Neoleadership 26/02/2010)
Nouveau gouvernement, nouvelles accusations de malversations financières de ministres sortants ou certains toujours en poste ! Il est, en effet, désormais un rituel d’entendre et lire sur le Net des révélations fondées ou fantaisistes de détournements de deniers publics ou d’abus de procédures administratives dans l’attribution des marchés de l’Etat à chaque changement de gouvernement. Pourquoi ces rumeurs ne sont jamais suivies d’enquêtes pour éclairer tout le monde ?
Certes, nos traditions pesant encore lourdement sur nos mentalités font que le népotisme, copinage et favoritisme communautaire sont des attitudes considérées comme ‘’légitimes’’ en Guinée mais seulement condamnées et dénoncées par ceux qui n’en bénéficient pas. Détourner les biens de l’Etat est devenue le crime le plus répandu et scandaleusement toléré en Guinée au point qu’il n’est pas exagéré de dire que c’est un fait de société.
Pour preuve ne citons que l’exemple de ce journaliste très acerbe du temps de Conté -ce qui fit sa renommée-, apparemment aux entregents étendus au point d’être nommé au mépris des règles dû à son relative jeune âge à la tête du CNC puis ministre. Mais ce dernier à l’instar de nombreux autres compatriotes se comporta exactement de la même que ceux qu’il critiquait et vilipendait dans ses articles. A qui se fier en Guinée : tout le monde semble corruptible comme nous l’avons découvert avec Dadis.
Les tragiques événements du 22 janvier 2007 ont marqué, en théorie, le début de la campagne de lutte politique pour la bonne gouvernance et de l’impunité en matière de ‘’vols de l’Etat’’. Tous les discours des acteurs politiques- syndicats compris, puisqu’ils sont devenus insidieusement politiques aussi- ont promis de la transparence et un assainissement des pratiques financières ; surtout de poursuivre et juger tous ceux qui ont commis des crimes de détournements de fonds publics ou d’autres malversations au préjudice de l’Etat.
Mais malgré les sacrifices de jeunes gens en 2007, les différents gouvernements de Kouyaté, Souaré à Dadis n’ont fait que de la démagogie en mettant en exergue un ou deux cas pour calmer le peuple sans même daigner aller jusqu’au bout de leur action. Après trois ans de velléités de redressement économique, nous ne savons toujours pas comment et où sont passés tous ces milliards en devises qui manquent aux comptes de la Nation en Guinée et à l’étranger !
Je tombe encore plus des nues en lisant qu’avec tout ce que nous avons vu lors des Dadis shows que des membres de son entourage et de son gouvernement, voire Dadis même, puissent être mêlés à des ’’ affaires’’ a fortiori cités comme les nouveaux ‘’voleurs’’ de la Nation. Avec tout le ‘’boucan’’de Dadis, si ces accusations sont fondées et prouvées, et bien : à qui se fier en Guinée, encore une fois? Cela revient à poser encore une fois de plus la question de savoir pourquoi successivement Kouyaté, Souaré et Dadis avec toutes les enquêtes préliminaires en leur possession n’ont pas voulu les conduire jusqu’à leur termes pour inculper ou alors disculper une fois pour toute les personnes accusées ?
La seule explication qui ait du sens est qu’il y a une sorte de ‘’conspiration du crime financier’’ : le peuple en tant qu’entité de masse est nigaud, faisons lui croire que nous agirons mais en fait, personne ne sera réellement inquiété de sorte qu’à mon tour, il en soit de même. Sauf que Mr Souaré et un ex-ministre ont été malchanceux car ils ont servi de pions dans le jeu machiavélique de Dadis qui devait jouer au justicier Monsieur Propre pour mieux nous embobiner. Et pourtant Dadis avait tout pour être un leader vénéré et réussir une transition qui lui aurait tout apporté. Hélas ! La cupidité et la naïveté l’ont perdu ; ou simplement la ‘’bénédiction’’-comme on dit en chez nous. Dommage pour lui et la Guinée ! Ce phénomène de détournements de deniers et malversations financières est d’autant plus inquiétant qu’il semble même impliquer les Guinéens venus de l’étranger pour occuper des postes alors qu’ils étaient déjà relativement riches en venant. Cela suggérerait que c’est le système en Guinée qui corromprait ceux qui l’intègre ou le fréquente.
