de la dette due par la RDC aux créanciers du Club de Paris entre le 1er juillet 2009 et le 30 juin 2012.
La RDC s’est engagée à affecter les sommes auxquelles les créanciers du Club de Paris ont renoncé aux objectifs prioritaires identifiés dans le cadre de son document stratégique de réduction de la pauvreté. La RDC s’est également engagée à rechercher un traitement comparable de la part de ses créanciers non membres du Club de Paris.
Les créanciers du Club de Paris ont indiqué leur disponibilité à réduire le stock de la dette de la RDC lors de l’atteinte du point d’achèvement afin de lui permettre de rétablir la soutenabilité de sa dette.
Les membres du Club de Paris qui ont participé au réaménagement de la dette de la RDC étaient les représentants des Gouvernements de l’Allemagne, de l’Autriche, de la Belgique, du Canada, du Danemark, de l’Espagne, des Etats-Unis d’Amérique, de la Fédération de Russie, de la France, de l’Italie, du Japon, de la Norvège, des Pays-Bas, du Royaume-Uni et de la Suède. Le Brésil a également participé à ce réaménagement de dette.
Les observateurs à cette réunion étaient des représentants du FMI, de l’Association Internationale pour le Développement et de la Banque Africaine de Développement.
La délégation de la RDC était conduite par M. César Lubamba Ngimbi, ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat. La réunion était présidée par Mme Delphine d’AMARZIT, co-présidente du Club de Paris, chef de service à la Direction générale du Trésor et de la Politique économique au ministère français de l’Économie, de l’Industrie et de l’Emploi.
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