Les procédures, règles et méthodes de travail dans l’administration guinéenne incitent probablement à la délinquance financière. Autrement, il est incroyable que tous ces cadres soient tous naturellement des corrompus. En effet, combien d’entre nous ne seraient pas tenté de détourner s’il n’y pas de contrôle et que l’impunité est presque garantie car tout le monde partage le ‘’butin’’ ? Et la population regarde avec ‘’admiration et envie’’ en espérant un jour son tour aussi. Sans qu’aucune étude n’ait été faite, la Guinée a certainement dans la sous-région (sinon en Afrique) le plus grand nombre de fonctionnaires millionnaires rapporté à la population : aucune personne, à ma connaissance, ayant eu des responsabilités dans l’administration guinéenne ou des sociétés avec l’implication de l’Etat en Guinée depuis 1984 qui ne soit pas au moins très aisée à défaut d’être très riche. Il y a ceux qui sont discrets et les autres qui le montrent ostentatoirement avec voitures de luxe, villas de très haut standing, voyages en Occident en familles, etc.
Ce problème de délinquants en col blanc est un fléau dont tout le monde parle -même les coupables avérés- et qui handicape le développement national mais très peu d’entre nous sommes déterminés à le combattre au delà de la condamnation verbale : encore une fois, nous critiquons tant que c’est n’est pas notre tour (être dans le gouvernement ou un poste de responsabilité).
Cette tolérance au vol de deniers publics, nous rend dubitatifs et sceptiques quant à la volonté de l’Etat de jamais conduire des audits crédibles jusqu’au bout. Vu le nombre de personnes soupçonnées de s’être enrichies illégalement sur le dos de la nation et candidats à la magistrature suprême du Pays, nous nous demandons si ce ne serait pas l’équivalent de donner les clés du Louvre (musée) à Arsène Lupin ?! Et pourtant le CNDD aurait pu décanter ces candidatures mais voilà nous retombons dans le même cercle vicieux qui est qu’au sein même des militaires, certains comme Dadis peuvent difficilement expliquer la source de leurs revenus leur ayant permis tant de réalisations. Vu aussi que les Guinéens sont pressés d’aller aux présidentielles à tout prix avant les législatives, connaissant notre pays, tout le monde va rallier le vainqueur pour un strapontin politique, ce qui risque de donner au président une majorité écrasante : si malheureusement ce sont ceux que nous craignons qui gagnent, tous les sacrifices de ces jeunes gens aura été vain car l’Etat surtout avec toutes les urgences à tacler en Guinée trouvera toujours des méthodes dilatoires pour ne pas poursuivre tous ces voleurs en col blanc surtout si les enquêtes peuvent remonter jusqu’au cœur de l’Etat : la raison d’Etat va s’imposer, la formule imparable pour ‘’impunité’’.
Toujours dans le même cadre, à propos des contrats miniers pendant la période du CNDD, l'avis d'un juriste spécialiste dans ce domaine serait intéressant: est-ce qu'un gouvernement légal et élu peut récuser tous ces contrats sur la base qu'il n'y avait pas continuité de l'Etat dans la mesure où le CNDD était issu d'un coup d'Etat donc sans mandat du peuple guinéen pour agir en son nom, sans parlement avec une constitution suspendue, d'autant plus que la Guinée était suspendu de la CEDEAO et L'UA. Donc sur quelle base légale les engagements du CNDD sont ceux de la Guinée qui ne les a jamais mandatés ? Les sociétés qui ont signé quoi que ce soit avec les militaires l'ont fait à leur risque et péril. Je pense que cette thèse est défendable, non ?
Finissons en suggérant qu’il faudrait qu’au sein des Forces vives, certains individus(auxquels nous sommes prêts à nous joindre) maintiennent cette entité en tant que groupe de pression et de vigilance après les élections pour lutter contre l’impunité dans tous les registres. C’est cette impunité et ce laxisme moral qui sont à la base de toutes ces dérives et nos malheurs. Encore, pourquoi à chaque changement de gouvernement, il y a toujours des accusations de malversations envers les sortants et que personne (physique ou morale) ne saisisse la justice- le procureur de la république ou l’agent judiciaire de l’Etat- si le gouvernement ne fait rien ; autrement, il vaut mieux rester silencieux au lieu de semer le doute dans nos esprits et salir inutilement des personnalités. Et il faudrait que nous rajoutions à notre devise nationale (après travail –justice –solidarité) - pas d’impunité -plus de vol de l’Etat. C’est un ‘’cancer’’ qui nous interpelle tous ! Le moins que l’on puisse dire c’est que si nous élisons la bonne personne, le futur président guinéen aura beaucoup à faire ! Mais il faudra qu’il se protège physiquement et des ‘’mauvais sorts’’ des marabouts des voleurs.
PS : Il serait plus judicieux d’organiser les législatives en juin pour combler au plus vite une partie du vide constitutionnel et organiser plus sereinement de façon inclusive les présidentielles le dernier trimestre de 2010. Au stade où nous en sommes, pourquoi vouloir bâcler l’élection la plus importante depuis 1958 ? Et j’ai la même lecture qu’Amnesty internationale sur la situation en Guinée (voir leur rapport du 24/02/10).
Ibrahima Diallo –‘’Ollaid ‘’ Pour www.nlsguinee.com
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